Au terme ses études secondaires sanctionnées par le Baccalauréat – série A au Lycée de Nouadhibou, ville où il a grandi, il fréquente l'université de Nouakchott à la Faculté de Droit en octobre 1991.
Il fait d'abord le premier cycle en sciences juridiques puis s'engage pour un autre premier cycle : philosophie à la faculté des lettres. Avec les séries de grève, de spectres d'année blanche à l'université et malgré le soutien d'un père employé au Port Autonome de Nouadhibou pour la poursuite de ses études en Tunisie, il a passé le concours d'entrée à l'Ecole Normale d'Instituteurs de Nouakchott (ENI) en 1993 dans l'optique de faire carrière dans l'enseignement. La même année, il devait partir pour la poursuite des études de journalisme à l'Institut de Presse et des Sciences de l'Information de Tunis. Finalement, il opta pour la formation à l'ENI l'entrée dans la fonction publique. Il a servi dans plusieurs régions du pays avant de s'exiler pour Bruxelles. Mais profitant de ses séjours d'enseignant ça et là il a été le correspondant régional de la presse à Bababé, dans le Brakna pour le journal « La Tribune » et ensuite journaliste à Chalenge. Une expérience qu'il juge lui avoir procuré un esprit de combattant pour la liberté, l'égalité et de justice. Son séjour en Belgique en a fait un homme aux grands ambitions…
La Tribune : Vous êtes un mauritanien de la diaspora. Vivant en Belgique, vous voulez briguer la Mairie de votre ville natale. Qu'est ce qui justifie cette ambition ?
Abou Sarr : Mon ambition pour Mbagne est démesurée étant conscient du potentiel de la commune non inexploité et non exploré, de son inertie, du besoin de servir ma commune, de la transformer et fort de mon expérience de la gestion de la cité et des hommes. Comme vous le savez, La sécheresse et l'exode rural ont poussé les gens à s'implanter dans les centres urbains comme Nouakchott et Nouadhibou, poussé d'autres sur le chemin de l'exil et ses conséquences. C'est une situation alarmante devra faire réfléchir. Aujourd'hui, la forte concentration des populations à Nouakchott avec la vie chère risque de compromettre l'avenir de beaucoup de familles. Cela va se répercuter dans l'éducation de leurs enfants. Nous voulons un bon encadrement des jeunes et voulons les fixer dans leur terroir où ils peuvent suivre leurs cursus scolaire dans difficulté et avec moins de souffrance. Après quoi, ils peuvent faire leurs petits bouts de chemins à Nouakchott ou ailleurs avec force et courage.
Pour rappel, quelqu'un disait, je cite « l'incertitude de demain repose sur la terre ». En m'appuyant sur cette citation, j'inviterai les ressortissants de la commune à s'intéresser aux potentialités économiques du terroir et à renouer les liens entre le monde agricole, à développer les associations des agriculteurs, des éleveurs, des pécheurs artisanaux et de l'artisanat dans l'espoir d'avoir une vie descente car nous avons l'eau et la terre. En dehors de sa place de centre de décisions de la politique internationale, la Belgique vit de l'agriculture et de ses ressources halieutiques. Ceci dit, Je veux faire de Mbagne une ville phare, l'équivalent de l'une des communes de la côte belge du point de vue agronomique et aquatique. Avec la construction du centre agricole de Mbagne, j'aimerais créer une antenne d'étude supérieure orientée vers l'élevage à Dabano , une autre antenne sur l'artisanat à Haimedatt, protèger Yéddia ( un site halieutique de Winding à l'image du Banc d'Arguin ) et Dirol près de Dawalel, transformer le débarcadère de Mbagne en port fluvial pour que les autochones puissent bénéficier des retombées du projet de l'OMVS sur la navigabilité du fleuve Sénégal, en insistant sur la construction d'un nouveau pont reliant Mbagne à Dabbé pour désenclaver Winding, Dabbé, Dabano, Sorimalé et les campements des éleveurs. Ensuite, monter un partenariat, entre le centre agricole de Mbagne et l'université de Gembloux en Belgique qui forment beaucoup d'agronomes de l'Afrique subsaharienne en vue de l'exploitation du casier rizicole de Winding et du périmètre agricole de walo – Diana situé à cheval entre Dabbé – Dabano et Winding, des périmétres agricoles de Haimedatt, de Dawalel, de Féralla et de Mbagne. Pour les familles de la commune de Mbagne, je compte ouvrir avec l'aide de nos partenaires, des CAM (Centres d'Assistantes maternelles) pour un bon suivi préscolaire des tout petits et permettre aux mamans d'être actives.
En outre, Avec la décentralisation et la création des conseils régionaux, j'aimerais également faire de ma commune un point de rencontre culturel (construction d'un centre culturel, d'une grande bibliothèque et d'un office de tourisme) entre Boghé et Kaédi et favoriser les artistes pour immortaliser l'œuvre de feu Mamadou Samba Diop Mourtoudo. De feu Samba Diyé Sall de Winding et de Médda Diagne de Dawalel, encourager Fama Mbaye Sarr et le groupe Ngatamaare DiawDiop ainsi d'autres de Ferella et de Haimedatt. Le tout avec un esprit d'ouverture et de coopération avec les communes de Niabina- garalol, de Bagodine et de Hijaj qui, avec celle de la Commune centrale ( Mbagne ) forment le département de Mbagne.. En un mot rendre la commune de Mbagne vitale dans toute sa dimension avec l'organisation annuelle d'un marathon de Mbagne sur un circuit reliant l'ensemble des localités de la commune de Mbagne ; une façon de donner du goût aux vacanciers et aux citadins de se ressourcer et de contribuer au développement du bled comme font nos expatriés vivant en Europe, aux Amériques, dans le monde arabe et en Afrique subsaharienne.
