Les risques de la parole publique / Par Tijane BAL

La paix civile, la cohésion nationale, la sécurité des personnes et des biens devraient figurer en bonne place au répertoire des priorités de tout pays

Kassataya – «Un homme, ça s’empêche» aurait dit Albert Camus. Un homme politique, «ça» devrait donc s’empêcher encore un peu plus.

L’on ne peut certes raisonnablement escompter du débat public la pureté ou la perfection. Ne serait-ce que parce qu’il est le fait d’êtres humains. Il lui suffit d’éviter d’être par trop déraisonnable. «Etre raisonnable, c’est, paraît-il, savoir jusqu’où on peut aller trop loin». Reste à savoir qui borne le champ. Chacun pour soi-même de préférence. Tous idéalement en vertu d’un socle de valeurs partagées. Nul besoin d’être grand clerc pour identifier ces principes. Du moins les plus importants.

La paix civile, la cohésion nationale, la sécurité des personnes et des biens devraient figurer en bonne place au répertoire des priorités de tout pays. La vie humaine par-dessus et avant tout. Toute personne publique se doit d’éviter par ses propos et son comportement d’agiter le spectre de la confrontation et de lui aplanir le terrain. La haine est, on le sait, toujours précédée de discours de haine qui préparent sa conversion en actes. Surtout chez les plus influençables et les plus vulnérables.

 «Rien ne vaut une de vos vies» dit un jour l’ancien président nigérian Goodluck Jonathan. Le propos était d’autant plus admirable qu’il suivait l’annonce récente des résultats d’un scrutin présidentiel perdu. Par ces mots, le ci-devant médiateur de la CEDEAO au Mali, ne concédait pas seulement sa défaite. Ce qui n’était déjà pas peu. Il allait au-delà et entendait oeuvrer à la paix civile en conjurant le désastre propre aux contentieux postélectoraux.

Dès lors, la manière dont Jonathan avait gouverné devenait secondaire. Probablement l’avait-il fait à la manière de la moyenne de ses collègues du continent. Mais les mots prononcés au crépuscule de son pouvoir ont définitivement placé le président nigérian sortant au-dessus de la moyenne. Ils sont à la fois un message et une leçon. Ils disent que la volonté de conquérir le pouvoir ou de le conserver doivent trouver leurs limites. Le risque d’un péril collectif, de la mise en cause de la vie des siens devraient tout naturellement figurer au premier chef au nombre de ces limites.

 

 

 

Tijane BAL pour Kassataya.com

 

 

 

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