Edito : C’est un quart de siècle d’existence, 25 ans… !

Pour un journal, et au regard des records de longévité connus ailleurs dans le monde, ça parait bien peu.

Mais pour un journal mauritanien à l’indépendance éditoriale jamais contestée, né sous le régime de Maouiya Ould Sid’Ahmed Taya, et soumis aux assauts répétés du fameux article 11 à l’époque si redouté des professionnels de presse, ça reste largement méritoire.

Il n’est pour s’en convaincre que de se rappeler les contemporains de l’Eveil Hebdo des années de vaches maigres. « Mauritanie Demain », « Albayane » et d’autres, dont le lectorat d’aujourd’hui ignore jusqu’à l’existence même dans l’histoire de notre presse indépendante, et qui étaient pourtant des incontournables de cette belle époque de l’information périlleuse, tous tombés dans l’abîme de la censure et des saisies de numéros.

En un sens, cet hommage à l’Eveil Hebdo est aussi le leur. Celui des journaux « martyrs » de la presse libre de l’époque. Libre pour avoir osé la dénonciation, à un moment où le silence était une règle de survie, donc de « sagesse ». Hommage à cette presse qui bouscula la peur et les habitudes pour révéler les fosses communes de Sorymalé et de Wothi.

C’est à travers l’Eveil Hebdo entre autres, que l’esprit des pionniers survécut et se perpétua. C’est à travers ce journal, devenu depuis une quinzaine d’années le doyen de la presse libre, que se démuselle l’information indépendante, sans jamais tomber dans la facilité de la pompeuse diatribe ou du pamphlet rédhibitoire. 

Et ce ne fut pourtant pas d’aisance, que de survivre et de s’adapter à la fois. Survivre aux pressions : financières et politiques. Et s’adapter à un univers envahi par l’émergence à flot, dans la deuxième moitié de la décennie 90, et sans doute davantage après, d’une certaine presse boutiquière et négociante, soumise et laudatrice.

Comment résister là où beaucoup se sont agenouillés ? Comment survire financièrement là où les annonces publicitaires si précieuses sont accordées aux « négociants » ? Il est sain d’avouer que la tentation de se laisser aller à la facilité ne fut pas toujours absente.

Elle nous bouscula par moments dans nos certitudes. Mais c’est au prix de l’extrême vigilance d’un certain nombre d’entre nous, et de la générosité de mécènes convaincus que « l’esprit Eveil » doit survivre, que la ligne fut sauve, et le cap visible.

Hommage aussi à ces soutiens discrets !

Hommage posthume à ces anciens, aujourd’hui disparus, qui animèrent des débats improvisés dans la salle de rédaction, au grand bonheur de jeunes journalistes émerveillés par tant d’expériences disponibles.

Car la face non visible par le lecteur de l’Eveil Hebdo, c’est que sa salle de rédaction fut longtemps l’agora où aimaient se rencontrer de hauts retraités de notre appareil d’état, dont certains occupèrent d’influentes positions de pouvoir.

Leurs échanges sur les sujets d’actualité ou d’histoire ne furent pas un détail dans le patrimoine immatériel du journal. Ils apportèrent même une contribution non négligeable dans la formation à la rédaction, de certains d’entre nous.

Pour ma part, ils me servirent bien souvent de correcteurs de syntaxe et d’objecteurs de conscience. Les citer ici nommément eut été une entorse à l’humilité qu’ils ont affichée toute leur vie durant. Mais beaucoup les reconnaitront…

Que reste-t-il donc de toute cette histoire pour servir de moteur à l’Eveil Hebdo ? L’esprit d’indépendance qui a fait et fera encore sa force et sa longévité.

Des gardiens du temple internes et externes y veillent jalousement, pour que dans notre univers de presse, l’Eveil continue à faire école.

Une école pas toujours connue, parce que pas toujours bruyante, mais une école tout de même. Ne serait-ce qu’au regard du nombre de nos journalistes qui y firent leurs premières armes.

Bocar Oumar BA,
Strasbourg, France

 

 

Source : Eveil Hebdo

 

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