La Tribune : Vous avez effectué un séjour cet été en Mauritanie. Dans quel but, en particulier ?
Abou Sarr : Mon récent séjour au pays au cours de cet été s'explique par la volonté de renouveler les rencontres avec la base électorale dans l'optique de mise en place des structures de masse par la création des comités de campagne et la désignation des coordinateurs locaux. C'est une phase importante avant la bataille électorale. Ce séjour m'a permis d'écouter et d'entendre les problèmes et les revendications des masses populaires, de mettre en route une politique et une culture de proximité avec la base et la population dans son ensemble et dans sa diversité.
Dans l'ensemble, c'était très satisfaisant puisque j'ai vu l'adhésion d'une bonne partie de la population, des jeunes qui sont mobilisés autour de ma candidature et du projet de société que nous défendrons devant l'électorat et nos concitoyens. J'ai tenu des réunions avec des associations, j'ai interpellé des personnalités politiques et des notables, j'ai délégué des personnes ressources auprès des foyers. A ce jour, nous avons mis en place des comités de campagne qui font de la sensibilisation, de la mobilisation, en utilisant des bons canaux ; du bouche à oreille, du porte à porte, de la distribution de mon projet de société, de sa lecture et de sa vulgarisation. Nous continuons à agrandir notre base avec la création d'autres comités en élargissant nos réseaux.
La Tribune : Il vient de se tenir un dialogue national inclusif, selon les autorités. Une partie de la classe politique et de la société civile a boycotté ses assises. Il se trouve que les résultats retenus prévoient des modifications dans la constitution mais aussi des élections municipales et législatives anticipées. Y voyez-vous une opportunité à saisir ?
Abou Sarr : Désolé pour l'absence d'une partie de l'opposition aux assises du 29 septembre au 20 octobre 2016 au palais du congrès. Je comprends l'inquiétude de l'opposition boycottiste qui exige une réponse écrite avant tout dialogue avec le pouvoir. Mais, elle aurait dû saisir cette opportunité offerte à tous et comme l'a fait le doyen de l'opposition Messaoud ould Boulkheir, particpiter , faire des propositions , intégrer ses points, et se retirer si les conditions de participation ne sont plus réunies à leurs yeux. Au moins, on aura fait entendre sa voix. Boycotter indéfiniment n'est pas une solution aux résolutions des problèmes d'une nation. Certes, la participation du FNDU et du RFD , de l'AJD/MR et de la société civile au dialogue, j'y voie une grande opportunité pour cette force politique. En acceptant d'aller au referendum puis aux élections vous faites allusion, elle pourrait se lancer dans la bataille électorale pour les prochaines élections pour conquérir plusieurs communes, des sièges à l'assemblée nationale et aux conseils régionaux en attendant la présidentielle tout en préparant un candidat consensuel et unique s'elle veut provoquer l'alternance. Seul bémol, la modification du drapeau national avec des traits rouges qui ne justifient rien. Ce n'est pas après 56 ans qu'on parle des rajouts qui ne se justifient pas. La suppression du sénat est un vœu pieu de l'homme politique éclairé Kane Hamidou Baba qui a démontré avec un argumentaire limpide l'inefficacité et l'inopportunité de notre chambre basse. Son remplacement par des conseils régionaux permettra aux futurs élus d'être des hommes de terrain mais aussi des agents locaux de développement au lieu de s'enfermer dans des belles bâtisses à Tévragh zeina. Et Le fait qu'elle continue à boycotter face un pouvoir bien structuré qui a des moyens financiers et une base électorale bien engagée , elle risque de s'éterniser dans la lassitude et l'usure, perdre le terrain, démoraliser et démobiliser ses militants faute de représentation dans la gestion des institutions de l'Etat. Je pense que l'expérience vécue par cette opposition depuis leur boycott des élections de 2013 leur éloignant des communes et de l'assemblée nationale (excepté quelques partis) doit être édifiant.
Par ailleurs, en ayant boycotté le dialogue, j'imagine mal voir cette partie de l'opposition participer aux prochaines élections anticipées puisqu'elle ne veut plus discuter avec le pouvoir et elle serait gênée de renoncer à son principe de « NIET » avec le pouvoir en place. Dans une perspective de reprendre le flambeau en 2019, l'opposition radicale doit changer de stratégie avant l'heure puisque le Président de la République SEM Mohamed ould Abdel Aziz a déclaré dans son discours de clôture du dialogue national, respecter la constitution qui limite à deux, les mandats présidentiels. A l'opposition de ne pas se fixer sur une idée d'un dauphin du Président. Elle doit au contraire entrer dans la bataille et montrer sa capacité de mobilisation et d'accès à la magistrature suprême. Comparaison n'est pas raison mais aux USA, Barack OBAMA épaulé par son épouse en fin de mandat battent campagne pour Hillary Clinton, ex secrétaire d'Etat aux affaires étrangères de 2008 à 2012. Est-ce une dauphine d'OBAMA ? C'est la démocratie, et chacun a un penchant.
La Tribune N°734 du 1er novembre 2016
(Reçu à Kassataya le 2 novembre 2016)
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com