Quand « Aniaba, le mousquetaire de Notre-Dame de Paris » rencontre Louis XIV au château de Versailles

LE LIVRE DE LA SEMAINE. Serge Bilé raconte l’histoire d’un jeune aristocrate africain venu en France pour y découvrir le pays, étudier sa langue, sa religion et rencontrer son monarque.

Le Monde  – « Je supplie votre majesté de me permettre de lui avouer le désir que j’éprouve de signaler mon zèle, et l’honneur qu’elle me ferait de servir dans ses troupes en lui offrant la preuve d’un entier dévouement. » Telle est la formule pour le moins alambiquée qu’a apprise par cœur le prince Aniaba d’Assinie en vue de son audience, en 1691, par le roi de France.

La scène se passe au château de Versailles et le jeune Africain qui s’exprime a seulement 19 ans. Aristocrate, originaire des îles Ehotilé regroupant plusieurs peuples de la future Côte d’Ivoire, il a été envoyé en France par son père adoptif, le roi Niamkey des Essouma afin de « saluer le roi et admirer la magnificence de son royaume ».

 

En effet, d’abord méfiant à l’égard des Européens qui commercent avec l’Afrique – car « ne dit-on pas qu’ils dévorent leurs semblables, raison pour laquelle ils se procurent des esclaves et les emmènent dans leur pays, d’où ces pauvres jeunes gens ne reviennent jamais » –, le roi Niamkey s’est laissé convaincre de la bonne foi des Français lorsque Louis XIV lui a fait rendre des compatriotes qui avaient été capturés par un forban.

« Cette bonté de notre grand monarque a produit de si bons effets sur l’esprit du roi d’Assinie et de tout son peuple qu’il regarde à présent les Français comme les protecteurs de son royaume », rapporte à ce sujet le missionnaire Frère Gonsalvez.

 

Un tout autre monde

 

C’est ainsi que le prince Aniaba est envoyé en France afin de découvrir le pays, étudier sa langue, sa religion et rencontrer son monarque. Né en 1672, Aniaba a appris le maniement du sabre, la pêche, les traditions musicales, l’histoire, la signification des fêtes et coutumes de son peuple – notamment « la fête de génération », cette cérémonie qui fait d’un enfant un adulte, qui dure plusieurs mois et « renouvelle le pacte avec les ancêtres. » Il a également des connaissances en botanique et en science, il comprend les mythes et la spiritualité des siens.

En France, il va devoir s’adapter à un tout autre monde et également se convertir au catholicisme. Mais il s’est laissé convaincre que comme le « bosson » de sa religion, « Jésus sert d’intermédiaire entre Dieu et les hommes. Comme le bosson il appelle à distinguer le bien et le mal. Comme le bosson il délègue sa présence aux komians (prêtres ou religieuses) pour agir en son nom ».

Son aventure française va être tout à la fois éprouvante et heureuse. Une fois béni des siens et accompagné d’Anouman son ami d’enfance, Aniaba embarque en 1687 sur le Saint-Louis, un navire trois ponts qui en impose, mais dont les cales pleines laissent échapper une puanteur humaine épouvantable…

 

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Kidi Bebey

 

 

 

Aniaba, le mousquetaire de Notre-Dame de Paris, de Serge Bilé, Kofiba Editions (Abidjan), 20 euros.

 

 

 

 

 

Source : Le Monde

 

 

 

 

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