Ballon d’or : Messi-Cristiano Ronaldo, la plus grande rivalité de l’histoire, mais…

Le Portugais vient de remporter son second Ballon d'or tandis que l'Argentin avait gagné les quatre derniers. Pour clore symboliquement le débat sur la place de leur duel dans l'histoire du foot, il ne leur manque qu'un affrontement au sommet en sélection. Le 13 juillet au Maracana?

 

 

Le Portugais Cristiano Ronaldo a remporté, ce lundi 13 janvier, le deuxième Fifa Ballon d'or (le prix s'appelait encore simplement Ballon d'or la première fois qu'il l'a obtenu, en 2008) de sa carrière, devenant ainsi le dixième joueur à décrocher deux fois la plus prestigieuse distinction individuelle du football. L'attaquant du Real Madrid devance Lionel Messi, son grand rival du FC Barcelone, qui l'avait emporté les quatre dernières années, et Franck Ribéry.

De quoi relancer, à quelques mois de la Coupe du monde au Brésil, l'éternel débat: qui de Messi ou de Cristiano Ronaldo est le meilleur?

 

A l'image du duel Rafael Nadal-Roger Federer en tennis, la question divise les passionnés du ballon rond et n'aura peut-être jamais de réponse définitive. En revanche, cette nouvelle récompense pour Cristiano Ronaldo est l'occasion de se poser une autre question à plusieurs millions d'euros: la course aux trophées, aux récompenses et à la place de meilleur joueur de la planète que se livrent le Portugais et l'Argentin depuis six ans est-elle la plus grande rivalité sportive de l'histoire du football?

Pour faire court, la réponse est oui (mais).

Six podiums du Ballon d'or en commun

Prenons d’abord les récompenses individuelles, et la plus prestigieuse d’entre elles, le Ballon d’or —même si son palmarès est à prendre avec précaution, la récompense étant, jusqu’à 1995, réservée aux joueurs européens, d’où l’absence, notamment, de Pelé et Maradona.

En comptant cette année, Messi et Ronaldo ont gagné à eux deux six trophées. Ils sont montés six fois ensemble sur le podium depuis 2007, année de leur première apparition au palmarès. Seul le podium 2010 (Messi-Iniesta-Xavi, avec Ronaldo seulement sixième) a échappé au duo infernal.

D’autres duos ayant évolué à la même époque se sont partagés un nombre comparable de récompenses, comme Cruyff et Beckenbauer au début des années 1970 (cinq à eux deux) ou Platini et Rummenigge au début de la décennie suivante (cinq Ballons d’or cumulés également). Mais jamais deux joueurs n’avaient été présents en même temps sur autant de podiums (seulement deux fois pour les duos Platini-Rummenigge et Cruyff-Beckenbauer, ou trois pour le duo Di Stefano-Kopa dans les années 50 —mais les deux joueurs évoluaient dans le même club!).

L’étude d’un autre palmarès divergeant parfois avec celui du Ballon d'or, celui du meilleur joueur Fifa de l’année, permet de dégager une autre rivalité, celle entre Zidane et (l'autre) Ronaldo à la fin des années 1990 et au début des années 2000. Ils ont gagné à eux deux six fois cette récompense, qui a fusionné avec le Ballon d’or en 2010, et en ont partagé le podium à quatre reprises.

En club, une rivalité remise en jeu tous les ans

Depuis 2009 et l’arrivée de Cristiano Ronaldo dans la Liga, cette rivalité s'illustre régulièrement sur le terrain. Et il est difficile de trouver un équivalent au duel que se livrent les deux joueurs à travers leurs clubs respectifs, qui ressemble aux multiples saisons d'une série télé.

Le FC Barcelone et le Real Madrid ont squatté les deux premières places du championnat pour le plus clair de ses 80 ans d’existence. Depuis l'été 2009, le Barca a été trois fois champion, le Real une, et à chaque fois la deuxième place était occupée par l’autre géant.

En plus de leurs deux confrontations annuelles en championnat, les deux clubs s’affrontent régulièrement en Supercoupe d’Espagne, en Coupe du Roi, et même en Ligue des Champions, ce qui donne lieu à de très nombreux clasicos —jusqu’à sept en 2011—, des matchs qui sont à chaque fois suivis par des centaines de millions de télespectateurs à travers le monde.

Le fait que les deux plus grands joueurs du monde évoluent dans deux clubs concurrents au sein du même championnat n'est pas une première: c'était par exemple le cas de Platini (Juventus) et Maradona (Naples) au milieu des années 80. Mais les deux joueurs n'étaient alors pas au même stade de leur carrière (Maradona au sommet, Platini entamant un léger déclin qui le conduira à s'arrêter à seulement 31 ans) et ne se sont vraiment affrontés pour le titre que lors d'une seule saison, en 1986-1987.

Zidane (Juventus) et Ronaldo (Inter) ont évolué en Italie entre 1997 et 2001, mais n'ont été eux aussi à la lutte pour le titre que lors de la première saison, avec un affrontement final davantage resté dans les mémoires pour une polémique arbitrale que pour le duel des deux joueurs.

