France – Un centre musulman à Rennes cible de tags racistes

Les murs du centre culturel musulman Avicenne ont été recouverts d’inscriptions racistes et islamophobes, dans la nuit de samedi à dimanche.

Sur les murs blancs du bâtiment, souillés, une dizaine d’inscriptions en bleu, blanc, noir, pour autant de slogans racistes et islamophobes. Entre des fleurs de lys et des croix chrétiennes, on peut lire : « Non à l’islamisation », « Mahomet prophète pédophile », « Les croisades reprendront », « Catholicisme religion d’Etat » ou encore « Charles Martel sauve-nous ». Voilà le désolant tableau qu’offrait le centre culturel et cultuel islamique Avicenne de Rennes, dimanche 11 avril au matin, quand, peu avant 6 heures, le gardien du site s’est rendu sur place. Les premiers fidèles ont découvert les dégradations dans la foulée, à deux jours du ramadan.

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Face à cette « atteinte symbolique grave », le procureur de Rennes, Philippe Astruc, a annoncé dimanche l’ouverture d’une enquête, confiée à la sûreté départementale de Rennes, pour « dégradations à raison de l’appartenance à une religion ». Le parquet ajoute que, « comme il l’avait fait pour la tentative de destruction par incendie de la cathédrale de Rennes en juin 2020, [il] portera une attention toute particulière à l’enquête tendant à identifier et sanctionner le ou les auteurs de ces faits », qui encourent quatre ans de prison et 30 000 euros d’amende.

« Un acte ignoble et lâche »

 

Le président du centre Avicenne, Ahmed Aït Chikh, a dénoncé auprès des médias « un acte ignoble et lâche. On ne comprend pas cette haine. Avicenne est un lieu culturel, d’ouverture. Nous sommes partisans du dialogue et nous poursuivons notre mission citoyenne ».

Créé en 1986, le centre culturel et cultuel islamique Avicenne, situé dans le nord-ouest de la ville, avait certes connu un épisode similaire en 2008, avec l’inscription d’une croix gammée. Mais, depuis ses débuts, l’institution s’est bien intégrée, sans problème majeur, dans le paysage rennais, rappelle Mohamed Ben Hassel, cancérologue et ancien président du centre. « Ce qui choque dans ce qui est arrivé, estime-t-il, c’est que ce n’est pas du tout l’esprit de la ville, ni celui de la région. Il y a une atmosphère de tolérance, le centre culturel Avicenne a trouvé ses repères à Rennes, les extrêmes sont très minoritaires. »

Des élus municipaux sont d’ailleurs membres du conseil d’administration du centre, dont les murs appartiennent à la ville. Pour illustrer la volonté d’ouverture du centre, M. Ben Hassel se souvient de « l’opération portes ouvertes, après les attentats de janvier [2015], qui avaient réuni 2 000 personnes, quasiment que des non-musulmans ».

Si le président du conseil régional du culte musulman, Mohamed Zaidouni, a appelé à l’unité face à ces « obscénités », l’indignation a franchi les frontières de la région. « Les nombreuses inscriptions anti-musulmanes sur les murs de la mosquée Avicennes [sic] de Rennes sont inacceptables, a tweeté le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, avant de se rendre sur place dimanche en fin de journée. Toute ma solidarité avec les musulmans de notre pays. »

« Climat anti-musulman »

 

Sur place, après avoir rencontré les responsables du centre, M. Darmanin a ajouté que « tout lieu de culte, tout lieu d’inspiration religieuse est le bienvenu dans notre pays et nous devons la protection à nos concitoyens musulmans comme nous le devons à nos concitoyens chrétiens ou juifs. A deux jours du mois de ramadan, je veux dire à nos concitoyens musulmans que consigne a été donnée vendredi aux préfets de particulièrement les protéger en cette période de fête religieuse ».

Ces derniers jours ont été marqués par plusieurs actes visant les musulmans. A Nantes, dans la nuit du jeudi 8 au vendredi 9 avril, la porte d’une mosquée à Nantes a été incendiée – une enquête est en cours. Vendredi, un homme a été mis en examen pour avoir menacé de s’en prendre à la mosquée du Mans.

« Il y a actuellement un climat anti-musulman en France que nous dénonçons avec force, a réagi auprès de l’Agence France-Presse Abdallah Zekri, président de l’Observatoire national de lutte contre l’islamophobie, après les dégradations observées à Rennes. Malheureusement, les déclarations de certains hommes politiques ne font qu’attiser ce climat. »

 

Sur les murs du centre culturel Avicenne, s’étale une autre inscription : « EELV = traîtres ». Une allusion, probablement, à la subvention accordée par la mairie Verte de Strasbourg pour la construction de la mosquée Eyyub Sultan. Une décision combattue en mars par M. Darmanin, estimant que ce projet était mené par une fédération qui « défend un islam politique », en l’occurrence Milli Görüs, proche du pouvoir turc.

 

 

Yann Bouchez

 

 

Source : Le Monde

 

 

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