Mohamed Lemine Shah et les autres

Je ne suis ni érudit, ni savant en théologie, ni un exégète, ni même un assidu de mes propres affaires religieuses.

Cependant je me permettrai ici de parler de cette nouvelle "Tarek Ramadanisation" de l'un de nos hommes de sciences religieuses. On pourrait penser que j'ai quelques affinités, quelque connaissance ou quelque proche parenté avec l'homme. Wallahi je ne le connais même pas, ni ne connais à quelle tribu ou à quel clan il appartient. Et si je m'exprime ici, c'est par pure plaidoyer de la vérité de Dieu.

Je l'ai vu souvent a la télévision, prêchant dans une mosquée modeste, avec comme auditoire une dizaine, ou une quinzaine de prieurs. Parfois beaucoup moins. Il souriait souvent mélancoliquement, souvent je croyais déceler une tristesse sur son visage. Son discours est agréable à entendre et ses références sentaient la véracité et l'évidence.

Ses paroles cependant me captivaient au premier regard. C'est peut-être pourquoi j'ai aimé suivre les conférences de cet homme auquel rien ne me liait, sauf la télévision.

L'homme bien qu'élégant était souvent auréolé d'un manteau de modestie, qui fait défaut à beaucoup de nos orateur. Il était toujours simple dans ses explication, mais attaché fortement aux textes. On ne pouvait jamais noter chez lui une quelconque allusion à l'obscurantisme ou à l'extrémisme religieux. En somme, il semblait tenir à s'effaçait volontairement, pour laisser aux paroles de Dieu l'espace vide, pour qu'elles soient les seules audibles.

Il y a quelques jours, je ne sais à quelle occasion, et par la piqure de quelle mouche de chez nous, il lançait une "Fatwa". Et qui te dirait ce que sont les fatwas au vingt unième siècle?

"La femme n'a pas besoin de "Wekil", tuteur ou mandataire, pour son mariage"

On dirait que les femmes d'aujourd'hui se soucient des stipulations ou se gênent des conditions pour se donner à qui elles veulent, quand elles veulent et de la façon qu'elles veulent.

Ou on dirait que nos pères, nos grands pères, les grands pères de nos grands pères et les aïeules de nos grands mères transgressaient les conditions du mariage, pour qu'en ces jours de libertinage généralisé, nous venions corriger leurs écarts.

Toutefois, cet homme a l'apparence aimable et au tempérament paisible, fut pris a parti sur le net par des foules déchainées d'internautes, qui n'ont épargné aucune forme d'insulte de mépris, de malédiction pour le détruire "religieusement" naturellement.

Ces tireurs d'élite, qui veulent se réserver le privilège de comprendre, d'interpréter ou de distribuer "la fatwatisation". Et qui se veulent, seuls guidés sur terre.

Cette gente souvent camouflées derrière un pseudonyme, et souvent ignorante des affaires de la religion, a oublié ou fait semblant d'oublier que l'envoyé (psl) a dit que "le croyant n'insulte pas, ne maudit pas"; que le croyant fuit les grivoiseries et refuse de faire passer entre sa glotte et son épiglotte les mauvais jugements, la parole impure et les termes grossier.

Je sais parfaitement que c'est une arme redoutable que de posséder cette dextérité confuse, opaque et machiavélique à soulever les foules quand on veut, comment on veut et pourquoi on veut. Ce n'est pas et ce ne sera jamais au nom de Dieu. Dieu est là. Il voit et entend. Il donne un délai, mais ne néglige jamais.

Il y a tellement de mauvaises choses dans la société qui ont priorité au gaspillage de l'encre. Si tous nos crimes et nos exactions étaient de l'or ou du pétrole, nous serions le peuple le plus riche sur terre.

Et puis et à propos n' ya t-il pas contradiction à affirmer que " La viande" des oulémas est "empoisonnée", et de se jeter dessus pour la dévorer avec une telle avidité ? N'y a-t-il pas un risque sérieux de se donner la mort?

N'y a-t-il pas contradiction entre aimer Dieu et son prophète et l'acharnement impitoyable à donner cette image de la religion de champ de bataille où on se déchire pour quelque chose de caché qui peut-être tout sauf un acte pieux et désintéressé pour l'autre monde ?

Quand Allah a dit :"    ومَنْ أَظْلَمُ مِمَّنْ مَنَعَ مَسَاجِدَ اللَّهِ أَنْ يُذْكَرَ فِيهَا اسْمُهُ وَسَعَى فِي خَرَابِهَا

Travailler à repousser les gens de la voie de Dieu, n'est-il pas inclus dans cette catégorie?

Exposer les images de Mohamed Lemine Chah, avec son épouse dans leur intimité, ne peut être l'œuvre d'un vrai croyant.

Vous avez oublié, ou faites semblant d'oublier que le prophète Mohamed ( psl ), debout sur une surélévation et criant avec une forte voix à l'intention des foules a dit : " O ! Vous qui avez embrassé l'islam, mais dont les cœurs n'ont pas encore été touchés par la foi, ne suivez ni ne divulguez la nudité d'un croyant, celui qui transgresse l'intimité de son frère, Allah dévoilera sa nudité et le couvrira de honte."

