Mauritanie : la difficile cohabitation entre l’Etat et les tribus

L’apparence d’un Etat moderne avec des institutions démocratiques et une administration au service (sic) des collectivités tolérant parallèlement une gouvernance tribale au point d’empiéter le pouvoir local . Telles sont les deux facettes de l’Etat moderne mauritanien pratiquement depuis l’aube des indépendances. Depuis 2009, le régime de Ould Aziz semble aiguiser cette contradiction dont les conséquences sont graves pour la démocratie et pour la stabilité politique en Mauritanie.

Rassemblements fréquents de tribus à l’intérieur du pays.Intronisation d’un nouveau chef tribal ou autres cérémonies de réconciliation entre les tribus.Ces chefs de tribu qui font défont les hommes du président.Une tolérance zéro des autorités locales voire centrales qui ne surprend pas les observateurs avertis mais pour les étrangers cette cohabitation est anachronique avec l’existence d’un Etat moderne. Une réalité d’une autre époque bien ancrée dans la mentalité mauritanienne.

 

Ces deux facettes d’une même république ne semblent pas perturber les nouvelles autorités de Nouakchott convaincues que cette fibre tribale est la clé de leur réussite dans tous les domaines.Cette absence d’Etat remonte à la naissance même de la Mauritanie convoitée par le Maroc et le Sénégal qui revendiquaient le Nord et le Sud du pays. L’ancienne puissance colonisatrice très tôt confrontée à la dure réalité tribale avait compris l’enjeu avant de remettre rapidement le pouvoir entre les mains de l’avocat Mokhtar Ould Daddah. Ce dernier s’est bien appuyé sur sa tribu pour gouverner le pays.

 

 

La création d’un parti et toutes les autres formes d’organisation étatique pour lutter contre le tribalisme le régionalisme n’ont pas beaucoup servi à faire disparaître cette cohabitation.Au contraire elle est exacerbée avec l’avènement des militaires à partir de 78. Ce n’est pas l’ex Général Ould Aziz qui va démentir l’influence des tribus dans sa gouvernance. Plusieurs membres de sa tribu Oulad Bousbah ont les meilleurs postes dans l’administration .

 

 

Le secteur du pétrole est dominé par les tribus Idawali tandis que les mines sont accaparés par les Smassides de Ould Taya exilé au Qatar et dont la protection est assurée par le président mauritanien qui rejette toute plainte contre lui. Ainsi va la Mauritanie. Et cette forme de survivance du passé créé aujourd’hui un Etat sans droit au lieu de droit pour lutter efficacement contre l’esclavage et l’oppression des communautés dites minoritaires. Cette coexistence pacifique de deux mondes différents fait tort à la démocratie et à la cohésion sociale.

 

 

Bakala KANE

 

(Reçu à Kassataya le 13 mars 2018)

 

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