Droits de l’homme en Mauritanie : L’impunité des tortionnaires

L’épisode de la mort sous la torture policière au commissariat d’El Mina 2 du jeune Abderrahmane Diallo, 31 ans, version défendue par les proches du défunt, n’est pas encore clos. La dépouille du jeune est toujours à l’hôpital Sadaqha.

Ses proches refusent de l’enterrer avant une autopsie à laquelle s’opposent les autorités. Cette histoire commence à prendre des ampleurs, loin de l’engouement des organisations nationales de défenses des droits de l’homme qui tardent à réagir.

Ainsi, l’impunité des tortionnaires continue d’avoir de beaux jours en Mauritanie, malgré la ratification par le Pays de la Convention internationale contre la torture. Aujourd’hui, de nombreuses couches dont les Haratines et les Négro-mauritaniens qui s’inquiètent de la recrudescence d’un racisme d’Etat qui vise, selon eux, la communauté noire du pays.

Alors que la propagande officielle avait laissé entendre, par les sites électroniques à sa solde, que l’affaire du défunt Abderrahmane Diallo était clos, après constat de son décès naturel attesté par son frère, voilà que ce dernier réfute une telle thèse et déclare dans une vidéo largement diffusée, qu’il n’en est rien. En effet, Moussa Sow, frère du défunt rappelle que son frère a été raflé le soir de l’Id El Fitr, par une patrouille de la garde nationale qui le remit au commissariat de police d’El Mina 2. Le lendemain à 6 heures du matin, sa dépouille mortuaire est amené à l’hôpital Sadaqha d’Arafat dans une voiture de police remplie de sang et qui aurait même été nettoyée sur place. Sur sa tête des plaies et des hématomes qui attesteraient, selon lui, des coups de matraque ou de bottes qu’il aurait reçus sur cette partie sensible de son corps. La famille fut informée.

Moussa Sow qui fut l’un des rares membres de la famille autorisé à voir le corps affirme que « son frère baignait dans son sang sur son lit mortuaire ». Il aurait imbibé un peu de sang dans du coton qui lui sera confisqué par les policiers. Il raconte par la suite la conversation inédite qu’il aurait eu avec le Procureur de la République et le commissaire, lesquels l’auraient vertement insulté lui et son défunt frère, parce que tout simplement il a refusé d’avaler la thèse de la mort naturelle que les deux personnalités tentaient de lui faire accepter.

Moussa Sow affirma que tout ce qu’il voulait, c’était une autopsie, le Procureur lui aurait répondu « je ne fais pas cela, je m’en fiche de vous, vous ne m’intéressez pas » et d’ajouter « je n’ai peur de personne ». Puis, il le renvoya de la chambre où reposait le corps de son frère, lorsqu’il répondit qu’il ne « devait pas lui répondre sur ce ton » que c’est lui et sa famille qui venaient de perdre un être cher et que ce sont qui portent le deuil.

A sa sortie il tomba sur le commissaire de police d’El Mina 2 qui le supplia d’emporter la dépouille. Ce qu’il refusa pour se voir insulter avant que l’officier ne lui lança « tu peux aller là où tu veux, rien ne va nous arriver ». Et Moussa de rétorquer « la dépouille ne sera inhumée qu’une fois l’autopsie pratiquée ». Ainsi, le corps d’Abderrahmane Diallo dit Abou, 31 ans, repose encore à la morgue de l’hôpital Sadaqha depuis cinq nuits, victime d’un bras-de-fer entre un Etat qui cherche à protéger ses tortionnaires, selon la famille éplorée et cette dernière qui veut pousser les autorités à ouvrir une enquête judiciaire, déterminer les circonstances de la mort d’Abderrahmane et punir éventuellement le ou les auteurs de sa mort.

Des organisations s’en mêlent


Réagissant avec frilosité à cette « mort sous la torture policière » les organisations nationale de défense des droits de l’homme tardent à réagir, hormis IRA et « Houqouqi ». Si la première a accompagné dès les premiers instants le sit-in de protestation organisée par la famille d’Abderrahmane Diallo devant l’hôpital Sadaqa, cette dernière vient de condamner dans un communiqué ce dangereux incident qui ternit davantage l’image de la Mauritanie. L’organisation a invité les autorités mauritaniennes à respecter ses engagements internationaux, notamment le Protocole facultatif se rapportant à la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants que la Mauritanie a ratifié en 2012 avec emphase.µ

Le 21 juillet, la famille d’Abderrahmane Diallo avait pourtant adressé une plainte en due forme contre la police d’El Mina 2, adressée au Procureur de la République et publiée par voie de presse. La note revient sur la rafle dont fut victime leur fils pendant la fête de l’Eid, le 17 juillet 2014, entre 18 h 30 et 19 heures, puis sa mort sous la torture. La plainte de souligner que « son corps couvert de cicatrices et de sang ont permis de comprendre que les circonstances de sa mort ne sont pas claires ».

Et de préciser que « la Mauritanie, étant un pays supposé de droits de l’homme, ne peut et ne doit cautionner de telles circonstances de mort loin d’être élucidée ». Ainsi, selon la famille éplorée, la Mauritanie qui avait toujours traîné une mauvaise réputation dans le registre des droits de l’homme doit à présent rompre avec « ces habitudes qui n’honorent pas le pays ». La famille a aussi informé le Procureur que cette affaire sera portée à l’attention de l’opinion nationale et internationale et qu’il est temps que prenne fin l’impunité de la police dans ses violations des droits de l’homme.

