Ce départ annoncé mardi soir intervient au lendemain de vives critiques du plus haut responsable de l’institution contre la politique migratoire de «tolérance zéro» de Donald Trump.
Les États-Unis ont annoncé mardi soir leur départ du Conseil des droits de l’Homme (CDH) de l’ONU basé à Genève, qu’ils n’ont pas réussi à faire réformer et jugent partial envers Israël. L’annonce de ce départ, longtemps brandi comme menace, est intervenue vers 21 heures temps universel (23 heures à Paris) à Washington, lors d’une allocution de l’ambassadrice américaine à l’ONU, Nikki Haley, qui a n’a pas hésité à qualifié l’institution de «cloaque de partis pris politiques». «Nous prenons cette mesure parce que notre engagement ne nous permet pas de continuer à faire partie d’une organisation hypocrite et servant ses propres intérêts, qui fait des droits de l’homme un sujet de moquerie», a-t-elle déclaré.
«Ce faisant, je tiens à préciser très clairement que cette décision n’est pas un retrait de nos engagements pour les droits de l’Homme», a-t-elle dit aux côtés du secrétaire d’Etat Mike Pompeo. Haley a au passage accusé la Russie, la Chine, Cuba et l’Egypte d’avoir entravé les efforts américains pour réformer le Conseil des droits de l’Homme. Elle a également critiqué les pays partageant les mêmes valeurs que les Etats-Unis mais qui «n’ont pas voulu remettre sérieusement en cause le statu quo». «Regardez les membres du conseil et vous voyez un effroyable manque de respect pour les droits les plus fondamentaux», a dit Haley citant le Venezuela, la Chine, Cuba et la République démocratique du Congo. Cette arène «se focalise de manière excessive et entretient une hostilité sans fin à l’égard d’Israël» ce qui est, selon elle, «la preuve évidente que le conseil est animé par des intentions politiques et non par les droits de l’Homme».
Appels américains à une profonde réforme
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres «aurait préféré que les Etats-Unis restent au Conseil des droits de l’homme», a déclaré son porte-parole. Le CDH «joue un rôle très important dans la promotion et la protection des droits de l’Homme dans le monde», a ajouté Stéphane Dujarric dans un communiqué. Cette décision «va mettre le pays en marge des initiatives mondiales cruciales pour défendre les droits de l’Homme», a déploré l’organisation de défense des droits de l’Homme, Human Rights Watch, jugeant dans un communiqué que le CDH avait «joué un rôle important dans des pays comme la Corée du Nord, la Syrie, la Birmanie et le Soudan du Sud». «Mais Donald Trump n’est intéressé que par la défense d’Israël», a déploré l’ONG. «Étant donné l’état des droits de l’Homme dans le monde d’aujourd’hui, les États-unis devraient s’engager, pas se retirer», a déploré le patron de l’instance, Zeid Ra’ad Al Hussein.
La veille, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme avait vivement critiqué la politique américaine de séparation systématique des enfants de migrants de leurs parents à la frontière avec le Mexique. Une politique qualifiée d’«inadmissible» et «cruelle». «Penser qu’un État puisse chercher à dissuader des parents en infligeant de tels abus sur des enfants est inadmissible», avait affirmé Zeid Ra’ad Al Hussein, en ouvrant une session du Conseil des droits de l’homme à Genève. «J’appelle les États-Unis à stopper immédiatement la séparation forcée de ces enfants, et j’encourage le gouvernement à ratifier enfin la Convention sur les droits des enfants», avait-il ajouté. Les États-Unis sont le seul pays à ne pas avoir ratifié ce texte qui protège les droits fondamentaux des enfants.
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La critique de trop pour Washington? Voilà plus d’un an que les États-Unis menacent de quitter le Conseil des droits de l’homme de l’ONU. À la mi-2017, la représentante des États-Unis à l’ONU, Nikki Haley, avait appelé à une profonde réforme de l’organe principal du système onusien en matière de droits de l’homme, créé en 2006 pour remplacer la Commission du même nom. Depuis, une réforme est certes en cours mais davantage pour rationaliser le travail du Conseil que pour aborder des questions politiques.
Critiques sur la sélection des États membres
Les États-Unis, dont le mandat au Conseil s’achevait en principe en 2019, avaient notamment réclamé que l’exclusion des États membres qui commettent de graves violations des droits de l’homme soit votée à la majorité simple et non aux deux tiers. Ils avaient aussi demandé un renforcement du processus de sélection des États membres. Washington voulait aussi que la question des «droits de l’homme en Palestine» ne soit plus systématiquement mise à l’ordre du jour du CDH. Washington dénonce depuis toujours le fait qu’Israël est le seul pays au monde ayant un point fixe (appelé point 7) à l’ordre du jour de chaque session, soit trois fois par an.
Ce n’est pas la première fois que les États-Unis vont être absents de ce Conseil. Sous le républicain George W. Bush, ils avaient boycotté le CDH dès sa création, avant de le rejoindre sous l’administration du démocrate Barack Obama. Depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche début 2017, les États-Unis se sont retirés de l’Unesco, ont coupé plusieurs financements à des organes de l’ONU et annoncé leur retrait, entre autres, de l’Accord de Paris sur le climat et de l’accord nucléaire avec l’Iran endossé par les Nations unies.
Valérie Samson
Source : Le Figaro
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