Le déni des maladies mentales en Afrique

En guise de soins, les malades mentaux vivent enchaînés et enfermés, oubliés de tous.

Les malades mentaux sont peut-être les personnes les plus stigmatisées d’Afrique. L’ignorance, la peur, les croyances en des forces surnaturelles et enfin le manque d’argent mettent ces malades au ban de la société. La plupart du temps, ils sont placés à l’écart, au mieux dans des établissements spécialisés, au pire dans de véritables mouroirs. L’enfermement et l’enchaînement sont la règle, méthodes sordides pour se protéger d’eux et les protéger d’eux-mêmes.

« En Afrique de l’Ouest, ces gens sont encore souvent considérés comme possédés du démon ou ensorcelés. L’entourage se tient à distance devant des comportements inexpliqués, abandonnant ou marginalisant ceux qui ont en fait besoin de soins », explique sur son site internet l’Association Saint Camille de Lellis. En 25 ans, celle-ci a soigné 60 000 personnes, hommes et femmes, sans aucune aide financière. Elle œuvre en Côte d’Ivoire, au Bénin au Burkina Faso et au Togo.

Un secteur ignoré

 

Globalement, le secteur de la santé mentale est le parent pauvre dans toute l’Afrique. Moins de 20% de la population, selon l’OMS, ont accès à des soins de santé mentale. Il n’y a qu’un seul hôpital psychiatrique au Togo. Et que dire du Nigeria, qui ne compte que 250 psychiatres pour 200 millions d’habitants.

Human Rights Watch avait déjà alerté sur la situation des malades au Ghana, cette fois, l’ONG a mené l’enquête durant un an au Nigeria. 28 établissements ont été visités, 49 victimes interrogées. Force est de constater que la psychiatrie est dans le même état dans les deux pays.

Selon l’OMS, le nombre de personnes souffrant de troubles mentaux au Nigeria se situe entre 40 et 60 millions. « Le recours à la détention, à l’enchaînement et à la violence est répandu dans les hôpitaux d’Etat, les centres de réadaptation, les centres de guérison traditionnels et les établissements religieux », explique l’ONG. Le placement des personnes dans ces centres se fait sans leur consentement, que les troubles mentaux soient réels ou supposés. Depuis l’enquête de HRW, les fermetures de ce type de centres se succèdent au Nigeria.

Dans les camps de réfugiés

 

L’ONG Médecins sans Frontières travaille sur la santé mentale, considérant que, notamment en Afrique, les besoins de soins sont nombreux en raison des conflits et des déplacements de population qu’ils provoquent. Mais MSF se heurte à un obstacle de taille, « le manque de données, de services et de sensibilisation, autour des questions de santé mentale ». Enfants et adolescents, premières victimes et avenir du continent, sont le cœur de cible des médecins.

MSF a notamment travaillé dans le camp de réfugiés de Yumbe dans le nord de l’Ouganda, l’un des plus grands camps de réfugiés d’Afrique. « Cette population déjà vulnérable a en effet connu plusieurs crises et déplacements et est particulièrement sensible au stress et troubles mentaux », explique l’ONG. 80% des 50 000 réfugiés du camp souffrent de traumatismes. Pour la quasi-totalité d’entre eux, l’attaque de leur village (au Soudan du Sud) justifie leur fuite.

Or, les réponses apportées localement sont insuffisantes, notamment en raison du manque de professionnels qualifiés. Nul ne sait que feront les personnes malades quand elles seront livrées à elles-mêmes.

Jacques Deveaux

Rédaction Afrique France Télévisions
Source : France Info

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