Mohamed Ould Maouloud : « S’ils aimaient la Mauritanie, Ghazouani et Aziz devraient s’excuser et se retirer »

La campagne pour l’élection présidentielle de samedi est entrée dans sa dernière ligne droite en Mauritanie. Et l’opposant Mohamed Ould Maouloud, soutenu par Ahmed Ould Daddah, une autre grande figure de l’opposition, entend bien barrer la route à Mohamed Ould Ghazouani, dauphin désigné par Mohamed Ould Abdelaziz.

 

Ce 19 juin, Mohamed Ould Maouloud, 66 ans, retrouve enfin sa résidence de Nouakchott, après une tournée qui l’a conduit dans toutes les wilayas (régions) du pays. Il partage avec ses proches collaborateurs un déjeuner – poulet et dattes – dans la tradition mauritanienne, installé sur un grand tapis.

En dépit des longues heures passées sur les routes, il ne consent à afficher aucun signe de fatigue. « Je suis en forme pour le match final ! », assure le patron de l’Union des forces de progrès (UFP), cofondateur de l’ex-parti des Kahidines de Mauritanie (PKM, composé d’étudiants maoïstes), qui vit sa deuxième campagne présidentielle.

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En 2007, il s’était incliné avec 4,08% des voix devant Sidi Ould Cheikh Abdallahi. Cette fois, grâce au soutien d’une autre grande figure de l’opposition, Ahmed Ould Daddah, il compte peser sur le scrutin de samedi voire, barrer la route à Mohamed Ould Ghazouani, le candidat du pouvoir.

 

Jeune Afrique : Comment comptez-vous provoquer un second tour ?

Mohamed Ould Maouloud :  Un constat s’impose à tous ceux qui ont parcouru la Mauritanie : le pouvoir actuel, et par conséquent son candidat, est totalement rejeté par l’opinion publique. Même dans l’Est, considéré comme le fief de Ghazouani. J’en arrive même à penser que, si les élections se déroulent normalement, il va être très difficile pour lui d’aller au deuxième tour.

Dans le cas contraire, soutiendrez-vous le candidat de l’opposition ?

J’ai grand espoir d’être moi-même présent au second tour. Je ne représente pas les milieux d’affaires, mais les milieux populaires. Je suis le seul candidat porteur du projet de l’opposition démocratique, de l’unité nationale et du changement voulu par les jeunes. Si ces derniers s’expriment en ma faveur, cela fera très nettement pencher la balance.

Dans le cas contraire, nous avons convenu, au niveau des partis d’opposition, que celui qui passe au second tour sera soutenu par tous les autres. Pour les indépendants, nous sommes prêts à faire la même chose.

C’est Ahmed Ould Daddah qui m’a convaincu de me présenter

Pourquoi avez-vous échoué à fédérer toute l’opposition derrière votre candidature ?

Les partis ont échoué parce que leurs intérêts sont différents. Certains ont préféré soutenir un candidat hors de nos rangs, comme Sidi Mohamed Ould Boubacar. C’est leur décision. D’autres ont même rallié celui du pouvoir. Mais le choix de mes alliés de l’opposition démocratique s’est porté sur moi. Elle se serait sentie orpheline si je ne m’étais pas présenté. J’ai été poussé par tout le monde.

Pourtant, le soutien d’Ahmed Ould Daddah était loin d’être acquis…

C’est absolument faux. C’est lui qui m’a convaincu de me présenter.


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Regrettez-vous le boycott des législatives de 2013 et de la présidentielle de 2014, qui vous a marginalisé sur la scène politique ?

Lorsqu’on boycotte, on perd et c’est toujours douloureux. Le boycott des municipales a créé une rupture avec les populations, qui n’ont pas compris notre décision. Nous voulions imposer une révision des règles du jeu, mais le dialogue qui a suivi a été détourné par le président.

Cette révision, liée à l’enjeu stratégique de la présidentielle de 2019, s’est donc faite sans nous. C’était tactique, mais ça n’a pas marché.

La différence entre ce pouvoir militaire et moi, c’est la vision : il n’en a pas et ne cherche pas à en avoir

Si vous êtes élu, que ferez-vous différemment de Mohamed Ould Abdelaziz ?

Tout. La différence c’est la sincérité et l’esprit de responsabilité. D’abord, il faut établir des priorités, telles que la lutte contre la pauvreté, l’accès à l’eau, la jeunesse, la santé, l’éducation, l’élimination des obstacles à la cohésion nationale, l’abattement des barrières de castes ou encore l’éradication de l’esclavage. La différence entre ce pouvoir militaire et moi, c’est la vision : il n’en a pas et ne cherche pas à en avoir.

Accepterez-vous de dialoguer avec Mohamed Ould Ghazouani s’il est élu ?

La question est prématurée. Ghazouani ne doit pas accéder au pouvoir, car il était au pouvoir. En 2008, en duo avec le président, il a été à l’origine du coup d’État contre la première expérience démocratique. S’ils aimaient leurs pays, tous deux devraient s’excuser et se retirer.

Justine Spiegel

Envoyée spéciale à Nouakchott

 

 

Source : Jeune Afrique

 

 

 

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