CE QUE JE PENSE DE CE QUI SE PASSE : Ould Mkheiytir condamné à mort pendant que le barreau mauritanien se trouvait à Rosso

Ould Mkheytir condamné à mort dans un pays où les verdicts sont rendus sur les bases d’une justice hybride, cela est illogique.

 

Ou bien le jeune homme de vingt neuf ans, arrêté visiblement sur injonctions de la rue et de quelques fanatiques pour avoir produit un écrit trouvé blasphématoire, est un justiciable selon les règles exclusives de la Charia islamique ou bien il l’est selon les humeurs d’une population prompte à s’en prendre aux faibles qui, frustrés parce que méprisés n’ont pu trouver rien d’autre pour se faire entendre que de choquer une opinion douillettement assise sur ses convictions culturelles…

 

Ou alors, il est à considérer comme prisonnier d'opinion, on le soumet à un tribunal autre que celui qui dit que la source du droit est l'Islam mais continue à utiliser un code pénal et bien d'autres texte traduits vers l'arabe et inspirés par les code occidentaux, notamment celui français…

C’est  parce que ce jeune homme, issu de la caste des forgerons, s’est trouvé profondément blessé dans sa dignité  d’homme par une communauté dont la mentalité met tous ses semblables à lui au plus bas de l’échelle qu’il a été amené à produire un article sonnant comme une lecture du soupçon dans l’histoire de l’Islam, poussant l’audace jusqu’à s’interroger sur la portée de certains faits et décisions du prophète Muhammad (PSL). Son article « la religion et la religiosité et les forgerons » était d’autant plus audacieux qu’il s’est employé à mettre en parallèle des situations où le prophète de l‘Islam a eu des attitudes différentes d’un contexte à l’autre. Et il a semblé vouloir amener le lecteur à tirer des conclusions penchant plutôt pour un comportement discriminatoire de l’envoyé d’Allah, selon que les personnes auxquelles celui-ci a eu affaire comptaient parmi ses proches ou lui étaient étrangères d’un point de vue communautaire.

Point besoin de revenir sur les contenus de cet               article. On notera simplement qu’Ould Mkheitir s’est laissé prendre au piège d’une opinion facilement influençable du sommet à la base. Il s’est retrouvé tout seul dans un environnement social où il ne fait pas bon être parmi les moins craints. On a connu qui ont offert le Coran à titre de « modeste présent »  à un président de la république sous;  qui ont parlé des mosquées avec dérision pour dire qu’il vaut mieux « les transformer en boulangeries » On ne parlera pas de ceux qui ont tiré à bout portant sans autres formes de procès sur des citoyens, ni de ceux dont aucun des comportements malsains et très peu…catholiques ne sauraient être dénoncés sous peine de représailles…

On a surtout vu des intellectuels se vautrer derrière je ne sais quel rideau protecteur pour ne pas avoir à se prononcer, encore moins défendre ce pauvre jeune égaré…De peur de représailles.

Au moment où tombait le verdict de la peine capitale sur Ould Mkheiytir à Nouadhibou, le gros des membres du barreau mauritanien dirigé par son bâtonnier se trouvait à Rosso : pour défendre Birame Ould Dah Ould Abeid. L’homme qui il y a deux ans avait incinéré des livres tenus encore par l’opinion féodale en Mauritanie pour saints fut lui aussi l’objet de la vindicte populaire et se retrouva en prison pour quelques temps.

Récemment Ould Abeid était candidat  à la présidentielle. Il avait semblé fréquentable jusqu’à un certain 11 novembre  2014 où il allait se faire capter alors qu’il participait à une caravane de la société civile contre l’accaparement des terres dans la vallée et l’esclavage foncier. Depuis il a exigé d’être jugé. Accusé entre autres de trouble à l’ordre public et incitation à la violence, des peines en correctionnelle pour lesquelles il risque 5 mois d’emprisonnement au maximum. Il a obtenu son procès et le Tribunal de Rosso lui sert de Tribune. Une trentaine d’avocats sont là pour le défendre. A plus de 630 kilomètre le jeune Mkheiytir lui est défendu par un ou deux avocats commis d’office, presque contraint de s e retrouver à défendre un pauvre citoyen dont personne ne veut….

 

Seule une militante des droits de l’homme avait osé réclamer un procès équitable pour le jeune forgeron. Elle s’est retrouvée condamner à mort par un mauritanien lambda qui prétexte être un défenseur  du prophète…Là encore, cette militante, Aminetou Mint El Mokhtar, présidente de l’AFCF, s’est retrouvée pratiquement seule. Et le fameux dirigeant des Ahbab rassoul  qui s’est arrogé le droit de réclamer sa tête et de la taxer de mécréante n’a pas été inquiété outre mesure…

OUld Mkheitir aussi continue à se retrouver seul. Car à son procès, l’on n’a pas semblé tenir compte d’un autre écrit produit visiblement par lui et où il semble vouloir clarifier sa position. Il continue surtout à se retrouver seul devant un tribunal dont ne sait réellement s’il se tient sur la base de la Chariya ou sur la base du droit hérité de l’occident avec une cour constitué d’un procureur, d’un président de la Cour, d’assesseurs et… d’avocat en lieu et place d’un comité dont les membres sont ceux prévus par le droit musulman ? Il se retrouve seul parce que personne ne peut lui expliquer si l’apostasie dont on l’accuse est prouvé parce que lui a publiquement renié sa religion en refusant de faire la profession de foi, de pratiquer l’Office (salâat), de faire la zakat, le jeune, ou le pèlerinage….Ce sont là normalement les fondamentaux pour définir que l’on est musulman. A moins d’avoir choisi de le juger sur la base de textes qui, bien que produit des grands érudits (fuqaha’), peuvent être relativisés, ceux qui ont rendu le verdict d’Ould Mkheytir ont manqué de rigueur dans l’exercice de leur pratique judiciaire.

 Ils peuvent le condamner à mort….Ils l’ont fait. Ils peuvent rejeter son appel et lui refuser un re-jugement.  Oseront-ils exécuter la sentence? Pas du tout. En prononçant la peine capitale, ils ont voulu satisfaire une opinion qui pense mal et ils se sont laissés prendre au piège de prétendus défenseurs de l'islam. Et puis il y a les occidentaux, les alliés de la Mauritanie. Il y a surtout le malaise social dans un pays où le repli identitaire est exacerbé.

 

Kissima

 

Source :  Nouvelles Pages  (Le 2 janvier 2015)

 

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