Les proches de l’universitaire guinéen tué en France sont sous le choc

Dans la soirée du vendredi 19 juillet, Mamoudou Barry a été sauvagement agressé, sous les yeux de sa femme, près de Rouen. Cet universitaire guinéen de 31 ans succombera finalement à ses blessures le lendemain à l’hôpital. Contactés par RFI, ses proches affirment qu’il s’agit d’une agression à caractère raciste, ce que ne confirment pas les enquêteurs à ce stade. Ce lundi 22 juillet, un suspect a été interpellé d’après une source policière citée par l’Agence France-Presse.

« Personne ne s’attendait à cette disparition brutale et sauvage, je n’arrive pas encore à réaliser qu’il est parti. » Avec un profond désarroi, Lamine Kaba accuse le coup. Après avoir rencontré Mamoudou Barry en 2012 à la faculté de droit, au sein de l’association des étudiants guinéens de Rouen, c’est aujourd’hui un ami intime de la famille.

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« Chaque année on se donnait rendez-vous pour la fin du ramadan, soit chez lui soit chez moi. Je connais sa mère, il connaissait ma mère », se souvient Lamine Kaba. Alerté dans la nuit, il a passé la journée de samedi à l’hôpital, là où son camarade a été conduit en urgence avant de finalement succomber à ses blessures.

Des propos racistes tenus par un agresseur toujours recherché

Sur place, l’épouse de Mamoudou Barry, témoin direct des évènements lui raconte la scène. Une attaque selon elle très violente, sur fond de racisme. « En effet, elle nous a dit ce qu’elle a dit à la police quand les enquêteurs sont passés à l’hôpital samedi matin, ce que l’agresseur de son mari a prononcé. C’était des propos racistes, je le confirme », explique Lamine Kaba.

Une version des faits que l’épouse de la victime a également rapportée à Aly Therian, président de l’association des Guinéens de Normandie. « Monsieur Barry était parti chercher sa femme à l’arrêt de bus juste derrière son immeuble, car elle portait des courses trop lourdes pour elles, raconte-t-il. Une fois dans la voiture, une personne qui était là l’insulte en disant « sale noir » ». L’universitaire guinéen sort alors de son véhicule « pour raisonner l’individu », mais c’est une pluie de coups qui l’attend, puis la mort. « On est tous effondrés, il n’y a même pas de mot parce que c’est un gâchis complet, à la fois pour le peuple guinéen et pour la France », conclut Aly Therian.

Lundi 22 juillet dans la matinée, un suspect a été interpellé à Rouen. Il aurait des antécédents psychiatriques.

Une grande perte pour la communauté scientifique

Contacté par RFI, le professeur Adam Abdou Hassan ne tarit pas d’éloges non plus : « Mamoudou était une personne très humble, très droite et une personne qui avait un avenir très prometteur devant lui ». Les deux hommes étaient amis et collègues, au sein du centre universitaire rouennais d’études juridiques, mais également au sein de l’institut de recherches sur la paix en Afrique, « Thinking Africa ».

Ironie du sort, Mamoudou Barry venait juste d’achever ses études, c’est le 27 juin dernier qu’il a soutenu sa thèse sur les « politiques fiscales et douanières en matière d’investissements étrangers en Afrique francophone ». Un titre de Docteur décroché avec brio, comme le salue Adam Abdou Hassan : « Depuis le 25 mai 2016, dans les Universités françaises, les mentions concernant les thèses de doctorat ont été supprimées. Par contre, à l’unanimité du jury, donc exceptionnellement, il a été décidé d’accorder à Mamoudou Barry la mention « très honorable », avec les félicitations du jury ».

À en croire son collègue, ledit jury aurait même précisé qu’il était l’un des seuls, si ce n’est « le spécialiste incontournable dans son domaine ». Le jeune docteur avait en effet concentré ses recherches sur « le cas du secteur des ressources naturelles extractives », autrement dit sur le secteur minier. L’université de Rouen-Normandie a elle aussi réagi dans un communiqué signé de son président Joël Alexandre. Il salue un homme « débordant de projets [qui], par son travail, forçait l’admiration de ses collègues et des étudiants ».

Appel à la vigilance sur les informations des réseaux sociaux

Pour autant, quelle que soit l’onde de choc provoquée par la nouvelle, les proches de Mamoudou Barry regrettent une forme de désinformation et de récupération autour de cette affaire. Si l’agression a bien eu lieu le soir de la finale de la CAN de football entre Sénégal et Algérie, aucun élément ne permet à ce stade de déterminer la nationalité de l’agresseur.

« On veut informer toute la communauté africaine, guinéenne et autres, de ne pas faire d’amalgame », alerte Aly Therian. « Vous savez », poursuit-il, « en France, on récupère facilement les évènements. C’est pourquoi on a fait un communiqué avec la famille et l’association des Guinéens de Normandie, pour que les gens fassent attention aux informations diffusées aujourd’hui au niveau des réseaux sociaux ».

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L’ami intime de la famille Barry, Lamine Kaba abonde en ce sens, « il faut vraiment que les gens ne se perdent pas, à l’heure actuelle, on ne connait toujours pas la nationalité de cet individu. Tout ce qu’on sait, c’est qu’il a la peau basanée ». C’est le parquet de Rouen qui est saisi du dossier. « Les investigations sont en cours. Les auditions et vérifications devraient permettre de préciser le déroulement des faits » a déclaré le procureur Pascal Prache. Et cela tombe bien, car pour l’entourage de l’universitaire guinéen, c’est désormais à la justice française de faire la lumière complète sur cette affaire.

 

 

Sébastien Duhamel

 

 

Source : RFI

 

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