L’Afrique du Sud n’est plus la première puissance économique d’Afrique

Le Nigeria a dépassé le pays austral, dont la croissance s'essoufle et le déficit se creuse.

L'Afrique du Sud a longtemps été la première économie d'Afrique. Elle représente quelque 30 % du produit intérieur brut (PIB) de l'Afrique subsaharienne et 70 % de celui de l'Afrique australe, mais elle vient de perdre son rang de première puissance économique du continent au profit du Nigeria.

 

Malgré les progrès accomplis depuis la fin de l'Apartheid en 1994, le pays, où se déroulent mercredi 7 mai des élections législatives, affronte d'immenses défis économiques, sociaux et de santé publique (le taux de prévalence du Sida, très important, est de l'ordre de 10 %). Le chômage, massif, touche près d'un actif sur trois et 50 % des jeunes. Les inégalités s'accroissent et elles sont même plus importantes qu'au temps de l'Apartheid. L'économie n'est pas assez diversifiée. Les comptes externes se sont dégradés.

La prévision de croissance pour 2014 a été ramenée des 2,8 % initialement prévus à 2,3 %, selon une note du service économique régional de Pretoria et de la DG Trésor. L'économie sud-africaine tire la croissance de l'Afrique australe vers le bas (+ 3,5 %), loin derrière les performances du reste de l'Afrique subsaharienne (+ 5,4 %).

Depuis le milieu des années 1990, l'économie sud-africaine a crû en moyenne de 3,3 % par an. Elle a connu des années plus fastes entre 2000 et 2007, avec un PIB progressant de 4,2 % par an, une forte récession en 2009 (- 1,8 %), et elle peine depuis à retrouver des niveaux de croissance en ligne avec son potentiel (3,1 % selon la Banque mondiale).

Dans un pays où la population est jeune – la moitié des Sud-Africains ont moins de 25 ans –, la faiblesse de la croissance est terrible : elle ne permet pas de créer suffisamment d'emplois ni de faire reculer le nombre des demandeurs d'emploi. Vingt ans après la fin de l'Apartheid, le taux de chômage des Sud-Africains reste directement corrélé, selon les statistiques officielles, à l'origine ethnique : il est de près de 6 % chez les Blancs, de 22 % chez les Métis et de 35 % chez les Noirs, preuve que les inégalités demeurent extrêmement fortes et que les politiques de discrimination positive, comme le Black Economic Empowerment, ne sont pas à la hauteur de la gravité de la situation.

Le secteur minier (charbon, platine, or, diamant…) reste l'un des principaux piliers de l'économie sud-africaine mais il emploie peu de monde. Le secteur financier, autre point fort de l'Afrique du Sud, qui s'est beaucoup développé ces dernières années, requiert, lui, une main-d'œuvre qualifiée. Comme dans de nombreux pays en développement, il n'y a pas assez d'emplois peu ou pas qualifiés en Afrique du Sud pour répondre aux besoins de la population.

L'industrie minière a perdu en compétitivité. L'ancien modèle de croissance – tourné vers l'exportation de matières premières – n'est plus ce qu'il était, et la demande s'est affaiblie. Sa reprise, récente, n'a pas donné les résultats escomptés du fait d'un mouvement de grève qui dure depuis trois mois dans le secteur du platine.

Ménages surendettés

Quant à la demande intérieure, elle est tout sauf robuste : les ménages, qui perdent du pouvoir d'achat, sont surendettés. Et les entreprises peinent à financer leurs projets au meilleur coût alors que la Banque centrale a augmenté son taux directeur de 50 points de base en janvier à 5,5 %.

Le déficit courant, alimenté par le doublement du déficit commercial, s'est creusé pour atteindre 5,8 % du PIB en 2013. Cette augmentation pèse sur le Rand, qui s'était fortement déprécié au printemps 2013, après l'annonce d'un possible resserrement de la politique monétaire américaine. La devise nationale s'est reprise depuis.

La situation des finances publiques s'est détériorée avec la crise : le déficit budgétaire, que les autorités veulent ramener à 2,8 % du PIB d'ici à 2016-2017, est de 4 % et la dette a augmenté d'un tiers en cinq ans. Améliorer les comptes publics sera difficile : l'assiette fiscale est très étroite. A peine 12 % des Sud-Africains sont assujettis à l'impôt sur le revenu alors que 15,8 millions d'entre eux, sur un total de 52 millions, touchent des prestations sociales. C'est une des raisons pour lesquelles la notation du pays avait été dégradée en 2012.

 

Claire Guélaud

 

Source : Le Monde (Supplément Eco&Entreprises)

 

 

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