ZAMBIE : Ne traitez pas le président de « patate » !

Un chef de l'opposition a été mis en prison, en Zambie, après avoir traité à la radio le président Sata de "patate". Le Global Post énumère les insultes qui ont visé récemment des chefs d'Etat du sud du continent africain. Leurs auteurs ont subi un sort divers.

 

 

En Zambie, traiter le président de "patate" peut vous coûter cher. De "patate", oui. Ce qualificatif, apparemment inoffensif, a été utilisé lundi à la radio par un chef de l'opposition pour décrire le président zambien, Michael Sata, ce qui a valu à son auteur d'atterrir en prison pour cause de diffamation. S'il est condamné, Frank Bwalya encourt une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement.

En comparant le président zambien à un tubercule, Frank Bwalya faisait référence à l'expression "chumbu mushololwa" qui désigne en bemba [langue bantoue] une patate douce qui se brise sous la pression. La formule s'applique à des individus têtus et inflexibles qui n'écoutent pas les opinions des autres.

Les partisans de Bwalya estiment qu'il ne s'agit pas d'une insulte mais au contraire "d'une description tout à fait légitime pour parler d'un homme politique effectivement têtu par nature". Quoi qu'il en soit, l'adjectif semble plutôt approprié dans le cas du président Sata, réputé pour ne pas avoir sa langue dans sa poche et dont le style autocratique n'a cessé de se renforcer depuis son élection en 2011.

"Âne boiteux"

Au Zimbabwe, des dizaines de plaintes ont été déposées ces dernières années dans le cadre de la loi criminalisant les insultes au président. Cette loi est souvent utilisée pour harceler et intimider les détracteurs du président Robert Mugabe, qui aura 90 ans le mois prochain. 

Accusé d'avoir comparé le président à un "âne boiteux", le militant d'opposition, Solomon Madzore, a été interpellé en mai dernier. Dans la langue shona, l'expression "dhongi rinokamina" désigne un vieil animal de trait sans plus aucune utilité et qu'il faut mettre à la retraite

En novembre 2013, un tribunal du Zimbabwe a jugé cette "loi anti-insulte" inconstitutionnelle et déclaré que les procureurs ne devaient pas faire d'excès de zèle en inculpant des gens ayant fait des commentaires sur le président Mugabe "dans un contexte social ou alcoolisé". Plusieurs sources locales indiquent toutefois que la loi est encore appliquée. 

"Bushman"

En 2009, dans un poste frontière au Botswana, une touriste sud-africaine avisant le portrait du président du Botswana [‪Seretse Ian Khama‬] déclara qu'il "ressemblait à un Bushman". Et la situation tourna rapidement au vinaigre. Interrogée et contrainte à passer une nuit en prison, la femme ne fut libérée qu'après avoir payé une amende. 

Les Bushmen ou Bochimans – aussi connus sous le nom de San ou Khoï – sont un peuple aborigène d'Afrique australe. Certains vivent encore selon le mode de vie traditionnel des chasseurs-cueilleurs. Ils sont victimes de discriminations et de persécutions au Botswana, et le président Ian Khama  a qualifié leur mode de vie de "fantasme archaïque". 

"Pour un Sud-africain, dire que quelqu'un ressemble à un Bushman est un compliment, mais les responsables botswanais y ont vu une insulte", a expliqué après l'incident le directeur de Survival International, une organisation de défense des droits des indigènes. "Il n'y a pas de meilleure preuve du racisme contre les Bushmen au Botswana". 

"Tjajarag"

En Afrique du Sud, aucune insulte ne vous conduira en prison. Le président Jacob Zuma a été traité de "monstre", de "tyran", d'"illettré" et bien d'autres choses encore. Le roi Aba Thembu l'a même qualifié de "menteur qui n'utilise pas de préservatif". Zuma n'est d'ailleurs pas en reste et a notamment traité le chef de l'opposition parlementaire de "ntombazana", soit "petite fille" en zoulou. 

L'un des plus beaux noms d'oiseaux échangé en Afrique du Sud remonte toutefois à quelques années lorsque Julius Malema, chef de la ligue des jeunes de l'ANC (Congrès national africain) a traité un journaliste de la BBC de "tjajarag". Ce n'est peut-être pas le mot le plus facile à prononcer, mais il est utile pour parler de quelqu'un d'irritant dans le genre excité ou hyperactif. Il se prononce à peu près comme cela : tcha-tcha-raa-ch. Gardez-le dans un coin de votre tête.

 

Erin Conway-Smith

 

Source :   Global Post via Courrier international

 

 

         

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