Recherche scientifique : les Africaines ne lâchent rien

PARCOURS - Accompagnées par la Fondation L’Oréal et par l'Unesco, des Africaines, scientifiques de haut niveau, répondent par leurs travaux à des besoins urgents du continent.

Le Point – Le constat est unanime : les scientifiques africaines, de plus en plus nombreuses, travaillent en réseau et bénéficient ainsi de programmes éducatifs et de bourses dédiés. Elles n’hésitent pas à créer des communautés à même de leur donner une meilleure visibilité sur les réseaux sociaux (Twitter, Instagram, TikTok) et à jouer à fond la carte de la sororité. Au-delà de trouver des soutiens et des financements, ces femmes ambitionnent surtout de changer les paradigmes et les idées reçues sur la recherche africaine. De quoi initier une impulsion à même de permettre à l’Afrique de prendre sa juste place dans la recherche mondiale. Une question cependant : quel prix leur faut-il payer alors que seuls, 2 % des chercheurs au niveau mondial sont originaires d’Afrique subsaharienne, un pourcentage où les femmes représentent un tiers ? A travers le parcours des scientifiques dont nous allons parler ici, on peut en avoir une idée.

Olyvia Gwladys Fadeyi : répondre aux besoins sociétaux pressants

Des recherches directement appliquées au terrain, répondant aux besoins concrets des populations, c’est la mission que s’est donnée Olyvia Gwladys Fadeyi. La doctorante en sciences de l’ingénieur et de la technologie au sein de la Faculté d’Agronomie de l’Université de Parakou, dans le nord du Bénin, est une fonceuse. Elle étudie les champignons dans le but de créer une chaîne de valeur en vue de leur exploitation dans des domaines aussi variés que la santé ou les cosmétiques. Elle est mycologue. Passionnée par cet univers complexe, la chercheuse voit dans la culture des champignons un moyen d’étoffer les connaissances endogènes des populations de cette région du nord-ouest du Bénin et plus largement de l’Afrique de l’Ouest, alors même qu’ils sont consommés et utilisés dans la pharmacopée traditionnelle depuis des millénaires. Avec une vision à 360 degrés, l’enthousiaste chercheuse veut également accompagner les femmes sur le chemin de l’indépendance financière dans cette zone confrontée à plusieurs difficultés comme le changement climatique, les risques sécuritaires, ou encore les inégalités persistantes hommes-femmes.

Depuis le Bénin, la doctorante en Sciences de l’Ingénieur et de la Technologie Olyvia Gwladys Fadeyi s’est concentrée sur la mise en place d’une chaîne de valeur autour des champignons comestibles.

© Fondation L’Oréal

 

Olyvia Gwladys Fadeyi n’a pas son pareil pour décrire l’excitation que lui procurent ses travaux et découvertes : « C’est fabuleux de travailler sur les champignons, c’est un monde vraiment passionnant, confie-t-elle depuis le Bénin. Car au-delà d’être comestibles, les champignons contiennent des propriétés étonnantes qui peuvent servir dans de nombreux domaines. Au Bénin, il existe 40 espèces de champignons comestibles mais seulement 2 % sont véritablement exploitées. Alors que les champignons constituent une mine d’or, s’enthousiasme-t-elle. Cette ressource mérite d’être mieux valorisée, les autorités pourraient en faire un nouveau filon de développement », soutient-elle.

Avec un tel parcours et de telles ambitions, c’est sans surprise qu’elle a été sélectionnée parmi les vingt chercheuses africaines récompensées en 2022 pour l’excellence de leurs travaux scientifiques par le Prix Jeunes Talents Afrique subsaharienne (hors Afrique du Sud) pour les femmes et la science de la Fondation L’Oréal et l’Unesco. Une reconnaissance internationale et une dotation d’un montant de 10 000 euros qui va permettre à la jeune femme de concrétiser certaines pistes de recherche, comme « trouver de nouveaux composés à but pharmaceutiques ou cosmétiques, confie-t-elle encore surprise d’avoir reçu ce prix. Je vais me concentrer sur la recherche et le développement pour montrer que la culture des champignons peut devenir un secteur à part entière de l’économie. »

Les champignons au service de l’autonomisation des femmes

Le déclic pour les champignons, cette membre active de l’université de Parakou l’a eu grâce à son directeur de thèse, le professeur Nourou Soulemane Yorou. C’est avec le soutien de ce dernier qu’Olyvia Fadeyi a développé une stratégie en plusieurs étapes, dont une première phase consiste à proposer un mentorat à environ 180 femmes. Une fois formées sur les méthodes de production des champignons et leur commercialisation, ces femmes pourront se lancer dans cette activité et ainsi se créer une source de revenus dans un contexte de forte pression sociale.

« En Afrique comme partout dans le monde, la place des femmes change, se réjouit Alexandra Palt, directrice générale de la Fondation L’Oréal. Il y a une jeune génération qui a envie de faire bouger les lignes, analyse-t-elle dans un entretien* donné au Point Afrique. Ces chercheuses veulent écrire une nouvelle page de l’histoire et surtout être porteuses des solutions appropriées pour leur continent. Je sens cette énergie, maintenant, est-ce qu’elle va suffire pour changer la donne ? C’est trop tôt pour le dire », pointe-t-elle.

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Source : Le Point (France) – Le 14 février 2023

 

 

 

 

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