Face à la xénophobie qui gagne du terrain en Europe comme aux États-Unis, ce chroniqueur du Financial Times suggère un code de bonne conduite à observer au travail… et ailleurs.
Le plus désolant dans les propos de Donald Trump lorsqu’il suggère à quatre parlementaires américaines de “retourner de là où elles viennent”, c’est que les États-Unis ont toujours été un pays où vos origines ne devaient plus avoir aucune importance une fois que vous aviez la nationalité américaine. Vous pouviez vous appeler Schwarzenegger, Kissinger ou Brzezinski, à partir du moment où vous étiez citoyen américain, vous étiez américain et vous pouviez vivre ici, vous plaindre ou occuper de hautes fonctions au même titre que n’importe quel autre citoyen (à l’exception de la présidence). Et si vous étiez né aux États-Unis – comme c’est le cas pour trois de ces quatre femmes –, personne n’aurait songé à remettre en question vos droits.
Pour tous ceux qui admirent l’histoire des États-Unis, les commentaires de Donald Trump ont donc semblé profondément contraires à l’esprit américain. Une majorité de citoyens le pensent : selon un sondage réalisé par USA Today et Ipsos, 59 % des personnes interrogées estiment que les propos du président étaient contraires à l’esprit américain et 65 % les jugent racistes. Sauf parmi les républicains : 57 % d’entre eux se disent d’accord avec Donald Trump et un tiers approuve fermement ses propos.
Cesser de demander aux gens d’où ils viennent
Il ne fait pas bon avoir des origines étrangères dans les États-Unis d’aujourd’hui. L’hostilité envers les immigrés monte également en Europe. Alors quelle conduite devraient adopter tous ceux qui rejettent cette nouvelle tendance dans la rue, au bar et surtout au travail où, plus que n’importe où ailleurs, nous sommes amenés à côtoyer des gens qui ne nous ressemblent pas ?
Vous pouvez commencer par arrêter de demander aux gens d’où ils viennent. Et s’ils répondent Birmingham, que ce soit en Angleterre ou dans l’Alabama, merci de ne pas insister avec : “Non mais vraiment, vous avez des origines ?”
On peut aussi arrêter de demander innocemment : “Est-ce que j’entends un accent ?” (La réponse étant : “Oui, certainement. Tout le monde a un accent, vous compris.”) Et s’abstenir de demander : “D’où vient votre nom ?”
Non pas que les réponses à ces questions soient dépourvues d’intérêt. En tant que passionné des migrations, des langues et des dialectes, je suis fasciné par ces questions. Il faut simplement les poser plus tard, une fois que vous vous êtes assuré que votre interlocuteur souhaite les aborder.
Une simple question de courtoisie et de respect
Vous vous dites peut-être que tout cela ne vaut que dans un monde rempli de petites choses fragiles qui considèrent la moindre remarque comme une micro-aggression et que vous ne le prenez jamais mal lorsque des gens vous posent ce genre de questions. Auquel cas, j’imagine que vous avez un nom, un accent et des racines remontant à plusieurs générations dans l’endroit où vous vivez. La plupart des gens qui ne sont pas dans ce cas savent néanmoins de quoi je parle.
Le fait d’interroger les gens sur leurs origines ou leur accent pose problème à deux niveaux. Primo, c’est une façon de souligner qu’ils sont différents et qu’ils n’ont peut-être pas leur place ici. Ce n’est peut-être pas votre intention mais c’est ce que bon nombre pourront ressentir – surtout à notre époque.
“Mais vous avez bien des origines ?” est une question particulièrement pernicieuse. C’est une façon de dire : oui, j’entends bien que vous dites que vous êtes né ici, mais je vois bien – à cause de votre nom ou de votre couleur de peau – que vos parents ou grands-parents ne sont pas d’ici. Une façon de sous-entendre que vous non plus n’êtes pas vraiment d’ici.
L’autre raison pour laquelle il est impoli de poser ces questions est qu’elles montrent que n’êtes pas concentré. Au lieu d’écouter ce que dit votre interlocuteur, vous vous focalisez sur quelque chose d’autre : sa couleur de peau, son nom ou son accent. Vous portez votre attention sur des signes extérieurs plutôt que sur l’objet de votre conversation – le travail ou la tâche que vous êtes en train de faire tous les deux.
Votre curiosité sera satisfaite en temps et en heure. Cette personne finira par vous parler de ses vacances passées chez des oncles, tantes ou cousins. Elle parlera de son accent, d’où il vient et depuis combien de temps elle vit là où vous vous trouvez maintenant.
De grâce, ne vous exclamez pas : ‘Et vous n’avez toujours pas perdu votre accent ? !’ Les accents sont acquis durant l’enfance et ne peuvent être modifiés – et non perdus – qu’au prix de nombreux efforts. Ce genre de commentaire est également une façon de dire que votre accent est le bon et que votre interlocuteur est dans l’erreur.”
Si la personne aborde le sujet de ses origines, vous pouvez lui poser des questions jusqu’à ce que sentiez qu’elle ne souhaite pas vous en dire davantage.
Cela n’a rien à voir avec du politiquement correct, ce n’est qu’une question de courtoisie. Au bureau, c’est également une question de collectif et de respect pour vos collègues et le travail qu’ils font.
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