La victoire cachée de l’opposition et la nature de la bataille politique en cours..

Il est de bon ton de critiquer l’opposition en Mauritanie, pour justifier l’ambiance de morosité politique qui règne depuis la fin du référendum boycotté par elle et par une grande partie du peuple.

Certaines de ces critiques sont légitimes et justifiées, en particulier celles qui portent sur son absence de programme alternatif formel et sa tendance à la neurasthénie et aux actions routinières, s’il y a lieu. Mais beaucoup d’ autres sont injustifiées et sont même injustes, au regard de la réalité de son action et du travail colossal qu’ elle a abattu et qui a débouché sur la plus grande victoire qu’ elle ait obtenu depuis le Coup d’ État de 2008 et les Accords de règlement de la crise que sa lutte avait pu imposer à un HCE plus que récalcitrant, sous la houlette du Général Mohamed Ould Abdel Aziz ( Accords dits de Dakar).

Quelle victoire, me demandera t -on?
Celle du  » troisième mandat ».

Je m’ explique.

Il n’ était un secret pour personne, jusqu’ à la veille du dialogue non inclusif dernier, que l’ enjeu fondamental des manoeuvres du pouvoir c’ était d’ obtenir de la classe politique dans son ensemble si possible, ou d’ une partie d’ entre elle sinon, le plus large accord possible pour une révision de la constitution aboutissant, pour le moins, au changement du verrouillage absolu du nombre de mandats du Président. Même pour les supernaifs, il pendait comme un nez, que le lancement depuis le discours de Nema par le Chef de l’ Etat, de l’ idée de modifier la constitution pour supprimer le sénat , n’ était pour lui qu’ une simple opération destinée à à ouvrir une porte devant mener à la fin ultime du verrouillage du nombre des mandats. Pour cela, il devait garder seul la clé de cette porte, lui permettant jusqu’ au dernier moment, d’ imposer son ordre du jour dudit dialogue…et de passer à autre chose ensuite.

C’ est parce qu’ elle avait clairement compris ce danger de légitimation par elle, de cette manoeuvre, que le FNDU et le RFD et sûrement aussi l’ IRA et l’ AJD/MR, ont refusé de jouer ce jeu et ont boycotté les assises ( ce qui leur valut, bien avant le référendum subséquent, le feu de la gehenne critique de nombre de leurs amis- y compris ceux qui leur veulent sincèrement du bien!). Bref, l’ enjeu de la bataille politique du dialogue non inclusif était clair et net: ouvrir la voie au 3 eme mandat en faisant sauter les articles qui l’ interdisaient impérativement. Tout le reste des questions qui seront soumises au  » référendum » ( senat, drapeau, hymne) avaient une importance tellement insignifiante qu’ elles ne firent presque pas l’ objet de débats, à côté de sujets bien plus essentiels ( statut des langues, composition et fonctionnement des institutions de régulation démocratique, modalités électorales etc…).

Comment s’ est traduit la réalité de cet enjeu caché mais évident par lui même? Par la montée au créneau, dans ce sens, des 3 mousquetaires des batailles impossibles du pouvoir qui, par leur calamiteuse communication, ont révélé le pot aux roses avant et pendant le dialogue. Par les manoeuvres de couloir du Chef de l’ Etat lui même pour convaincre les uns et les autres de se convertir à ce culte du 3 eme mandat. Les Chefs de partis essentiels de l’ opposition participante ont dû clairement, soit directement par eux mêmes, soit par déclarations des plus hautes instances de leur parti, refuser catégoriquement toute tentative du régime de procéder à cette modification. Depuis plus d’un an ( qui s’ en souvient ?)la bataille du FNDU a consisté à dénoncer cette velléité du Président M. O Abel Aziz de s’éterniser au pouvoir, au delà de 2019. Que n’avait a t’ on pas accusé l’opposition dite radicale de tous les noms du diable et de ses cousins, pour cette précoce alerte ? Elle a mené bataille un an durant sur ce thème et elle a eu un echos déterminant de cette bataille par une position de principe identique à la sienne de la part de l’ autre opposition soeur participante : PAS DE 3 EME MANDAT pour qui ce soit!

A la fin du dialogue, le régime dut se rendre à l’ évidence: il avait perdu LA MERE DES BATAILLES, celle que préparait le Président Mohamed Ould Abdel Aziz, probablement dès qu’avait sèché l’ encre des Accords de Dakar.

Voilà pourquoi, ce qui a suivi le dialogue en question apparaît ex post facto comme des lots de consolation. Le sénat, le drapeau ou l’hymne, plus ( hors référendum) le changement facial et de valeur de l’ouguiya, tout cela maaw muhim, politiquement parlant ! Une importance d’ autant moins significative que, cerise sur le gâteau, ces lots furent gagnés sans aucune gloire : taux de participation microscopique, fraude massive, administration en bandes votantes, indifference generale etc…au vu et au su du monde entier.

En vérité, l’ opposition autant que l’opinion ne doivent pas se tromper de bataille. Celle du 3 ème mandat est FINIE et perdue par le pouvoir. Sauf, en bonne et due forme, un autre coup d’ État ! Les manoeuvres destinées à faire croire le contraire, à Boghé ou à Tichit, sont destinées à camoufler la nature de la bataille en cours: celle de la succession dont le Président voudrait s’ assurer seul la maîtrise totale pour choisir celui à qui il remettra les clés de la maison.

J’ y reviendrai.

 

Gourmo Abdoul Lo

Facebook – Le 12 décembre 2017

 

 

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