Outre les organismes de l’Etat concerné, Présidence de la République, Primature, Parlement, Intérieur, Justice, CNDH, d’autres parties ont reçu l’ampliation, notamment le Bureau onusien local des droits de l’homme, les chancelleries occidentales accrédités en Mauritanie, les organismes internationaux comme le PNUD, des Ong de défense des droits de l’homme, telles que le Fonadh, SOS Esclaves, AFCF et IRA.

Un sentiment d’oppression


A la colère sourde des Négro-africains qui se sentent de plus en plus visés par des actes de racisme et de discrimination raciale en Mauritanie, se joint de manière amplifiée la grogne des Haratines et dans une moindr e mesure, la colère des forgerons. C’est dans ce cadre que le Mouvement El Hor vient de publier un communiqué dénonçant la position du président Mohamed Ould Abdel Aziz qualifiée de « raciste vis-à-vis des Haratines ». A la base, la grâce présidentielle qu’il vient d’accorder à certains détenus de droits commun à l’occasion de la célébration de l’Aid El Fitr et dans lequel ne figurent pas les dirigeants de l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), Birame Dah Abeid et Brahim Bilal Ramadan, emprisonnés depuis plus de huit mois à la prison d’Aleg.

Cette attitude atteste clairement selon le mouvement, le degré de haine, de non considération et de non respect que vous le régime de Mohamed Abdel Aziz à la communauté Haratine de Mauritanie à laquelle même la citoyenneté leur semble être refusée

Alors que les graciés de Aziz ont commis des crimes contre la société, Birame Dah Abeid et Brahim Bilal Ramadan n’ont commis comme crime que d’avoir réclamé la justice, l’équité et le respect des normes minimum des droits de l’homme dans ce pays, précise le communiqué en substance. Et de préciser qu’ils n’ont fait que lutter contre les fondamentaux sur lesquels repose le système raciste et discriminatoire de l’idéologie de domination ambiante. Le communiqué de fustiger le président Aziz qu’il accuse d’œuvrer à contre-courant de l’aspiration du peuple mauritanien, puisant dans sa haine contre ce peuple, les éléments qui alimentent sa politique nuisible pour l’unité nationale et la cohabitation intercommunautaire.

Ce qui est sûr, la mésaventure du jeune Abderrahmane Diallo continue d’alimenter la conviction des Noirs de Mauritanie qu’ils sont dans la visière du pouvoir. Ce jeune qui marchait à pied près du marché de la Capitale fut arrêté par une patrouille de la garde nationale le soir, alors que des milliers d’autres Mauritaniens vaquaient comme lui à leurs besoin sans être inquiétés. Arrêté sans motif et sans aucune charge, son seul délit est qu’il est fiché comme ayant des précédents judiciaires. Il sera remis au commissariat d’El Mina 2 où se trouvaient déjà des dizaines d’autres jeunes dont le tort est d’avoir comme lui des antécédents.

Cela entrait dans une traditionnelle rafle préventive, totalement illégale selon les juristes, qui consistent pour les autorités d’El Mina, d’enfermer pendant les jours qui précédent les fêtes religieuses tous les délinquants.

Là, selon sa famille, il aurait subi des sévices de la part des policiers sur place. Le jeune aurait pris contact avec sa tante à qui il aurait demandé de passer le voir au commissariat. Deux heures plus tard, il trouvait la mort. Paniqués par sa mort, les policiers l’acheminèrent rapidement vers l’hpopital Sadaqha cherchant à camoufler le meurtre avec l’aide des médecins sur place en mort naturelle. Le corps portait des ecchymoses et du sang, selon les témoignages.

Ce serait, selon sa famille, le Procureur de la République de Nouakchott Sud en personne, Khalil Ould Ahmed en personne, qui aurait donné ordre aux médecins de délivrer un certificat pour mort naturelle, selon des sources de presse. Face au refus de la famille d’Abderrahmane Diallo d’enterrer le mort, le Procureur de la République fera procéder à une observation du corps (il n’y a pas d’autopsie en Mauritanie) avec à la clé des injonctions aux médecins de confirmer la mort naturelle. Puis face à la persistance de la famille de récupérer le corps, le Procureur leur aurait tenu un langage dur, plein d’insultes, n’hésitant pas à insulter aussi le mort qui n’est selon lui qu’un criminel ayant des antécédents judiciaires.

Puis, il leur lança que son dossier sera clos définitivement et à jamais. Et de leur lancer « si vous voulez, prenez votre mort et enterrez-le et si vous voulez, laissez-le pourrir dans la morgue de l’hôpital ».

Selon certaines sources de presse, face au refus inébranlable de la famille, les autorités auraient changé de fusil d’épaule cherchant à éponger l’épineux problème par l’argent. La famille se serait vu offerte 4 millions d’UM pour clore le dossier. Le mardi 21 juillet dernier, les alentours de l’hôpital Sadaqha était encore ceinturé par une armada de gardes et de policiers qui en bloquait l’ensemble des issues

Cheikh Aïdara

 

Source : L’Authentic.info

 

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