Une rivalité personnelle sans grandes aspérités

En revanche, sur le plan de la rivalité personnelle entre les deux joueurs, le ton baisse d'un cran. Il n’y a jamais eu de haine publiquement affichée entre Messi et Ronaldo, ni d'affrontement physique sur le terrain comme il a pu y en avoir par exemple entre Roy Keane et Patrick Vieira, les deux capitaines de Manchester United et d’Arsenal pendant les années 2000.

Messi a toujours dit qu’il n’avait «pas de relation» particulière avec son rival, «de la même manière qu'[il n'a] pas de relation avec beaucoup d’autres joueurs». «On se voit simplement sur le terrain», avait-il déclaré en août 2012. Officiellement, même son de cloche du côté de Ronaldo, qui a récemment réaffirmé qu’il n’y avait «aucune rivalité» entre eux.

Le sujet, évoqué sans relâche par les médias, est cependant nettement plus sensible du côté du Portugais, qui laisse parfois transpirer un certain agacement. Cette situation est sans doute due en partie au fait que le duel à distance en termes de Ballon d’Or et de titres a tourné à l’avantage de Messi pour le moment.

En sélection, un dul pour du beurre

Paradoxalement, on pourrait avancer qu'il n'y a pas besoin pour deux joueurs de s'affronter souvent pour créer une rivalité (après tout, on parle bien d'une rivalité Pelé-Maradona alors que le second nommé a commencé sa carrière quand le premier la terminait!): l'essentiel est de s'affronter lors de grandes matches. Et notamment des matches de sélections. C'est ce qui explique pourquoi la plupart des grandes rivalités du football opposent des joueurs de nationalité différente: quand les rivaux sont de même nationalité (Gerrard-Lampard, Kahn-Lehmann…), leur affrontement ne se concrétise pas sur le terrain en sélection.

C'est pour l'instant l'autre petite faiblesse de la rivalité Messi-Ronaldo.

Oui, ils s'affrontent souvent en club —bien aidés en cela par la «BigFourisation» du football, qui fait qu'il est aujourd'hui inimaginable de voir une star portugaise ou argentine jouer toute sa carrière dans son pays ou de voir un joueur non issu des quatre grands championnats gagner le Ballon d'or (cela n'est pas arrivé depuis 1991).

Oui, ils se sont affrontés lors de grands matches, comme la finale de Ligue des champions 2009 (dernier match de Ronaldo sous le maillot de Manchester United) ou la demi-finale 2011, qui ont tourné à chaque fois à l'avantage de Messi.

Mais à part ces deux exemples, leur rivalité demeure circonscrite au cadre relativement routinier des compétitions espagnoles. Le match où ils ont le plus brillé simultanément, le clasico d'octobre 2012 (2-2, un doublé chacun) avait pour cadre la septième journée de Liga… Et la rencontre la plus mémorable, une sèche manita infligée par les Barcelonais en novembre 2010.

 

Comme celle entre Platini et Maradona, leur rivalité ne s'est pas étendue au football de sélection. Leur seul affrontement a eu lieu en février 2011 en amical, à l'avantage de l'Argentine (2-1), avec un but chacun, Messi marquant celui de la victoire à la dernière minute sur pénalty.

A l'inverse, Zidane et Ronaldo ont été les deux principaux acteurs de la finale de la Coupe du monde 1998, le premier pour avoir marqué deux buts et le second pour le mystère qui a entouré son état de forme et sa titularisation. Ils se sont encore affrontés huit ans plus tard en quart de finale de la même compétition au cours d’un match survolé par un Zidane en état de grâce.

Beckenbauer et Cruyff, qui s'étaient déjà affrontés en 1973 lors d'un mémorable quart de finale de Coupe d'Europe entre le Bayern et l'Ajax, ont eux aussi eu droit à leur affrontement sur le toit du monde du football en finale du Mondial 1974, avec à la clé un titre pour la Mannschaft du Kaiser, malgré un pénalty obtenu dès la première minute par le numéro 14 néerlandais. Paradoxalement, cette année-là, c'est le perdant de la finale qui avait remporté le Ballon d'or…

Mais nous n'en sommes pas là: pour que Messi et Ronaldo se retrouvent le 13 juillet prochain au Maracana en finale de Coupe du monde —le match le plus regardé au monde—, il faudra déjà que leurs sélections terminent à la même place (première ou deuxième) de leur groupe pour tomber dans deux parties de tableau différentes. Dans le cas contraire, les deux hommes pourraient se retrouver dès les quarts. Or, si l'Argentine dispose d'un groupe assez facile (Nigeria, Bosnie, Iran), le Ballon d'or 2013 devra aider sa sélection à sortir d'un groupe très relevé comprenant le Ghana, l'Allemagne et les Etats-Unis.

 

Grégoire Fleurot et Jean-Marie Pottier

 

Source : Slate

 

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