Trump face à Merkel : la photo «icônique» du G7 fait débat

BERLIN – Une photographie pour l’histoire? Le cliché viral diffusé au G7, où Donald Trump semble tenir tête au reste du monde, résume à lui seul les nouvelles fractures occidentales, mais donne lieu à des interprétations assez diverses.

«L’Occident ébranlé», titre lundi le quotidien allemand Tagesspiegel, à côté de l’image désormais célèbre, prise par un photographe officiel travaillant pour le gouvernement allemand et diffusée sur les réseaux sociaux par le porte-parole de la chancelière Angela Merkel.

Cette photo, dont la composition rappelle celle d’un tableau, a été l’une des plus partagées, commentées ou détournées sur les réseaux sociaux, tant elle paraît résumer, mieux que tous les discours, l’état du monde après le fiasco du sommet des pays industrialisés au Canada.

Elle a été prise par un photographe allemand primé par le World Press Photo, Jesco Denzel, spécialisé dans les photos et portraits officiels.

Le porte-parole d’Angela Merkel, Steffen Seibert, a expliqué lundi que sa diffusion visait à donner aux internautes «un aperçu du travail de la chancelière et de l’atmosphère de travail intense d’un G7».

Elle paraît répondre à un objectif de communication encore plus précis: mettre en lumière la fermeté d’Angela Merkel, qu’on voit entourée d’autres dirigeants du G7. Appuyée en avant, les mains sur une table, elle semble tenir tête à Donald Trump, voire réprimander le chef d’État américain assis en face d’elle.

Que lui dit-elle? personne ne le sait. Dimanche soir à la télévision, Angela Merkel a juste prévenu qu’elle n’entendait pas «se faire avoir» au cas où les États-Unis relèveraient leurs droits de douane sur les importations d’automobiles, et que l’Europe répliquerait.

Pour l’hebdomadaire Der Spiegel, la photo constitue «une victoire sans appel de relations publiques pour l’Allemagne». «En politique, il n’y a pas que les contenus qui sont importants, les images le sont aussi», souligne-t-il.

1-0 pour le président américain?

Toutefois, les interprétations de la scène divergent et beaucoup voient plutôt Donald Trump sortir vainqueur de ce cliché.

«1-0 pour le président américain», estime sur Twitter Élisabeth Wehling, spécialiste de sciences politiques et de langage à l’université de Berkeley en Californie. Donald Trump «reste assis pendant que les autres personnes présentes sont debout», souligne-t-elle, une manière pour lui d’»affirmer sa propre autorité avec une diffusion mondiale».

Du reste, sur la photo, Donald Trump paraît ignorer Angela Merkel qui s’adresse à lui, semblant plutôt écouter le président français Emmanuel Macron ou la première ministre britannique Theresa May situés à la droite de la chancelière.

Pour l’entourage du milliardaire américain, l’image de Donald Trump impassible face aux Européens traduit surtout la fermeté du héraut de «l’Amérique d’abord».

«Encore un de ces  #G7 où les autres pays attendent que les États-Unis soient éternellement leur banquier. Le président leur dit clairement que c’est fini», a commenté sur Twitter John Bolton, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche.

Le sentiment qui prédomine en Allemagne, après ce G7 en forme de psychodrame, est celui de la fin d’une époque, d’une césure dans la relation transatlantique, paradigme sur lequel le pays s’était largement reconstruit après 1945.

Le chef de la diplomatie allemande, Heiko Maas, a estimé que Donald Trump, en retirant son soutien au communiqué final du sommet, a détruit «très rapidement une quantité incroyable de confiance» mutuelle.

Traditionnellement très atlantiste, Angela Merkel a parlé elle dimanche soir d’»un pas décisif» franchi par le président américain. L’Allemagne est tout particulièrement dans le collimateur de l’administration américaine, à la fois pour ses excédents commerciaux et pour ses dépenses militaires jugées trop faibles au sein de l’OTAN. Et la nouvelle donne oblige le pays à repenser son orientation stratégique.

La chancelière se rallie désormais de plus en plus à la vision macronnienne d’une Europe puissance et souveraine. Elle vient d’accepter l’idée d’une force d’intervention commune européenne et a appelé dimanche soir l’Europe à mieux défendre ses intérêts «au risque sinon de se faire écraser dans un monde où dominent des pôles très forts».

 

AFP
Agence France-Presse
Source : Le Soleil (Québec)

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