Commémoration du 54ème anniversaire de l’indépendance : Deux célébrations et 36 années occultées

Pour la Mauritanie officielle d’aujourd’hui, le pays, indépendant depuis le 28 novembre 1960, a cessé d’exister après 1978, pour ne ressusciter qu’en 2008. Ce sont ainsi 36 années de la vie du pays qui sont occultées, et les jeunes générations ne sauront probablement de ce gouffre historique que ce que leurs parents voudront bien leur apprendre.

 

Autre particularité, pour la 24ème année consécutive, la communauté négro-africaine compte célébrer de nouveau la journée dans la douleur et le deuil, alors que le reste de la population la vivra dans la liesse.

La télévision nationale, mais aussi l’Agence mauritanienne d’information et Radio Mauritanie qui représentent la voix officielle de la Mauritanie, diffusent depuis des jours des chants et des images, à l’occasion de la célébration du 54ème anniversaire de l’indépendance de la Mauritanie, prévue le 28 novembre prochain. D’ores et déjà, les membres du gouvernement sont en tournée pour procéder à des inaugurations, pendant que les principaux bâtiments publics commencent à s’orner du drapeau national.


Seulement, l’anniversaire qui bat son plein dans les médias publics occultent 36 années d’histoire de la Mauritanie, selon plusieurs observateurs. Seuls passent en revue, selon eux, la période postindépendance, et le seul ancien président dont la mémoire semble être conservée est Mokhtar Ould Daddah. Puis, les usagers se retrouvent déportés en 2008, avec l’arrivée de Mohamed Ould Abdel Aziz au pouvoir. Aucune référence, ni aucune image, de l’histoire du pays, entre 1978 et 2008, semblent regretter une grande partie de l’opinion. La Mauritanie de Moustapha Ould Mohamed Saleck, les quatre années de Haïdalla, les 21 ans de Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya ainsi que la transition de 2005 à 2008, avec la présidence d’Ely Ould Mohamed Vall et celle de Sidi Ould Cheikh Abdallahi, tout cela n’aurait jamais existé dans la mémoire actuelle. Et de rappeler le temps où Ould Taya faisait coïncider l’histoire du pays avec le 12-12.
 

Beaucoup trouvent ainsi que l’amnésie collective que le régime actuel cherche à imposer, même s’il pourra avoir toucher la nouvelle génération née en 2008, aura cependant peu d’impact sur les générations anciennes qui savent qu’il y avait eu un « Avant-Mohamed Ould Abdel Aziz », même si ceux qui avaient partagé les années grasses des périodes antérieures et qui sont aujourd’hui bien installés au cœur du système, cherchent eux aussi à oublier leur propre passé. Et de spéculer sur l’éventuelle poursuite de cette chevauché nihilste, si le prochain président qui sera élu en 2019, se mettait également à prendre comme repère historique l’année de son investiture. La Mauritanie se retrouvera ainsi amputée de 68 ans de son existence, et la période Aziz avec, trouvent-ils. A ce rythme, selon les analystes, les Mauritaniens seront certainement condamnés à vivre dans l’unique pays au monde à ne pas avoir d’histoire ni de mémoire.
 

Pendant ce temps, le pays s’achemine vers une célébration d’une fête nationale à double vitesse. Beaucoup d’ONG des droits de l’homme négro-africaines affirment en effet que la population négro-africaine portera le deuil, pour la 24ème année consécutive. Il s’agit de toutes ces veuves, orphelins, compagnons d’armes et proches qui se préparent déjà à se recueillir dans la douleur ce 28 novembre 2014. Ils se refusent à oublier ce fatidique 28 novembre 1992, lorsque vingt-huit officiers, sous-officiers et soldats négro-africains furent pendus à INAL, sacrifiés sur l’autel de la barbarie, pour célébrer l’indépendance du pays, affirment-elles en substance.


Déjà, ces commotionnés de la commémoration pleurent, selon ces ONGS « leur regret de ne pouvoir cette année se recueillir sur leur tombe ». Pour elles, « faute du combattant qui les y menait depuis deux années, Birame Dah Abeid, président d’IRA, les âmes des damnés d’INAL n’auront pas cette année de visiteurs ».


Quant au reste de la population, qui ne se sent pas concernée par les pages sombres de l’histoire du pays, la fête a déjà commencé. Et c’est là, où selon plusieurs témoignages, à commencé la fracture de l’Unité nationale.

Cheikh Aïdara

 

Source : L'Authentic.info

 

 

 

Quitter la version mobile