Sommet de la Ligue arabe : le réveil de la diplomatie algérienne

Alors que s’ouvre mardi le sommet de la Ligue arabe à Alger, plusieurs défections, dont celle du roi Mohammed VI, menacent le succès de ce rendez-vous crucial.

– C’est la première fois depuis trois ans que les membres de la Ligue arabe se réunissent. La dernière fois que l’organisation avait tenu réunion, c’était à Tunis en mars 2019. Le sommet qui se tient à Alger les 1er et 2 novembre avait été reporté du fait de la pandémie de Covid. Il a lieu, aujourd’hui, dans un contexte jugé favorable pour le pays hôte – avec la crise du gaz, l’Algérie est plus courtisée que jamais – et le président algérien Abdelmadjid Tebboune s’efforce de redonner de la visibilité à son pays sur la scène diplomatique internationale.

Il n’y a qu’à observer le soin porté aux préparatifs, que ce soit sur le plan des réunions préparatoires entre ministres arabes des Affaires étrangères, ou avec les nombreuses places et artères de la ville agrémentées pour l’occasion. Et cela commence par les drapeaux des 22 pays de la Ligue arabe qui flottent désormais côte à côte sur le front de mer et les grands boulevards de la capitale.

Voilà pour le décorum, car, en coulisses, les dirigeants arabes se réunissent sur fond de divisions persistantes sur les conflits qui agitent la région, notamment la Syrie et la Libye, et le rapprochement entre certains États avec Israël. En effet, plusieurs membres de ce bloc, qui a historiquement placé le soutien à la cause palestinienne et la condamnation d’Israël en tête de son agenda, ont opéré un rapprochement spectaculaire avec l’État hébreu.

Un contexte de divisions

 

Les Émirats arabes unis ont ainsi normalisé leurs relations avec Israël en 2020 dans le cadre d’une série d’accords, dits d’Abraham, négociés par Washington. Bahreïn, le Maroc et le Soudan leur ont emboîté le pas. Ce rapprochement est d’autant plus significatif dans le contexte du sommet que son hôte algérien est un farouche soutien des Palestiniens. Alger a parrainé à la mi-octobre un accord de réconciliation entre factions palestiniennes rivales, même si les chances de le voir se concrétiser sur le terrain paraissent faibles.

La coopération sécuritaire nouée par le voisin marocain avec Israël après la normalisation de leurs relations a exacerbé les tensions entre les deux frères ennemis du Maghreb, déjà vives en raison de profonds désaccords sur le Sahara occidental, ayant conduit à la rupture de leurs relations diplomatiques en août 2021, à l’initiative d’Alger.

Un exercice d’équilibriste pour Alger

 

Si le conflit israélo-palestinien et la situation en Syrie, en Libye et au Yémen figurent bel et bien à l’ordre du jour du sommet, les dirigeants arabes et leurs collaborateurs devront se livrer à de véritables acrobaties diplomatiques dans la formulation des résolutions finales – adoptées à l’unanimité – pour éviter de froisser tel ou tel poids lourd de l’organisation. « Le sommet devra adresser un message de soutien aux Palestiniens, leur garantissant qu’ils ne seront pas les sacrifiés des accords d’Abraham », a dit à l’AFP Hasni Abidi, directeur du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam) à Genève.

L’Algérie a placé ce sommet, le 31e de l’organisation panarabe, sous le signe du « rassemblement », mais plusieurs pays, notamment du Golfe, n’y seront pas représentés par leurs chefs d’État. Ainsi le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, dirigeant de facto du royaume, ne se rendra pas à Alger, officiellement en raison d’un problème d’oreille. Selon la presse arabe, les dirigeants des Émirats et de Bahreïn seront également absents.

« Les États arabes ayant normalisé avec Israël ne sont pas enthousiasmés à l’idée d’un concert condamnant leur attitude. La volonté du président (algérien) Abdelmadjid Tebboune de placer la question palestinienne au centre des discussions d’Alger et ses déclarations précédentes ne les rassurent pas », souligne l’expert.

 

L’attitude du Maroc décisive ?

 

Ce lundi, c’est une autre défection de taille qui semble se confirmer : celle du roi du Maroc, Mohammed VI, auquel une invitation officielle signée par le président Tebboune avait été remise à Rabat le 27 septembre dernier. L’information aurait été transmise par le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, au secrétaire général de la Ligue Arabe, selon le magazine Jeune Afrique, qui confirmait il y a quelques semaines la venue du souverain chérifien.

Dans tous les cas, l’enjeu est d’autant plus significatif que les relations entre les deux poids lourds du Maghreb sont au plus bas. L’Algérie a rompu ses liens diplomatiques avec le Maroc en août 2021, accusant Rabat d’« actes hostiles ». Une décision qualifiée de « complètement injustifiée » par Rabat. En juillet dernier, Mohammed VI a réitéré une main tendue à l’Algérie, en aspirant « à œuvrer avec la présidence algérienne pour que le Maroc et l’Algérie puissent travailler main dans la main à l’établissement de relations normales entre les deux pays ». Mais tout dégel de la situation achoppe sur la question du territoire disputé du Sahara occidental. Le statut de cette ex-colonie espagnole oppose depuis les années 1970 le Maroc aux indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus activement par Alger.

Rabat, qui contrôle près de 80 % de ce territoire, en a fait sa cause nationale et prône un plan d’autonomie sous sa souveraineté pour régler le conflit, tandis que le Polisario réclame un référendum d’autodétermination sous l’égide de l’ONU. Ce week-end, le ministre marocain des Affaires étrangères Nasser Bourita a fait le déplacement à Alger pour préparer le sommet. C’est la première visite d’un officiel marocain en Algérie depuis la brouille diplomatique entre les deux voisins.

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