Mauritanie : Ould Ghazouani face à une opposition à trois visages

Le leader de la coalition VE qui regroupe ( le MPR, l’AJD-MR, les FPC, le PLEJ, ARC EN CIEL et le FP)  est toujours dans l’expectative après l’invitation la semaine dernière du candidat Ould Boubacar dans le cadre de la normalisation des relations de Ould Ghazouani avec l’opposition. En attendant et dans la perspective d’un dialogue inclusif Ould Ghazouani fait face à l’opposition démocratique sous la houlette du FNDU, l’opposition dialoguiste symbolisée par l’APP et El Wiam et enfin l’opposition qui se réclame anti-système sous la coalition VE.

Ce n’est pas une vue de l’esprit de dire que l’absence d’une invitation du président mauritanien au moins d’un leader de la coalition VE serait une grave erreur politique une entorse à la démocratie et à l’unité nationale et à la cohésion sociale. Et ce refus signifierait la poursuite de la diabolisation des forces patriotiques afro-mauritaniennes. Ce scénario n’est pas envisageable dans un contexte de normalisation des relations du pouvoir avec l’opposition après 11 ans de rupture.

Pour la première fois depuis 2009 un chef d’Etat tend la main à ses opposants, ouvrant ainsi des perspectives de dialogue politique pour apaiser la situation surtout après des semaines de crise post-électorale aigüe. Un satisfecit à Ould Ghazouani qui fait face maintenant à une opposition à trois visages. D’abord l’opposition démocratique sous la houlette aujourd’hui du FNDU qui regroupe depuis 2014 près de 11 tendances dont des partis politiques, centrales syndicales, organisations de la société civile et personnalités indépendantes. La faiblesse de cette défiance vis-à-vis du pouvoir remonte aux accords de Dakar de 2008 signés par les deux principaux partis de l’opposition l’UFP et le RFD et qui ont permis à Ould Aziz de régner pendant 10 ans. Une décennie de rupture avec une opposition sous la houlette d’une coordination avant le regroupement autour du Forum. Mais les différents boycotts en 2013 et 2014 ont pénalisé les partis.

Par contre l’émergence du parti islamiste TAWASSOUL a permis aux différents leaders de relever la tête face à un pouvoir qui va gérer sa propre opposition celle dite dialoguiste pour faire passer toutes les réformes dont les plus importantes la suppression du Sénat pour les conseils régionaux et le changement de symboles nationaux ( drapeau et hymne). Les piliers de cette opposition sont représentés par Messaoud Ould Boulkheir leader historique de l’Alliance populaire progressiste (APP)) président du conseil économique et social avant d’être au perchoir de l’assemblée nationale de 2007 à 2014.Et le leader du parti El WIAM Bodiel Ould Houmeid ancien baron du PRDS sous Ould Taya il a occupé des postes importants sous Aziz avant de fusionner son parti avec l’UPR pour devenir aujourd’hui le vice-président de l’assemblée nationale.

Cette opposition crypto-esclavagiste crée de toute pièce par les différents régimes pour tromper la vigilance des organisations des droits de l’homme nationales et internationales ne fait pas peur au nouveau président. Enfin la coalition VE qui regroupe le MPR, l’AJD-MR, les FPC, PLEJ, ARC EN CIEL et le FP, a fait son apparition sur le paysage politique lors des dernières présidentielles. Une bonne campagne et des résultats qui avoisinent plus de 8 pour cent, font désormais de leurs leaders des acteurs de poids incontournables sur la scène nationale.

En réalité Ould Ghazouani devra affronter deux oppositions. Les dialoguistes appartenant de fait à la majorité. La défiance de l’opposition est toujours envers le système électoral. La CENI commission électorale indépendante est inféodée au pouvoir ayant fait étalage de ses carences dans toutes les élections depuis 2009. L’élection de Ould Ghazouani ne fait pas exception à la règle. Un autre point concernant l’avenir du pays c’est l’unité nationale réclamée par tout le monde. C’est une question très sensible pour les mauritaniens et la plus difficile à résoudre par l’armée au pouvoir parce qu’elle touche le talon d’Achille de tous les locataires du palais de Nouakchott depuis 78.

Autrement dit la réconciliation nationale qui passe par le règlement du passif humanitaire qui découle des 100000 déportés noirs au Sénégal et au Mali en 89 et l’assassinat par l’armée de 28 soldats noirs en 91 sous le régime de Ould Taya. C’est la principale question nationale qui demandera du temps mais avant tout une volonté politique pour guérir les blessures. La normalisation de ses relations avec l’opposition est un premier pas vers le dialogue mais avec quelle opposition ? Seule l’avenir nous le dira. En attendant les observateurs osent espérer que l’opposition afro-mauritanienne ne sera pas zappée au premier round.

Cherif Kane

Coordinateur journaliste

(Reçu à Kassataya le 07 octobre 2019)

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