Le Calame – Les Mauritaniens iront aux élections municipales, régionales et législatives en Mai prochain. À moins d’un trimestre de cette échéance, la précampagne bat déjà son plein. Les candidats à la candidature s’échauffent.
Les partis sont en quête de porteurs de leur étendard. Depuis des mois déjà, l’INSAF multiplie les réunions de sensibilisation et les missions à l’intérieur du pays. Beaucoup moins outillés, les autres ont emboîté le pas. Tous mobilisent les citoyens à s’inscrire sur la liste électorale afin d’exprimer, le jour J, leur droit civique. Un acte noble, à la condition, bien évidemment, de n’être pas dévoyé par la corruption et les intimidations. Nous disposons de largement assez de candidats potentiels, al hamdou lillahi, aptes à contribuer par leurs capacités, leurs compétences et leurs expériences et, surtout, leur moralité, au développement de leur circonscription et, partant, de notre pays. Nous avons également besoin et attendons une compétition saine, empreinte de fairplay, sans invectives mais avec des propositions et critiques constructives.
Grains de sable
Pendant que les politiques s’agitent, deux faits majeurs sont venus comme polluer le débat. D’abord le procès de la Décennie, avec comme principal suspect, l’ex-président Ould Abdel Aziz. Démarré en Janvier dernier, ces assises tardent à aborder les questions de fond à cause des exceptions soulevées par la défense de l’ancien raïs. Après avoir soulevé l’incompétence du tribunal et l’illégalité du procès, les conseils d’Ould Abdel Aziz, renforcés par un des grands pénalistes du Sénégal et une avocate libanaise, ont réussi à retarder le procès proprement dit des faits.
Mieux, ils en ont obtenu un ajournement de quinze jours en contestant la « constitutionnalité de la clause légale » relative aux articles 16 et 47 de la loi fondant le tribunal anti-corruption. Selon les avocats de la défense, le premier contredit la présomption d’innocence et le second incite, à leurs yeux, à la partialité dans la mesure où il stipule que « 10 % des récompenses perdues doivent être attribuées à des institutions de recherche et d’investigation ». Et de saisir en conséquence le juge des lois, à savoir le Conseil constitutionnel qui disposera dudit délai pour statuer. Peut-être une occasion pour cette haute juridiction d’éclairer l’opinion sur ce fameux article 93 de la Constitution auquel s’accrochent tant les conseils d’Ould Abdel Aziz.
De leur côté, les avocats de la partie civile – l’État, en cette occurrence – accusent leurs collègues de la défense de tout faire pour retarder à leur client l’ultime moment de prouver au tribunal et à l’opinion mauritanienne et internationale la provenance de sa fortune colossale, amassée en une dizaine d’années à la tête du pays. « C’est de bonne guerre », a estimé l’un d’eux au cours d’un point de presse. On attend donc la saisine du Conseil et sa sentence.
Un autre évènement est venu perturber la pré-campagne. Il s’agit, hélas, du meurtre, le 9 Février 2023, de Souvi ould Cheïne, dans le commissariat de Dar Naïm 2 (Nouakchott-Nord). Une sombre affaire (voir encadré) qui a mis tout Nouakchott, particulièrement les organisations de défense des droits de l’Homme, en émoi. La victime était un activiste de la Société civile qui ne ratait aucune occasion pour dénoncer les injustices dont sont victimes les populations démunies, l’exclusion et la marginalisation des plusieurs pans de la société mauritanienne.
Sa mort atroce a ému, révolté et cristallisé les frustrations de presque tous les Mauritaniens dont plusieurs milliers ont manifesté pour réclamer justice. Souvi serait, dit-on, victime d’un règlement de comptes et aurait donc payé de sa témérité en rendant coup pour coup aux policiers. En attendant les résultats de l’enquête, on se dit qu’il se serait attaqué à plus fort que lui. Ce meurtre vient prouver combien certains en ce pays peuvent user des forces de sécurité pour régler des comptes à d’autres, semant le désordre et l’horreur dans les familles.
Conscient peut-être du danger que cela représente – la mobilisation des protestataires était énorme et pouvait dégénérer à tout instant – le gouvernement a réagi rapidement en ordonnant une autopsie pour couper court à toutes les supputations : mort d’un arrêt cardiaque, il a sauté de la voiture, etc. À l’arrivée, celle-ci a révélé que l’activiste a fait l’objet de tortures ayant entraîné la mort, suite à strangulation et rupture de vertèbres cervicales. Des sévices très graves et un comportement que rien ne peut justifier de la part des forces dites de « sécurité »
Dalay Lam
Source : Le Calame
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