Mauritanie : le règlement du passif humanitaire, une ligne rouge de la gouvernance militaire

L’idée de la réconciliation nationale après le génocide des négro-africains de la vallée en 89 sous le régime de Ould Taya et l’assassinat de 28 soldats en 91 à Inal, est bien ignorée par les régimes successifs depuis 2005, exceptée la présidence de feu SIDIOCA, premier président mauritanien élu démocratiquement.

L’obstination du président Ould Ghazouani à garder le silence sur le passif humanitaire, fait de lui, un président autoritaire et sourd à la cohabitation. Une image bien réelle de tous les successeurs du génocidaire Ould Taya depuis 2005. Du feu colonel Ely Ould Mohammed Vall à Ould Ghazouani, excepté, le premier président élu démocratiquement feu SIDIOCA. Historiquement c’est le premier passage démocratique d’un militaire à un civil qui a eu le courage d’initier la réconciliation nationale avec le retour des réfugiés au Sénégal. 20 000 seulement sur plus de 60000 déportés en 89 qui sont rentrés.

Malheureusement en 2008 le général Ould Aziz reprenait par la force le pouvoir avant d’être élu en 2009.  Deux quinquennats qui ont permis au président Ould Abel Aziz d’arrêter le processus de rapatriement des réfugiés au Sénégal avant de tourner définitivement le dos au règlement du passif humanitaire en décrivant les évènements de 89 comme causes de « l’ignorance et la barbarie de l’homme » en avril 2009 à Kaédi pour présenter les excuses de l’Etat contre les crimes commis par Ould Taya contre la communauté négro-africaine.

Le président qui s’est autoproclamé président de tous les mauritaniens va initier le génocide biométrique qui va faire des réfugiés du Sénégal des apatrides et des étrangers chez eux. Faute d’état civil,les enfants ne vont plus à l’école. Et aujourd’hui des milliers de négro-africains ne sont pas des citoyens parce qu’ils ne peuvent pas voter.  Cette faiblesse congénitale de la gouvernance militaire ne date pas d’aujourd’hui. Ould Cheikh Ghazouani est un digne héritier d’une alternance militaire qui ne veut pas franchir la ligne rouge de peur de perdre le pouvoir. Secret de polichinelle. Les exactions contre 28 soldats négro-africains issus de la vallée, se sont passées au sein de l’armée qui apparaît comme la solution pour faire taire à jamais ces crimes du passé.

Derrière cette tutelle de la grande muette, se cachent des dynamiques de tribus qui se sont accaparées le pouvoir depuis le premier coup d’Etat militaire en 78. Et ce sont les mêmes groupes qui se sont passés le relais au palais de Nouakchott depuis 84 entre les Smassid tribus de Ould Taya et les tribus alliées les Awlad Busba de Ould Aziz et ould Vall.

Cette configuration de la gouvernance militaire fait que depuis 2005 c’est l’opposition négro-africaine sous la houlette de l’AJD-MR et les FPC et le mouvement citoyen TPMN, les collectifs des veuves et orphelins et militaires victimes des événements de 89 qui sont plus mobilisés autour de la question du règlement du passif humanitaire que les pouvoirs précédents  limitent assez souvent à de simples réparations . Les mobilisations des mouvements négro-africains à Nouakchott contre l’impunité sont considérées par le pouvoir comme subversives et contre l’unité nationale.

Cette emprise de l’armée sur la vie politique en dit long de la difficulté d’alternance démocratique et du règlement du passif humanitaire bien ignoré par le programme quinquennal de Ould Ghazouani.

 

 

 

 

 

Cherif Kane

Coordinateur journaliste

 

 

 

 

 

(Reçu à Kassataya.com le 14 juin  2021)

 

 

 

 

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