La symphonie inachevée de Kylian Mbappé

Deuxième joueur de l’histoire à marquer un triplé en finale de Coupe du monde et meilleur buteur de la compétition, l’attaquant français n’a pas pu empêcher la défaite en finale.

Le Monde – Il n’a pas pu s’empêcher de lui glisser un regard en coin. Sur le podium, trophée de meilleur buteur de la compétition en main, Kylian Mbappé est passé tête baissée à côté de celui de la Coupe du monde, dont il n’a désormais plus l’usufruit. Battus aux tirs au but, après une finale d’anthologie (3-3, 4-2 aux t.a.b.), « ses » Bleus ont cédé, dimanche 18 décembre, leur couronne mondiale à l’Argentine de Lionel Messi. Et s’il n’a pu écarter la défaite, le numéro 10 français a pourtant tout fait, et plus encore, pour mener à nouveau son équipe au butin suprême.

 

Penaud, le pas lourd, Mbappé n’a pas dissimulé sa déception. Au Qatar, le Français était venu pour autre chose qu’un soulier doré. « Je suis venu pour gagner la Coupe du monde, pas pour le “Golden Boot” [titre de meilleur buteur]. Si je le gagne, bien sûr je serai ravi, mais ce n’est pas pour cela que je suis ici », insistait-il après le huitième de finale contre la Pologne. Sur la pelouse du stade de Lusail, dimanche, son rêve a volé en éclats.

Longtemps, Kylian Mbappé est resté discret. Soixante-dix minutes durant, le joueur du PSG a livré une performance rappelant ses quart de finale et demi-finale. Où l’on remarquait plus ses absences en défense – assumées par son coach – que ses accélérations. Du côté argentin, Lionel Messi se muait en chef d’orchestre, menant à la baguette son équipe vers le sacre. Et puis tout a changé. Coup sur coup, l’attaquant français a remis son équipe d’aplomb en une minute à peine. D’abord sur penalty, pour ranimer la flamme, puis en se trouvant à la conclusion « mbappesque » d’une action collective lancée par Kingsley Coman.

Face à l’Argentine, Kylian Mbappé a inscrit un triplé, devenant le meilleur buteur du tournoi, au stade de Lusail (Qatar), le 18 décembre 2022.

Et Kylian Mbappé a souri, redevenant le lutin qui rit, figure inaugurée en quarts de finale lors du penalty manqué par l’Anglais Harry Kane. Il restait dix minutes à jouer, et les chœurs argentins se sont tus, eux qui l’avaient copieusement sifflé à son entrée sur la pelouse – redoutant à raison ses coups d’éclat.

Deuxième joueur à inscrire un triplé en finale

Malgré les prédictions de Lionel Scaloni la veille, la finale de dimanche a tourné au duel Messi-Mbappé. « Le match, c’est Argentine-France. Messi et Mbappé disposent de leurs armes, mais [le sort de la rencontre] ne sera pas seulement entre les mains de ces joueurs », avertissait le sélectionneur argentin. Pendant les prolongations, le capitaine de l’Albiceleste rappelait son cadet de douze ans à l’ordre en redonnant l’avantage à l’Argentine ; avant que, encore sur penalty, le Français égalise une nouvelle fois, à deux minutes du terme de la rencontre, transformant définitivement ce match en une inoubliable finale. Un triplé, le deuxième de l’histoire en finale d’un Mondial après celui de l’Anglais Geoff Hurst en 1966, qui permet à l’attaquant français de supplanter in extremis son coéquipier au Paris Saint-Germain comme meilleur buteur de la compétition (huit réalisations).

 

Lors du Mondial russe, en 2018, Kylian Mbappé avait inscrit quatre buts. Quatre ans plus tard, la fusée française a doublé la mise. « Mon cher ami Mbappé a marqué quatre buts en finale [trois en 2022, un en 2018]. Quel cadeau ce fut de regarder ce spectacle pour l’avenir de notre sport », a dit « le roi » Pelé, qui ne rate rien de l’invraisemblable trajectoire du jeune homme.

« C’est la Coupe du monde des records, j’aurais préféré que ce soit [le cas] jusqu’au bout, affirme Didier Deschamps, qui a longuement enlacé son prodige après le match, pendant la liesse argentine. Kylian a marqué de son empreinte cette finale. Mais son empreinte n’est pas totale, comme il le voulait, d’où sa tristesse à la fin, comme tous les joueurs. » Une symphonie inachevée, que la pluie d’éloges ne consolera pas – pas davantage que l’insistance du président français, Emmanuel Macron, à réconforter « l’immense joueur » des Bleus.

L’équipe de France de Kylian Mbappé

Dans une finale où Antoine Griezmann n’a pas vu le jour et où les autres cadres n’ont jamais semblé en mesure d’inverser la tendance, Kylian Mbappé a prouvé que son leadership en équipe de France se conjugue au présent et au futur. « Ce match, c’était un peu un passage de témoin entre une génération qui arrive dans la dernière phase de sa carrière et une nouvelle génération, avec en tête Kylian, qui a montré un fort leadership sur ce tournoi et encore plus dans cette finale », a reconnu le capitaine français, Hugo Lloris, après la partie. Les tirs au but venus, le numéro 10 des Bleus a pris ses responsabilités et s’est présenté en premier face à Emiliano Martinez. Son troisième penalty – réussi – de la soirée. Meneur d’hommes, c’est aussi lui qui, le premier, est allé réconforter l’infortuné Kingsley Coman après le tir manqué de celui-ci.

 

Là où Lionel Messi savait que cette Coupe du monde au Qatar était sa dernière danse, Mbappé reviendra. Doté – peut-être – d’une nouvelle aura, agrémentée de la sympathie accordée aux perdants méritants. Car il faut du tragique pour donner du relief à une histoire.

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Source : Le Monde

 

 

 

 

 

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