L’Afrique prépare sa sortie de la CPI qu’elle juge « raciste »

C’est une des décisions prises dimanche dernier par le sommet de l’Union africaine (UA), décision éclipsée par l’échec des chefs d’Etat africains à agir sur le Burundi : le sommet a adopté une proposition du président du Kenya visant à préparer la feuille de route de leur sortie de la Cour pénale internationale (CPI).

Le président du Tchad, Idriss Déby – qui succède à la tête de l’UA au Zimbabwéen Robert Mugabe, qui avait lancé l’idée en février 2015 – a justifié cette décision par "l’acharnement" de la CPI contre l’Afrique et "les chefs d’Etat africains, y compris en exercice, alors que des violations des droits de l’homme flagrantes se font ailleurs, mais personne n’est inquiété". Et de dénoncer une politique de "deux poids, deux mesures". "Nous avons décidé d’harmoniser notre position en attendant que la CPI prenne la mesure de l’importance de la position africaine sur la question."

Tous africains

Les pays africains forment un quart des 123 nations qui adhèrent au Statut de Rome créant la CPI mais ils lui fournissent la totalité de ses accusés, ce qui a poussé l’UA à dénoncer l’option "raciale" de la Cour.

Celle-ci répond qu’elle juge sur plainte des pays et que ce sont des capitales africaines qui lui ont confié des dossiers. Sans voir qu’elle avalise ainsi l’instrumentalisation dont elle fait l’objet de la part de ces pays. Ainsi, Kinshasa lui a livré des adversaires politico-militaires du président Joseph Kabila – dont son grand rival à la présidence, en 2006, Jean-Pierre Bemba – alors qu’un Bosco Ntaganda, recherché par la CPI mais qui a longtemps servi le président Kabila, ne fut pas inquiété durant des années.

En outre, lorsque c’est le Conseil de sécurité (dont 3 des 5 membres permanents ne reconnaissent pas la CPI : Etats-Unis, Russie, Chine) qui demande à la Cour d’ouvrir une enquête, c’est encore à charge de pays africains : les crimes commis par le président soudanais El Béchir dans sa province du Darfour; ceux commis par le régime Kadhafi en Libye. Et quand la CPI se saisit elle-même, c’est encore l’Afrique qui est dans le viseur, cfr le cas kényan.

En mars 2015, le président du Kenya, Uhuru Kenyatta – contre lequel la CPI a dû abandonner ses poursuites, fin 2014, faute de coopération de… l’administration Kenyatta pour soutenir l’accusation – avait promis un million de dollars pour la mise sur pied d’une Cour africaine de Justice internationale, proposée par le président Robert Mugabe afin de remplacer la "très raciste Cour internationale de l’Europe occidentale".

Sept ans plus tard

L’UA, qui fonctionne de facto comme un club de dictateurs, a commencé à critiquer la CPI lorsque celle-ci a lancé des poursuites contre le président du Soudan El Béchir, en 2009. Mais, sept ans plus tard, la CPI, qui aurait dû s’empresser de corriger l’impression de parti pris, n’a toujours ouvert aucune enquête hors d’Afrique, bien que des "examens préliminaires" aient été lancés depuis 2006 en Afghanistan, depuis 2008 en Colombie, et depuis plusieurs années au Honduras et en Ukraine. Ce n’est que la semaine dernière que l’"examen préliminaire" ouvert en 2008 a débouché sur une autorisation d’enquête sur d’éventuels crimes de guerre dans le conflit entre la Géorgie et la Russie.

Marie-France Cros

 

Source : La Libre.be (Belgique)

 

 

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