Mauritanie : Maro Hadya Diagana, la self-made-woman qui défie les hommes

Si elle est « fille de », Maro Hadya Diagana est avant tout une self-made-woman. Fondatrice de Consulting et formation en entreprise, elle vient d’ouvrir un centre d’affaires à Nouakchott.

C’est qu’il n’est pas mal du tout ce Mauritanian Business Center (MBC). Simple, fonctionnel et au cœur de Nouakchott, à la fois centre d’affaires pour PME et incubateur de start-up, il offre bureaux et wifi aux jeunes entrepreneurs, salles de réunion ou de réceptions, mais aussi formations, coaching et même un petit restaurant pour ses membres. Aux commandes de ce complexe, Maro Hadya Diagana, 31 ans, débordante d’énergie, bien décidée à prouver qu’une femme peut être un chef d’entreprise de talent et à « défier les hommes » sur ce terrain.

Cette longue jeune femme, dont les voiles colorés semblent sortis d’un Sahara idéal, est à la fois « fille de » et self-made-woman. Son père, Hadya Kaou Diagana, est le fondateur de la première entreprise privée de Mauritanie (HKD, devenue Ciprochimie, spécialisée dans les pesticides agricoles et ménagers) – il avait commencé sa carrière en vendant des bouteilles qu’il remplissait de désinfectant. Maro est rebelle à tout embrigadement familial : résolue à devenir entrepreneuse, comme ses frères, mais sans rien devoir à son père.

Maro Hadya Diagana commence donc par travailler à l’Unicef pour économiser un petit capital, se forme à distance avec les Leaders pour l’Afrique de demain de Sciences-Po Paris et se dit qu’il existe bon nombre de diplômés certes très forts en théorie, mais sans bagage pratique et, donc, peu opérationnels. En 2012, la jeune femme crée Consulting et formation en entreprise, qui propose aux sociétés des formations en finance, en langues, en informatique et en gestion. Ce qui lui permet de tisser des partenariats au Maroc et au Sénégal.

Coacher les entreprises

« Nous avons vu venir des jeunes qui demandaient un appui pour la création de leur entreprise, raconte-t‑elle. Nous avons décidé d’accompagner les start-up innovantes et les PME en difficulté et, en 2015, nous avons lancé le premier centre d’affaires de Mauritanie. »

Avec sa dizaine de salariés et une centaine de consultants, l’entreprise assiste les porteurs de projets dans leurs démarches administratives comme dans la recherche de financement et conseille ses membres en difficulté. « Nous sommes aussi équipés pour organiser des événements, poursuit Maro Hadya Diagana. Par exemple, quand une ambassade souhaite organiser une rencontre entre des entrepreneurs mauritaniens et des investisseurs de son pays. »

Le MBC, ouvert en mars, redouble d’ambitions. « Notre objectif est d’aider plus de jeunes à créer leur propre emploi et d’épauler les PME mauritaniennes dans leur recherche de partenaires dans la sous-région », explique la jeune femme. Pourtant, les débuts n’ont pas été roses.

Des débuts difficiles

« Au début, les clients voulaient tout gratuitement », se souvient-elle. Il a fallu calculer un tarif pour ceux qui ne savent pas si leur idée va marcher et qui se contentent d’une domiciliation et d’un bureau partagé – 21 500 ouguiyas (50 euros) par mois –, un autre pour ceux qui souhaitent disposer en propre de locaux plus vastes – 110 000 ouguiyas.

Si Maro Hadya Diagana a d’abord refusé toute aide de son père, elle a accepté, mais uniquement une fois que son projet a été « sur les rails », qu’il mette un immeuble à sa disposition pour y installer ses bureaux. C’est peut-être en mémoire de ce père admiré – disparu en 2013 – qu’elle se soucie des difficultés de Ciprochimie-HKD, la société familiale. Les magouilles administratives, notamment, l’ont mise à mal, et elle cherche des partenaires afin de lui donner un nouveau départ.

De Paris à New York en passant par Dakar et Casablanca, Maro Hadya Diagana tisse sa toile. Son originalité ne réside pas tant dans cette activité débordante – les Mauritaniennes sont réputées pour leur indépendance vis-à-vis du père comme du mari et pour leur savoir-faire commercial – que dans le fait d’avoir innové en optant pour les domaines de la formation, du coaching et de l’événementiel. Un choix qui lui permet de se tenir au large des mines, de l’immobilier, des banques et de l’import-export, où les prédateurs pullulent, au détriment du pays.

 

Alain Faujas

 

 

Source : Jeune Afrique

 

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