C’est une lapalissade que de dire que l’arabe se porte bien en Mauritanie. Il se porte même mieux pour que certains jouent au messianisme comme si des envahisseurs féroces prêchant la destruction de cette belle langue qui,- soit dit en passant est la langue de l’islam –sont en croisade contre elle.
Pardonner de nous essayer à ce simple syllogisme du reste très approximatif pour dissiper cette crainte :«l’arabe est la langue du Saint Coran or tous les mauritaniens sont musulmans, donc tous les mauritaniens aiment le Saint Coran».
Sans bien sûr à confondre l’arabe en tant que langue parlée et le Saint Coran comme texte sacré. Il est à cet égard important de rappeler avec le linguiste Ferdinand de Saussure que la langue est un outil de communication.
Peu importe ce qu’elle est dans son essence ou dans appartenance sociale. Le plus important c’est de disposer d’un vecteur de transmission du discours à véhiculer.
Elle permet d’exprimer sa pensée à l’écrit comme à l’oral. Sans trop centrer nos propos sur des références linguistiques savantes qui ne manquent pas pour illustrer nos analyses et dont l’usage abusif risque de produire un discours savant et spécialisé, nous restons dans les limites d’un débat que nous voulons simple et accessible au plus grand public.
Nous disons donc que le débat sur l’arabité en Mauritanie a besoin de se focaliser plus sur l’amélioration du niveau de cette langue beaucoup plus menacé par l’enseignement au rabais qui lui est consacré tout comme d’ailleurs le français est victime du système dépréciatif en vigueur , que par l’entrée en force d’autres langues qui lui vouent la concurrence ou hostilité .
Ce qui est d’autant plus vrai que jamais on a entendu dans ce pays des voix proclamer le refus de l’arabe comme langue de religion qui ne relève ni de la décision d’un homme ou d’une constitution.
En effet l’arabe comme langue du Saint Coran n’est pas prescrite par un être humain mais bien par la volonté du Tout-Puissant.
Dans toutes les contestations politiques ou identitaires il n’a jamais été question de remettre en cause le statut de l’arabe.
L’exigence majeure étant la valorisation des autres langues nationales, leur réhabilitation dans le système éducatif et l’acceptation du choix du français dans l’enseignement mauritanien pour des composantes nationales du pays dans leur cursus.
Ce n’est pas que ces mauritaniens soient réfractaires à l’arabe ni dédaigneux pour sa culture mais parce qu’ils estiment qu’avec le français ils peuvent poursuivre des études donnant accès à l’universalité sans aucun mépris pour l’arabe.
Ce rapport avec le français concerne tous les mauritaniens quelque soient leur appartenance culturelle. D’ailleurs depuis plusieurs années les étudiants mauritaniens formés en arabe ont vu la nécessité de développer leurs aptitudes linguistiques en français ou en anglais pour approfondir leurs recherches dans des domaines scientifiques.
Sans ôter une fois encore à l’arabe son intelligence scientifique. Ce qui est terrorisant et inacceptable moralement et religieusement c’est de priver un individu le droit d’apprendre dans une langue qu’il veut. En Mauritanie, c’est le chauvinisme linguistique qui a créé la confusion et dressé les uns contre les autres.
Ceux qui ont suivi des études en français ou en anglais sont plus préparés à soutenir le maintien du français non pas comme langue coloniale mais comme langue d’apprentissage et d’ouverture sur le monde. Le système colonial fredonnant « nos ancêtres les Gaulois » auquel nos pères se sont moulés est mort avec la fin du colonialisme.
Comment dans un monde qui s’universalise vouloir imposer une autre forme d’impérialisme linguistique à des franges qui n’ont fait que demander le respect des différences notamment le droit de parler leurs langues tout en choisissant le médium linguistique scolaire.
Si l’arabe a perdu son niveau dans les écoles, il n’a pas perdu sa place et son statut dominant par rapport aux autres langues et cultures. Loin s’en faut … ( A suivre)
Cheikh Tidiane Dia
Source : Le Rénovateur Quotidien
Les opinions exprimées dans cette rubrique n'engagent que leurs auteurs. Elles ne reflètent en aucune manière la position de www.kassataya.info
Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.info
