Mauritanie : les défis 2014 pour Ibrahima Sarr

Le président de l’AJDMR envisagerait de démissionner pour se consacrer entièrement à l’assemblée nationale. Dans cette perspective ce choix n’a pas suscité beaucoup de réactions de la classe politique encore moins la communauté négro mauritanienne.

 

Pour la première fois dans l’histoire du pays un couple mauritanien va se retrouver ensemble dans l’hémicycle. Un double défi pour Ibrahima Sarr qui entend faire de cette tribune une arme efficace pour avancer le débat sur la question nationale en particulier la difficile cohabitation entre les différentes communautés mauritaniennes aggravée par l’absence de volonté politique réelle pour la réconciliation nationale. Le député Ibrahima Sarr aura beaucoup à faire pour l’abrogation de la loi d’amnistie de 93 et l’avancement du règlement du passif humanitaire et la défense des langues nationales.

 Avec une petite liste au départ, l’AJDMR a réussi à faire d’un coup d’essai un coup de maître en décrochant 4 députés au futur parlement et la mairie de Sebkha, l’un des quartiers les plus populaires dans la capitale et ironie du sort abritant aujourd’hui le siège des FLAM dont le président du parti en faisait partie il y a quelques années.

Ibrahim Sarr gagne ainsi son pari. C’est le signe malgré ces modestes moyens que sa belle formule « In wona » c'est-à-dire que c’est possible. Il suffit d’y croire .L’ancien prisonnier de Oualata a eu raison quand il affirme avant les joutes électorales que « le boycott n’est pas une arme efficace ».En tout cas son parti siègera à l’assemblée avec pour la première fois pour le parti et pour l’histoire l’épouse du chef. Un double défi pour le génial trublion qui entend faire de cette haute tribune une caisse de résonance des populations noires victimes de la double fracture sociale qui remonte aux régimes qui se sont succédés au palais de Nouakchott depuis l’indépendance en 1960.C’est surtout la difficile cohabitation des communautés en Mauritanie qui lui tient à cœur avec en toile de fond la réconciliation nationale. Ould Aziz n’a pas seulement ruiné le pays mais il a réussi à diviser les mauritaniens et surtout à mettre en péril le règlement du passif humanitaire. Les évènements de Wothie cette semaine dans le Brakna sont très significatifs à cet égard où des combattants de la liberté de l’IRA ont été violemment agressés par les forces de l’ordre pour avoir organisé une cérémonie de prière en la mémoire de centaines de villageois dans cette localité paisible du Sud de la Mauritanie enterrés dans des fosses communes lors des évènements de 89.Cette répression suscite indignation et des interrogations sur la prière de Kaédi  en 2009 du président  mauritanien pour présenter les excuses de l’Etat. De même la journée nationale de réconciliation nationale perd tout son sens avec toute cette agitation au plus sommet de la nation. Hormis ce devoir de mémoire et cette volonté d’activer le processus de réintégration de tous les déportés, le député Ibrahima Sarr devra fourbir les armes pour relancer l’abrogation de la loi d’amnistie de 1993 en faveur des membres des forces armées et de sécurité auteurs des crimes contre 24 soldats négro mauritaniens entre 89 et 92 enterrés quelque part à Inal dont les sépultures ne sont toujours pas restaurées au grand dam des familles. Il s’agit d’un crime dont les effets se perpétuent encore dans le temps que le nouveau parlementaire  devra manipuler avec précaution en prenant le soin d’examiner le dossier miné des indemnisations des veuves et orphelins. Journaliste, il sait que le fait de payer des compensations financières n’exclut pas aux victimes l’obligation d’enquêter et de poursuivre les criminels Ces derniers sont habilités à poursuivre leurs bourreaux devant la justice nationale ou les juridictions internationales. Depuis des années le père de « Ina wona » s’est imposé comme un des grands leaders négro mauritaniens le plus attentif à la question nationale même si parfois il donne l’impression de donner la main au pouvoir. Il pourrait améliorer la démocratie au sein de la nouvelle assemblée avec des islamistes dominants au plan quantitatif mais pas qualitatif car le défenseur des langues nationales est prêt cette fois-ci à aller jusqu’au bout de ses rêves quitte à rééditer son exploit devant les cadres de l’UPR il y a quelques années à user de sa langue maternelle pour faire avancer les débats linguistiques. Autant de chantiers qui s’ouvrent à lui pour remettre les pendules des vraies revendications populaires en particulier de la communauté noire y compris les Hratins passage obligé pour l’unité nationale et la cohésion sociale.

Bakala Kane{jcomments on}

(Reçu à Kassataya le 07/01/2014)

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