Post-scriptum : Mauritanie : Après le « Je m’engage !» d’Ould El Ghazwani, veiller au grain

Qu’on le veuille ou non, le discours du candidat à la présidentielle de 2019 en Mauritanie marque une rupture dans la dynamique à laquelle le président sortant Mohamed Ould Abdel Aziz a jusque là habitué les mauritaniens. Contre ce qui ressemble à un déni volontaire du mérite des pères fondateurs, Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed  Ould El Ghazwani oppose une réhabilitation de tous ceux qui ont gouverné la Mauritanie depuis que ce pays a vu le jour sous une tente…

 

« Pour ma part, je ne dirai pas, et ne saurais dire, que tous ceux qui ont gouverné le pays avait totalement failli, car si tel était le cas, nous n’aurions pas eu une nation dotée de tous les attributs d’un Etat. » A dit celui qui a toujours été, depuis 2005, fidèle à un Mohamed Ould Abdel Aziz virulent dans le discours et fougueux dans le comportement. C’est à croire que depuis qu’ils ont renversé ensemble le Président Sidi Mohamed  Ould Chaikh Abdallahi, le Général Ould Ghazwani a observé silencieusement, dans une relative passivité,  son compagnon « déconstruire les choses » en faisant fi des principes les plus élémentaires de la démocratie qui veut que ces choses fassent objet d’appréciations et non d’instructions et d’ordres à exécuter.

 

Suppression d’un sénat rebelle, rasage de son siège,  modification par forcing de la constitution, changement contre toute volonté populaire réelle de symboles nationaux tels que l’hymne et le drapeau, sans compter l’imposition d’autres mesures qui ont lésé des citoyens dans leur identité et dans d’autres droits, tant de choses ont marqué le règne d’Ould Abdel Aziz jusqu’au jour où une sorte de « y en a marre de tes manières ! » est survenue avec le blocage d’une initiative somme toute indécente pour un 3e mandat.

 

Il faut soupçonner qu’après la démonstration de force que Mohamed Ould Abdel Aziz a faite avec ses foules de marcheurs contre la haine un certain 9 janvier, la tentative d’un groupe de députés de faire passer une révision en faveur du lever du verrou de la limitation des mandats a buté sur un « NIET » catégorique du chef d’Etat Major Général des Armées devenu Ministre de la défense, par ailleurs pressenti comme héritier du pouvoir.

 

Qui sait si  Ould El Ghazwani le taciturne a pu rappeler à la raison son compagnon qui devenait l’otage de politiciens charognards avides de pouvoir et prêts à le pousser au  pêché pour qu’il les garde à ses côtés ?

 

Autant  on a pu nous faire croire qu’ Ould Abdel Aziz avait mis un frein à la fameuse histoire du “vote blanc” qu’avait voulu inspirer aux mauritaniens  le regretté Ely Ould Mohamed Vall, alors Président du Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie dirigeant le pays après le putsch de 2005, autant nous sommes en droit de nous demander si à quelques mois cruciaux d’une présidentielle décisive le chef de l’Etat n’a pas été exposé à des pressions plutôt dissuasives…

 

« Je m’engage, et l’engagement chez moi a un sens…”

N’est-ce pas Ould El Ghazwani qui, à en croire certaines confidences,  aurait refusé de confisquer le pouvoir au lendemain de la fameuse « balle amie » suite à laquelle l’opposition  et même une grande partie des partisans du pouvoir avaient cru que c’en était fini du règne de son compagnon  Ould Abdel Aziz ?

 

A ceux qui le font passer pour un ami fidèle qui se garda bien de répondre à une certaine injonction « pourquoi pas vous !», Ould El Ghazwani a-t-il voulu rappeler dans son discours que l’engagement est un principe sacré ?

 

« Je m’engage, et l’engagement chez moi a un sens, à mettre à profit en toute sincérité, sérieux et dévouement, tout ce dont ALLAH m’a comblé en terme d’éducation, de formation, d’expérience et de connaissance profonde des rouages de l’Etat, afin de traiter les dysfonctionnements et combler les insuffisances quels qu’ils soient, afin de réaliser notre ambition légitime de bâtir une société moderne, forte de ses valeurs islamiques et de ses traditions séculaires, garantissant à tout citoyen  son droit à la liberté, l’égalité, le bien-être pour ne parler que des grands axes, laissant les détails au moment approprié… » 

 

Parler en des termes si solidement construits, c’est certes envoyer un message fort aux mauritaniens. C’est donner un signal. A ceux qui  le reçoivent de décider si ce signal est fort ou non, suffisamment persuasif ou pas…

 

les victimes doivent pouvoir s’exprimer en toute tranquillité et avoir la garantie enfin d’être « dédommagés »

Traiter les dysfonctionnements, combler les insuffisances quels qu’ils soient. Voilà qui devrait pousser à prendre au mot le presque futur président  de la République Islamique de Mauritanie qui, en dehors de l’impétueux  Biram Dah Abeid, n’a pas encore trouvé d’autre prétendant sérieux.

 

Lire aussi:  Version en français du Discours du candidat Mohamed Cheikh Ould Mohamed Ahmed O. El Ghazwani

 

Prendre au mot Ould El Ghazwani et le talonner dans un marquage à la…veste et à la cravate, une alternative pour toute la classe politique, pour les intellectuels, pour les activistes de la société civile, bref pour tous les mauritaniens qui ont le souci de revoir les pendules à l’heure et les choses remises sur les rails. Seulement avec une opposition à laquelle on ne saurait concéder de n’avoir pas senti l’imposition d’un autre militaire comme futur garant de l’avenir de la Mauritanie, il est très difficile de croire à une bonne santé démocratique d’un pays comme la Mauritanie qui est devenu sournoisement un univers d’injustices sur plusieurs plans…Des injustices dont les victimes doivent pouvoir s’exprimer en toute tranquillité et avoir la garantie enfin d’être « dédommagés » et rétablis dans leurs droit. Et la première victime des injustices en Mauritanie est la justice. Pour la Mauritanie, il faut surtout veiller au grain.

 

 

 K-Tocka

 

 

Source : Initiatives News

 

 

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