L’inefficacité de la stratégie de la lutte contre les jihadistes, la diminution des bases militaires et la responsabilisation des dirigeants sahéliens. Un nouveau cap pour la force conjointe, un sentiment des maliens contre la Françafrique et une porte ouverte à la Chine, la Russie et la Turquie en embuscade. Ce sont les principaux enseignements du retrait de Barkhane retenus par les observateurs.
L’annonce du désengagement des forces Barkhane au Sahel en marge du sommet du G7 n’est pas bien accueilli par l’opinion publique africaine qui qualifie cette décision prématurée et sans consultation avec les chefs d’Etat du G5 Sahel avec lesquels il s’est engagé pour lutter contre le terrorisme islamiste depuis 2014. Le silence sur le G5 Sahel est significatif à cet égard. Ce retrait est considéré comme un aveu d’échec de la présence militaire française au Sahel malgré les moyens colossaux humains et matériels consacrés pour la lutte contre le terrorisme.
C’est le premier enseignement. Les chiffres sont éloquents. Un million d’euros par an, 5100 soldats, 7 avions de chasse, 20 hélicoptères de combat et 3 drones sans compter les véhicules blindés et véhicules légers pour la logistique. Face à cette armada sophistiquée, la société civile et l’opposition malienne ne comprennent pas qu’elle soit inefficace contre les jihadistes depuis presque 8 ans.
Ce sentiment d’impuissance a fait naître depuis quelques années un sentiment anti-français qui a conduit au sommet du G5 Sahel de Pau, premier tournant tendu des relations entre Paris et Bamako. Sans aucun doute les deux coups d’Etat militaires à moins d’une année constituent une goutte de trop avant de servir de prétexte pour Paris pour retirer ses troupes de Barkhane d’une part et d’autre part de diminuer une partie de ses bases militaires au Sahel. C’est le deuxième enseignement qui force les chefs d’Etat africain du G5 Sahel à prendre leur destin en main.
Un nouveau cap indispensable pour montrer à la France qu’ils peuvent compter sur l’UA et la CEDEAO pour de nouvelles forces africaines sur le terrain pour accompagner la coalition des forces européennes ou TABUKA et la MINUSMA. Il s’agira également de préparer la relève des officiers africains avec la formation au collège de défense de Nouakchott dont la première promotion est sortie en octobre 2018.
Enfin pour le nouveau président de la transition démocratique au Mali, ce retrait militaire n’est pas sans conséquences sur l’autonomisation des soldats et la sécurité aux frontières Nord où les jihadistes sont maîtres du terrain. Une nouvelle situation sans les forces françaises qui ouvre un grand boulevard aux barbus et en même temps la possibilité au nouvel homme fort le colonel Goïta de faire appel à d’autres puissances militaires comme la Russie, la Chine ou la Turquie pour faire face au terrorisme islamiste. C’est le quatrième enseignement qui a des limites pour Bamako pour ne pas perdre un vieil ami depuis 60 ans.
Cherif Kane
Coordinateur journaliste
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