Oscars : avec « Black Panther » et « BlackKKKlansman, la diversité gagne ses lauriers à Hollywood

Les deux films, dont les héros et les réalisateurs sont noirs, sont en lice pour l’Oscar du meilleur film. Un nouveau visage d’Hollywood et le fruit d’une longue lutte.

Ce dimanche 24 février, à Los Angeles, juste avant la cérémonie des Oscars, une équipe de film foulera le tapis rouge du Dolby Theater, sur Hollywood Boulevard, et, au même moment, entrera dans l’Histoire. Et ce quel que soit le palmarès. Car cette 91e édition est la première du genre à voir concourir à l’Oscar du meilleur film un long-métrage consacré à un super-héros, noir qui plus est, Black Panther, également nommé dans six autres catégories. Le réalisateur, Ryan Coogler, sera accompagné de ses têtes d’affiche, Chadwick Boseman, Michael B. Jordan et Lupita Nyong’o, ainsi que du rappeur Kendrick Lamar, qui a produit la bande originale.

Outre Black Panther, BlacKKKlansman concourt également dans la catégorie meilleur film. Il vaut aussi à Spike Lee sa première nomination à l’Oscar du meilleur réalisateur. Dans les autres catégories, l’acteur Mahershala Ali (Green Book, de Peter Farrelly) et la comédienne Regina King (Si Beale Street pouvait parler, de Barry Jenkins) figurent parmi les favoris pour les statuettes du meilleur second rôle. La cérémonie servira-t-elle de plateforme à un Hollywood noir, comme elle l’a fait en 2017 et en 2018 avec Moonlight, de Barry Jenkins, et Get Out, de Jordan Peele, respectivement Oscar du meilleur film et Oscar du meilleur scénario original ? Ou bien est-ce l’inverse ? « Si Black Panther n’a pas besoin des Oscars pour valider sa place dans l’Histoire, les Oscars ont peut-être besoin de Black Panther », lisait-on, fin novembre, sur le site spécialisé IndieWire.

L’institution a, en effet, mauvaise presse. En janvier 2016, pour la deuxième année d’affilée, circulait sur Twitter le hashtag #oscarssowhite, critiquant l’absence de comédiens de couleur dans les catégories meilleur acteur et meilleure actrice. Derrière ce phénomène devenu viral en quelques heures, une avocate, April Reign. La vague d’indignation qui s’ensuit – amplement relayée par les grands médias nationaux, les réseaux sociaux et une poignée de stars qui appellent au boycott de la cérémonie (les acteurs Jada Pinkett et Will Smith, la chanteuse Anohni, les réalisateurs Spike Lee, Ava DuVernay et Ryan Coogler) – pousse l’Academy of Motion Picture Arts and Sciences (Ampas) à prendre un engagement inédit : doubler le nombre de personnes de couleur et de femmes parmi ses membres d’ici à 2020 – en 2016, sur près de 8 000 membres, 89 % étaient blancs, et 73 % étaient des hommes. L’an passé, 928 personnes avaient ainsi été invitées dans le cortège des votants, dont 48 % de femmes et 38 % de non-Blancs. De quoi rééquilibrer les choses.

En décembre, l’Académie a été prise dans une autre tempête. L’humoriste Kevin Hart, choisi comme maître de cérémonie, était remercié après la mise à l’index de Tweet et propos homophobes datant de 2010. Sans compter la polémique qui a suivi la décision de remettre quatre prix pendant la publicité pour raccourcir la durée du programme : sous la pression de grands noms du cinéma (Martin Scorsese, Meryl Streep, George Clooney…), l’Ampas, organisatrice de la soirée, a fait machine arrière. Autant de mauvaises nouvelles pour un événement dont les audiences dégringolent depuis quelques années. Or, l’Académie tire une part substantielle de son budget annuel des droits de retransmission de la soirée sur la chaîne ABC.

La longue campagne de l’« Awards Season »

 

La question de savoir si Black Panther sera sacré meilleur film, et si Kevin Feige, patron (blanc) des studios Marvel, partira avec la statuette, sera donc résolue ce 24 février. Elle représentera l’issue d’une bataille qui agite Hollywood depuis plusieurs mois. En amont de la soirée des Oscars, et de son principal concurrent, les Golden Globes, remis début janvier, la « Awards Season » court chaque année de novembre à février.

Dès l’automne, Los Angeles vit au rythme des pronostics et des cérémonies au cours desquelles des associations récompensent leurs films préférés : syndicat des acteurs (SAG Awards), des réalisateurs (DGA), des producteurs (PGA), des scénaristes (WGA), prix du public (People’s Choice Awards), des critiques étrangers (Golden Globes), des critiques américains (National Society of Film Critics)… Au total, une vingtaine de grand-messes retransmises à la télévision sur les principales chaînes nationales ou du câble depuis les plus grandes salles de spectacle de la ville. Auxquelles s’ajoutent des récompenses plus militantes, ancrées autour d’une minorité : ces dernières connaissent aujourd’hui un véritable succès et attirent les stars qui leur assureront l’attention des magazines et des réseaux sociaux.

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Clémentine Goldszal

 

Source : M Le Magazine du Monde  (Le 22 février 2019)

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