Pour cette fameuse Fatwa de Mohamed Lemine Chah, j'ai entendu le Cheikh, Mohamed El Hassen Dedew, et le grand Cheikh Ould Boye commenter le problème. Il n' ya pas de flagrante contradictions. Il y a ce qui est voulu, ce qui est souhaitable ce qui est obligatoire et ce qui est interdit. La référence est aux paroles d'Allah et non à celle des hommes.

Oum Souleym Bint Milhane (rad) a donné comme condition à son époux Malik ibn Nadir pour le mariage qu'il récite le coran. Elle est la mère de Enes ibn Malik. Elle est l'une des Sahabiyates agréées par l'envoyé (psl). Connaissez-vous une meilleure origine ? Et connaissez-vous un meilleur "Wakil" que les paroles du Créateur ?

Il y a divergence d'interprétations. Et cette divergence dans l'interprétation des quatre Imams de l'islam est une miséricorde et une bénédiction pour le fidele. Dans les rites hanéfite par exemple, la femme peut dire à l'homme: "Je me marie à toi" et le pacte est scellé.

Et une chose de taille qu'il ne faut jamais oublier, c'est qu'Allah ne veut pas compliquer la vie de ses créatures. .يريد الله بكم اليسر و لا يريد بكم العسر                               

"Allah veut vous faciliter l'accomplissement du culte et vous éviter la gêne"

"لا يُكَلِّفُ اللَّهُ نَفْسًا إِلا وُسْعَهَا" "Allah ne charge nulle âme au-delà de sa capacité"

Un croyant qui n'a appris qu'une ou deux sourates du coran, qui les comprend bien, l'interprète bien et les applique comme Dieu l'a ordonné, vaut mieux qu'un manipulateur, dont la parole est de miel et les actes chantent l'ambigüité et le doute.

Je pense, comme je l'ai déjà dit que Les peuples de la planète ont envahi le cosmos, selon un code de progrès croissant. Le savoir a dompté les difficultés naguère invincibles. La médecine a réduit la mortalité à n fois % plus qu'avant. Le corps humain a été divisé en objectifs remplaçables sous anesthésie et en pièces détachées, qu'on remplace, comme on remplace les bougies de sa voiture. Les technologies ont réalisé des miracles dans tous les domaines. Les peuples ont plié la terre par la force du cerveau humain.

Et nous, nous en sommes encore à codifier le mariage, a tracer les pourtours de l'époux ou de l'épouse à définir  la manière dont ils doivent inaugurer leur lit conjugal. Nous industrialisons les Fatwas à tour de bras pour des rapports qui se déroulaient depuis des siècles sans polémique, ni pédantisme ostentatoire.

Citoyens ! Je crois que nous sommes restés loin, très loin pour rattraper le train de l'humanité. Et trop loin pour espérer un jour sortir du labyrinthe suicidaire, que nous nous ingénions à nous construire.

Dommage pour la dilapidation de potentialités, qui auraient du au minimum servi à nous aider à ne pas nous entre-dévorer ou au plus bas de la foi, à nous respecter.

Ce n'est pas la fossilisation des cerveaux et le jeu de cache-cache avec soi et les autres qui nous feront avancer.

Mohamed Lemine Chah, n'est un ange, ni un prophète. Il dit ce qu'il a compris et qui est appuyé au minimum par l'un des quatre grands imams de l'islam. Son statut d'imam devait lui garantir une immunité contre toutes ces sorties noires et malveillantes. Sinon son droit de citoyen devait le protéger des insultes de ses semblables par la force de la loi.

Enfin je voudrais dire que quand on profère une malédiction contre un croyant, il faut s'attendre, à ce qu'elle retourne contre vous. La malédiction a un effet de boomerang, qui a emporté plus d'un.

Quand je déciderai de donner mon unique fille en mariage, ou plutôt quand elle décidera de me quitter pour l'homme de sa vie (car c'est elle qui s'engage), je ne serai pas son "tuteur", au sens que donnent certain à ce terme. Mais je serai celui qui l'aura accompagné pendant une tranche de notre vie commune, lui montrant là où il faut poser le pas, comment bien faire son jugement, quel genre d'humains il faut éviter ou fréquenter, et quand viendra ce moment ( que je redoute ), elle choisira son destin, moi je prierai pour elle et le reste n'appartient qu'à Dieu.

Une fille n'est pas un objet à vendre ou à manipuler comme une boule de boue. C'est une personne qui fait face au défi du monde et de la vie. Elle a le droit de choisir la nature de son séjour sur terre, et ses armes pour cette compétition. Pourvu qu'elle garde les principes de sa religion, de la (bonne) morale collective et du respect des lois.

 

Mohamed Hanefi

 

 

(Reçu à Kassataya le 2 novembre 2017)

 

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