Le gouvernement propose la restriction des aides médicales pour les demandeurs d’asile et des quotas d’immigrants par métier.
Frapper les esprits, pour adresser un message électoral, à six mois des municipales de mars 2020: difficile d’échapper à cette impression au vu des mesures sur l’immigration que le gouvernement français devait annoncer ce mercredi.
Le problème central, on le sait, est en France la non-application des mesures de renvoi des migrants illégaux dans le pays européen de première arrivée, ou dans leur pays d’origine: environ 15 000 expulsions par an, pour environ 125 000 dépôts de demandes d’asile en 2018. Mais face à l’impossibilité technique, juridique et politique d’accroître ce ratio, c’est sur un autre terrain que le gouvernement a décidé d’attaquer.
Frustration face aux soins accordés sans contrepartie
Son projet, que doit dévoiler ce mercredi le premier ministre, Edouard Philippe, prévoit de restreindre, au moins symboliquement, l’accès des migrants – demandeurs d’asile ou non – à l’aide médicale. Trois mois de carence seront désormais imposés, avant que ceux-ci ne puissent bénéficier de la protection universelle maladie (PUMa) qui, en France, garantit à tout citoyen l’accès aux soins, sans exigence de ressources. Des mesures doivent aussi être annoncées pour limiter le type de prestations médicales accessibles aux migrants dans le cadre de la PUMa.
Le calendrier de ces annonces ne doit rien au hasard. Les maires de France, qu’Emmanuel Macron s’est mis à consulter beaucoup plus souvent depuis la crise des «gilets jaunes», font tous remonter vers l’exécutif la même frustration de leurs administrés devant les soins accordés sans contrepartie aucune aux migrants et aux demandeurs d’asile. Lesquels perçoivent une allocation de «subsistance» de 6,80 euros par jour. Le président français craint donc que le Rassemblement national (RN), dont le maillage local est de plus en plus dense, surfe sur ce thème lors du scrutin.
Plusieurs axes de travail
Emmanuel Macron avait, fin septembre, appelé les parlementaires de la majorité à «regarder en face» la question de l’immigration, estimant, loin des caméras et des micros, que «la gauche a abandonné le sujet pendant des années […], que les bourgeois n’ont pas de problèmes avec les migrants car ils ne les croisent pas, alors que les classes populaires vivent avec».
L’Assemblée nationale avait débattu de l’immigration le 7 octobre dernier. Le premier ministre avait alors évoqué plusieurs axes de travail: rôle de l’aide au développement comme «levier» de la politique migratoire, refonte de l’espace Schengen imposant une solidarité aux pays membres en matière d’accueil, convergence européenne des règles d’asile conditions d’accueil» des demandeurs d’asile, augmentation des éloignements contraints et réduction de la durée d’examen des demandes d’asile.
Des quotas par métier et par territoire
Pour éviter de s’aliéner l’électorat de gauche modérée et du centre, et pour marquer sa différence avec la patronne du RN, Marine Le Pen, qu’il considère comme sa principale adversaire pour la prochaine présidentielle, le chef de l’Etat veut en revanche réhabiliter l’idée d’une migration économique choisie, comme l’avait fait avant lui un certain… Nicolas Sarkozy.
Des quotas par métier et par territoire pourraient donc être rendus publics pour les ressortissants hors Union européenne et hors espace Schengen (dont la Suisse est membre). Un débat parlementaire aurait lieu chaque année pour les fixer. Avec une question: comment faire pour que ces professionnels diplômés, munis de visas de travail dans l’espace Schengen, restent sédentarisés sur les territoires français en besoin de main-d’œuvre?
Richard Werly
Source : Le Temps (Suisse)
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