La Chine condamne à la prison un musulman à cause de sa barbe

Dans la province musulmane du Xinjiang, un homme de 38 ans a été condamné à six ans de prison pour s’être laissé pousser la barbe, tandis que son épouse écopait de deux ans de prison pour avoir porté le voile et une burqa.

 

Cette décision relève d’une vaste campagne contre « les idées extrémistes ».

La répression chinoise dans la province autonome musulmane du Xinjiang lancée depuis plusieurs années prend parfois des tournures inattendues. Le tribunal de la ville de Kashgar a condamné un homme de 38 ans à six ans de prison pour avoir « provoqué des troubles » en « se laissant pousser la barbe ». Le même tribunal a condamné dans le même temps son épouse à une peine de deux ans de prison, a rapporté le 29 mars le Quotidien de la jeunesse de Chine.

 

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L’homme « avait commencé à se laisser pousser la barbe depuis 2010, tandis que sa femme portait un voile et une burqa masquant le visage », a indiqué le journal. Le couple a finalement été reconnu coupable d’« avoir attisé des querelles et provoqué des troubles », motif d’accusation imprécis utilisé habituellement par la justice chinoise, qui opère toujours sous l’étroit contrôle du pouvoir politique.

La barbe et le voile associés aux « idées extrémistes »

Les autorités provinciales au Xinjiang mènent depuis plus d’un an une vaste campagne contre la barbe et le port du voile, pratiques associées dans les messages officiels aux « idées extrémistes ».

Sous le nom d’« Objectif Beauté », cette campagne encourage notamment les femmes à se promener tête nue et à abandonner le voile, pratique assez répandue parmi les Ouïgours, des musulmans turcophones constituant la principale ethnie des 22 millions d’habitants du Xinjiang.

Le couple de Kashgar avait été « rappelé à l’ordre à plusieurs reprises » avant d’être interpellé et poursuivi, a souligné le Quotidien de la jeunesse, citant des responsables locaux. Les autorités judiciaires de Kashgar, interrogées par le journal, ont assuré que « tout un groupe de contrevenants aux règlements (contre) le port de la barbe, du voile et de la burqa » avaient été poursuivis et condamnés depuis le début de l’année.

Une politique chinoise répressive à l’égard des Ouïgours

Experts et groupes de défense des droits de l’homme estiment que la politique répressive de Pékin à l’égard de la culture et de la religion des Ouïgours alimente les tensions au Xinjiang, vaste région aux confins de l’Asie centrale.

Les violences s’y sont multipliées l’an dernier, faisant au moins 200 morts lors d’une série d’attentats et d’affrontements meurtriers avec les forces de l’ordre, invariablement imputés par Pékin à des « séparatistes » et « extrémistes religieux ».

En avril 2014, les autorités du district de Shaya s’étaient distinguées en proposant des récompenses aux habitants qui signaleraient la présence de voisins se laissant « pousser la barbe » ou « se livrant à des activités religieuses illégales ». Ce verdict « est inacceptable et absurde », a dénoncé Dilxat Rashit, porte-parole du Congrès mondial ouïgour, organisation exilée de défense des Ouïgours.

 

Dorian Malovic

 

 

 

 

 

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