Mauritanie : Ould Ghazouani reconduit la politique étrangère arabe de Ould Aziz

En reconduisant Ismael Ould Cheikh à la tête de la diplomatie mauritanienne, le nouveau président poursuit la politique arabe de son prédécesseur qui relègue au second plan l’Afrique subsaharienne à laquelle appartient la Mauritanie.

C’est incontestable le gouvernement de Ould Cheikh Sidya est le prolongement de fait du régime de Ould Aziz. Une vérité de La Palice confirmée par le nouveau porte-parole du gouvernement dès sa première sortie médiatique commentant cette fin de semaine les travaux du conseil des ministres. La reconduction de Ismael Ould Cheikh à la tête de la diplomatie mauritanienne s’inscrit dans cette démarche.

Une diplomatie tournée vers les pays arabes en particulier l’Arabie saoudite le cœur de cette politique, les Emirats Arabes Unis, le Koweit et le Qatar. Ould Aziz a tissé une toile à travers ces pays susmentionnés au cours de ses 10 années au pouvoir engrangeant ainsi des milliards d’ouguiya pour lui-même et le reste pour des investissements dans l’agro- business alimentaire, le commerce et les banques, des mosquées et les infrastructures routières et la santé.

Le ministre des affaires étrangères est particulièrement un ami des saoudiens. Ismael Ould Cheikh a largement contribué à développer l’axe Nouakchott-Ryad au point que la Mauritanie est chouchoutée par le prince Ben Salman. Ould Aziz n’a pas manqué l’occasion de rendre l’ascenseur au souverain saoudien dans l’affaire Khashoggi en le recevant à Nouakchott alors que les autres pays arabes et du Maghreb étaient réticents. Si les relations mauritaniennes avec le monde arabe sont au beau fixe il n’en demeure pas moins quant à l’image de Ould Aziz comme en témoigne d’abord l’échec du sommet arabe à Nouakchott en 2017 avec l’absence de beaucoup de princes et rois et ensuite aucune présence d’un président arabe ou souverain lors de l’investiture de Ould Ghazouani le 1er août dernier à Nouakchott alors que l’Afrique a fait le plein avec 11 chefs d’Etat.

C’est la traduction que la Mauritanie est avant tout un pays africain. Très tôt ses dirigeants se sont coupés de ce cordon ombilical en quête d’une légitimité arabe avec l’adhésion à la ligue arabe en 73. La langue arabe devient ainsi un instrument de domination de la classe politique arabo-berbère sur toutes les autres composantes nationales. Adieu CEAO, CEDEAO, ASCNA etc…. Seule l’OMVS ( Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal) qui regroupe outre la Mauritanie , le Sénégal et el Mali intéresse les autorités de Nouakchott pour des raisons mauritano-mauritaniennes relatives à l’accaparement des terres de la vallée. Et depuis Nouakchott s’est tournée résolument vers le Maghreb et le Moyen-Orient.

Avec Ould Taya cette politique arabe est couplée sur le plan intérieur par une «  dénègrification » du pays avec les déportations de plus de 100000 noirs au Sénégal et au Mali  en 89 et depuis 2009 avec Ould Aziz par un génocide biométrique qui empêche aujourd’hui à des milliers d’afro-mauritaniens d’être des citoyens. Et malheureusement le nouveau président Ould Ghazouani apparaît ainsi comme un homme d’Etat mal préparé à cette fonction pour changer de gouvernail. Qu’on le veuille ou non la Mauritanie est un trait d’union entre le monde arabe et africain. Toute autre géopolitique qui nie l’africanité du pays porte atteinte à la diversité culturelle de la Mauritanie. Jouer sur les deux scènes est la seule chance pour tout locataire du palais de Nouakchott de trouver un équilibre durable.

Cherif Kane

Coordinateur journaliste

(Reçu à Kassataya le 17  août 2019)

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