V. S. Naipaul, écrivain du monde

Personnage controversé, l’écrivain britannique d’origine indienne, prix Nobel de littérature en 2001, est mort samedi à l’âge de 85 ans.

Il était à la fois l’un des plus grands auteurs anglophones contemporains et sans doute l’un des plus controversés. Vidiadhar Surajprasad Naipauln plus connu sous le nom de V. S. Naipaul, est mort samedi à Londres à l’âge de 85 ans.

Voyageur infatigable, auteur d’une trentaine d’ouvrages mêlant fictions, essais ou observations, l’écrivain britannique d’origine indienne était avant tout le peintre du déracinement et des sociétés post-coloniales. À sa façon, qui allait à l’encontre des idées reçues.

Inclassable

 

Orgueilleux et irascible, inclassable politiquement et idéologiquement, pourfendeur de l’impérialisme comme du tiers-mondisme, de l’Occident et de l’Islam, il s’était attiré beaucoup d’inimitiés. Ce qui n’a pas empêché l’Académie suédoise de lui décerner le prix Nobel en 2001. Elle saluait alors une littérature « incorruptible », qui « nouscondamne à voir la présence de l’histoire refoulée ».

Son œuvre s’est d’abord bâtie sur une blessure. Né en 1932 dans les Antilles britanniques, dans une famille d’immigrés indiens de sept enfants, V. S. Naipaul a étudié la littérature à Oxford comme élève boursier avant de s’établir définitivement en Angleterre en 1953. « J’ai essayé de me frayer un chemin dans une Angleterre qui ne m’accordait aucune place et avait sa propre idée de ce qu’était l’écriture », explique-t-il alors.

Ses premiers romans, Le Masseur mystique, Le Suffrage d’Elvira, Miguel Street ou son livre le plus célèbre Une maison pour Monsieur Biswas, qui décrit la difficulté pour les immigrants indiens des Caraïbes de s’intégrer dans la société tout en conservant leurs racines, le propulse immédiatement au faîte des lettres britanniques.

 

Personnage sulfureux

 

Mais si la question des origines et de l’identité est au cœur de sa littérature, c’est pour mieux s’en détacher et rejeter toute appartenance. Au fil de ses voyages en Inde, en Afrique ou en Asie, il dressera un portrait sans concession des sociétés issues des anciens empires, incapables de s’affranchir de leur ancienne domination, avant de s’en prendre à l’Islam accusé de vouloir annihiler toute autre culture. Ses positions ­ultra-conservatrices comme certaines de ses déclarations machistes et homophobes en avaient fait dans son pays un personnage sulfureux.

Surnommé « l’effroyable Monsieur Naipaul » par le New-Yorker, il laisse une œuvre majeure « à la mesure de l’énormité de l’empire britannique », écrit Jean-François Fogel dans la préface à ses œuvres romanesques choisies (Bouquins, 2009).

Céline Rouden
Source : La Croix (France) – Le 12 août 2018

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