A Brunei, les voleurs pourront aussi être flagellés

La polémique enfle après l'instauration d'une version très stricte de la charia – loi islamique – dans le sultanat de Brunei : des personnalités des milieux du cinéma et du show-business américain ont décidé de boycotter de prestigieux hôtels californiens possédés par l'agence d'investissement du sultan Hassanal Bolkiah, 67 ans, dont la fortune est estimée à 20 milliards de dollars (14,4 milliards d'euros).

La charia sera appliquée en plusieurs phases. La première, entrée en vigueur le 1er mai, prévoit que les personnes reconnues coupables de " comportements indécents ", d'absence à la prière du vendredi ou d'avoir eu des enfants hors mariage seront condamnées à des amendes, voire à des peines de prison. A partir de la fin de l'année, les voleurs pourront être amputés de la main ou flagellés. La dernière phase, pour la fin de 2015, prévoit notamment la lapidation pour des " crimes " de sodomie ou d'adultère.

La charia, qui couvre les aspects à la fois privés et publics du musulman, peut être appliquée de manière plus ou moins stricte selon les pays. Brunei, un sultanat d'environ 400 000 habitants situé sur la grande île de Bornéo, pratique une forme d'islam plus conservateur que ses voisins malais et indonésiens, deux pays dont la population est également à majorité musulmane.

Selon le Fonds monétaire international, Brunei, dont le sous-sol regorge d'hydrocarbures, se classe au 5e rang mondial en termes de PNB par habitant, ce qui assure un large soutien populaire au sultan, prompt à redistribuer la manne pétrolière.

" Certaines théories disent que la loi d'Allah est cruelle ", a concédé le sultan, lors de l'annonce de l'entrée en vigueur de la charia. Mais il s'est empressé d'ajouter : " Pourtant Allah lui-même a dit que sa loi était juste. "

Le procureur général de Brunei, Hayati Salleh, a tenu pour sa part à tempérer les clameurs indignées de l'Occident en assurant que les condamnations seront prononcées après d'intenses et pointilleuses vérifications de la véracité des accusations pesant sur les prévenus.

Balayer devant sa porte

Les observateurs se perdent en conjectures pour expliquer les raisons de l'annonce d'une loi si répressive. Serait-ce l'âge du sultan, ce dernier devenant de plus en plus conservateur en vieillissant ? Ou son désir d'assurer un contrôle social plus strict dans un univers mondialisé ? Le sultan a par le passé mis en garde ses citoyens sur les pernicieux dangers de l'Internet.

Peut-être doit-il aussi balayer devant sa porte : la famille royale a été éclaboussée par un scandale après que le frère du sultan, Jefri Bolkiah, a été soupçonné d'un détournement de 15 milliards de dollars quand il était ministre des finances dans les années 1990… Un ministre aux mœurs relâchées, organisant des fêtes où l'alcool coule à flots – il est interdit d'en consommer publiquement à Brunei – et entretenant un harem d'une quarantaine de femmes.

Quant à l'ex-épouse du sultan, Mariam Aziz, elle aurait eu des comportements peu conformes à la charia, qui interdit les jeux d'argent, en perdant en une seule fois 500 000 livres sterling (610 000 euros) dans un casino londonien…

 

Bruno Philip (Bangkok, correspondant régional)

 

 

Source : Le Monde

 

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