Edito de KASSATAYA. Présidentielle en Mauritanie : « Tout est perdu, fors l’honneur »

Quel rapport entre une élection présidentielle et une coupe du monde de football ?  A priori aucun. Pourtant ! Des Mauritaniens ont voté. Mais le monde retiendra que les Mauritaniens ont voté et ont élu et bien élu celui qui sera leur président à tous durant les cinq ans à venir.

Des Mauritaniens ont boycotté mais le monde n’en parlera pas. C’est la dure réalité de cette élection présidentielle. Mohamed Ould Abdel Aziz a gagné avec 81,89% des voix. A l’exception de Chirac en 2002 face à J-M. Lepen (circonstances exceptionnelles donc en France), c’est un score qu’on rencontre rarement dans des pays réputés démocratiques.

 En Mauritanie, Ould Abdel Aziz a bénéficié de circonstances particulières. Une partie importante de l’opposition a jugé bon de boycotter l’élection, lui laissant un boulevard. Ce boulevard, Ould Abdel Aziz se prépare à l’emprunter depuis cinq ans. Dès son élection acquise en 2009, sa préoccupation majeure n’était plus l’opposition. Tandis que cette dernière s’accrochait aux accords de Dakar, Ould Abdel Aziz s’installait dans un face-à-face avec l’électeur. Les messes télévisées annuelles (Rencontres avec le peuple), les équipements structurants (routes, villes nouvelles, énergie…), les sorties opportunément préparées (visites inopinées, rencontres avec la jeunesse et les expatriés…), la lutte contre le terrorisme…tous ces actes concouraient à préparer la prochaine élection dès lors qu’il était clair dans sa tête que, sauf accident majeur (comme ce « tir ami » qui faillit l’emporter), il ne s’arrêterait pas à un seul mandat. L’électeur aime un discours qui lui soit accessible, lisible. Les discours offensifs de l’opposition sur les soupçons de mauvaise gestion et aux parfums de scandale n’ont, au vu du résultat, manifestement pas pris.  Et pour couronner le tout, la « Communauté Internationale » qui ne s’est pas attardée sur les accords de Dakar, l’a adoubée, jusqu’à cette inattendue Présidence de l’Union Africaine au cours d’une année électorale. Oui. La politique c’est comme le sport. Une compétition ça se prépare longtemps à l’avance, comme une élection.

 

Ceux du FNDU qui ont boycotté cette élection diront à juste raison, comme M. Brahim Ould Boihy, pilote instructeur (habitué donc à prendre de la hauteur), membre éminent du RFD et chroniqueur à KASSATAYA, que contrairement au sport, l’important n’était pas de participer et que la démocratie ne se limite pas à une élection. Les partis ont tant à construire. Oui ! La politique c’est comme le sport. L’élection c’est comme la coupe du monde de football. L’important n’est pas de participer à une élection (ou à une coupe du monde) mais de bien préparer son équipe (son parti) et ses supporters (les militants). Il faut aussi que les organiseurs s’emploient à sélectionner de bons arbitres (la CENI), justes et respectueux des règles. La FIFA (le Gouvernement) se doit de jouer le jeu.

Bien sûr, il peut toujours y avoir des équipes qui vont chercher à soudoyer les arbitres (ce n’est pas beau) et des supporters ou des organisateurs de paris (hommes d’affaires, militaires) qui vont vouloir fausser le jeu. Mais tant que les joueurs garderont en mémoire l’objectif de s’acquitter de leur devoir, le succès, ou à défaut le beau jeu, sera au rendez-vous.

Il faut pour cela qu’il n’y ait pas de joueurs qui donnent des coups de tête à leurs coéquipiers, qui refusent de passer la balle ou de respecter les consignes des entraineurs (le Cameroun ce  n'est pas le RFD. C'est qui alors?). Et que les téléspectateurs (électeurs) apprécient le beau jeu et les beaux gestes (les discours et les programmes), qu’ils comprennent ce qu’est le sens d’un encouragement (ou d’un vote), pourquoi supporter telle équipe plutôt que telle autre ? Comme au football, hélas, peu de gens retiennent le nom du finaliste qui n’a pas gagné la coupe.

Alors, que va-t-il rester au FNDU ? Empruntera-t-il sa formule à François Ier ? Le Roi de France n’avait pu, par la seule force des armes, faire face à Charles Quint et aux Impériaux. Soumise depuis 2008 à l’agenda fixé par un adversaire qu’elle a peut-être eu le tort de sous-estimer, l’opposition mauritanienne n’a jusqu’ici pas montré de signes laissant entrevoir la possibilité de changer le cours des événements par la mobilisation populaire. Il lui reste le trophée du fair-play : féliciter le vainqueur et préparer la prochaine compétition à laquelle, en principe, le sortant ne participera pas. Et malgré les protestations, la FIFA ne s’avise pas de revoir le score d’un match en coupe du monde après le coup de sifflet final (l’élection ne sera pas annulée). Une élection c’est comme une coupe du monde. Ca ne se prépare pas que pendant une campagne (ou les éliminatoires) mais longtemps à l’avance. Tout le temps.

Abdoulaye DIAGANA

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