Les députés, qui n'ont pas encore fini de discuter le projet de loi, sont divisés sur cette question. Certains estiment qu'il s'agit d'un texte comportant "des progrès importants sur le chemin de la protection des droits de la femme", alors que pour d'autres, dont les islamistes modérés, il s'agit d'un texte "contre la loi islamique, qui ne peut passer à l'approbation dans un pays où la charia constitue la principale source de droit". Dans une déclaration, le parti Tawassoul des islamistes modérés a appelé les parlementaires "à n'approuver aucun projet de loi susceptible de remettre en cause les fondements de l'islam".
Ce texte, déjà adopté par la chambre haute, devait passer à la chambre basse jeudi dernier, mais la séance a été reportée au 11 janvier prochain, parce que "le texte comporterait des dispositions contraires à l'islam".
L'imam de la grande mosquée de Nouakchott, Lemrabott Ould Habibou Rahmane, dans son sermon de vendredi, a jugé que certains des articles de ce projet de loi étaient "contre la charia", ajoutant que "personne n'est à l'abri de l'erreur en dehors Dieu", faisant ainsi allusion aux rédacteurs de cette loi. De son côté, le prédicateur mauritanien Cheikh Mohamed Ould Sidi Yahya a estimé que l'interdiction du mariage des filles de moins de 18 ans "est contradictoire à la charia", notamment dans la tradition du rite malikite en vigueur en Mauritanie.
Sur les réseaux sociaux, la polémique autour de cette loi se poursuit. Ceux en faveur du texte défendent son caractère "progressiste protégeant les femmes contre les violences", alors que dans l'autre camp on rejette "toute disposition pouvant être en contradiction avec la loi islamique comme le consacre la Constitution du pays".
Ce projet de loi, à l'origine duquel se trouvent des organisations de la société civile, est une nouveauté pour le pays puisqu'il consacre le droit des organisations de la société civile de se constituer en partie civile contre les violeurs et bourreaux des femmes. En effet, il stipule que "toute association de lutte contre les violences basées sur le genre régulièrement déclarée, depuis au moins cinq ans, peut se porter partie civile dans les procès relatifs aux agressions sexuelles sur des femmes et ester en justice dans ce domaine". Cette disposition n'existait pas dans la législation mauritanienne et ces organisations ne pouvaient se constituer partie civile qu'avec l'accord de la victime ou de ses parents.
Le projet de loi consacre également une meilleure poursuite des cas de viol. Il indique en effet que "le classement sans suite relatif aux plaintes pour agressions sexuelles sur une femme peut faire l'objet d'un appel par la plaignante devant la chambre d'accusation", et que "toutes les agressions sexuelles commises sur les femmes sont imprescriptibles".
Au cours des dernières années, les grandes villes du pays, notamment Nouakchott la capitale, ont connu une recrudescence des viols de femmes et de mineures. Ce phénomène avait provoqué la colère populaire qui s'était traduite par des marches de protestation contre "l'insécurité et la violence visant les femmes". En 2013, le cas d'une jeune femme de 20 ans, Penda Sogue, mère d'un enfant et enceinte de trois mois, violée et assassinée par un groupe de malfaiteurs, avait suscité un vaste mouvement d'indignation au sein de la société mauritanienne.
Source : Xinhua via Africatime
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