Les bilingues sont-ils protégés contre la superstition?

Une nouvelle étude confirme que penser dans une langue étrangère nous permettrait de penser mieux.

On savait les cerveaux des bilingues plus efficaces que les autres. Une nouvelle étude de psychologie expérimentale confirme que penser dans une langue étrangère peut s'avérer être un bouclier assez efficace contre beaucoup de biais cognitifs assez fâcheux pour notre compréhension du monde.

Selon le psychologue Constantinos Hadjichristidis, chercheur à l'université de Trente (Italie) et auteur principal de l'article, passer d'une langue à l'autre permettrait de court-circuiter notre pensée intuitive –le fameux «Système 1», notamment théorisé par le Prix Nobel d'économie Daniel Kahneman. Ce qui nous forcerait à utiliser nos capacités cognitives parmi les plus rationnelles. En l'espèce, le bilinguisme semble fonctionner comme un vaccin contre la superstition.

Une appréciation plus neutre dans la langue d'adoption

Dans une expérience, près de 400 germanophones natifs avec une très bonne maîtrise de l'anglais (qu'ils avaient commencé à apprendre vers 12 ans) devaient lire un texte en allemand ou en anglais. Des petites histoires qui décrivaient des moments souvent importants de la vie d'un individu (un examen ou un entretien d'embauche, chaque scénario présentant un élément perturbateur. Dans un cas, la chose était prosaïque (présence d'un évier bouché, d'un avion qui passe dans le ciel) et dans l'autre, susceptible de titiller la pensée magique en négatif (un miroir se brise) ou en positif (on voit une étoile filante).

En lisant en anglais, les cobayes n'allaient exprimer aucune différence d'appréciation de la perturbation prosaïque. Par contre, face à la «magique», les lecteurs allaient se montrer bien plus neutres qu'en allemand.

Charge émotionnelle dans la langue maternelle

Pourquoi? Parce que la superstition est fille de répétition. Par exemple, pour associer un miroir cassé avec «sept ans de malheur», il faut avoir souvent vu ou entendu des gens faire ce genre de corrélation irrationnelle. Quand l'imprégnation se fait lors de périodes critiques de notre développement cognitif –en gros, nos cinq premières années– et que l'association semble chargée émotionnellement (voir mémé qui panique lorsqu'on retourne le pain à table), l'ancrage est d'autant plus solide.

Ainsi, lorsque nous rencontrons un concept «symbolique» dans une langue qui n'est pas notre langue maternelle, nous appréhendons bien mieux son sens littéral que sa portée superstitieuse car notre esprit n'a pas «automatisé» sa charge émotionnelle.

 

Repéré par Peggy Sastre

Repéré sur The Quarterly Journal of Experimental Psychology, The British Psychological Society Research Digest

 

 

Source : Slate

 

 

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