Les médias font dans le « résultats provisoires », mettant en ligne les chiffres qui leur sont fournis par les différents partis qui ont participé aux législatives et municipales du 23 Novembre.
La CENI est seule sur la ligne de front, critiquée par quasiment toute la classe politique, désignée, de façon « humour froid », comme seule « responsable de la transparence du scrutin » par le chef de l'Etat lui même, qui se défaussait ainsi sur cette organisation de la responsabilité de l'appareil d'état en cas de fraudes, irrégularités, retards, pertes d'urnes, disparitions de bulletins, électeurs n'ayant pu voter et, aussi, de l'abstention.
Après la mise en place d'élections compliquées dans leur application concrète ( des dizaines de partis, 4 bulletins à mettre dans 4 urnes différentes, des procès verbaux incomplets ou absents, des problèmes de logistique, d'acheminement des urnes, de transmission des données…), personne ne devrait être étonné de la lenteur de l'annonce des résultats.
4 jours que la Mauritanie retient son souffle et ronge son frein, noyant sa frustration dans les rumeurs, les projections, les on dit, les intox, les hoax, les vrais faux résultats, les guerres d'usure et de nerfs entre les candidats, les annonces, les conférences de presse…
Le président de la République est muré dans un silence qui ne laisse rien filtrer de ce qui se pense et/ou se prépare au plus haut sommet de l'Etat.
La dernière rumeur en date est celle d'une « possible » (?), « probable »(?), « décidée »(?) annulation du vote…
2 choses à peu prés sures : environ 60% des mauritaniens ont voté. Ce qui ferait, si ce chiffre s'avère exact, qu'un mauritanien sur quatre ne s'est pas déplacé, ne s'est pas inscrit, s'est complétement désinteressé du scrutin… Mettre cette abstention sur le fait qu'une partie de l'opposition a appelé au boycott serait réducteur.
Je pense que ces abstentionnistes là sont un mix de toutes nos réalités. Parmi eux des « boycotteurs », mais aussi des gens pour qui la politique et les politiciens ne représentent plus rien, des « découragés », des adeptes du « tous pourris, tous les mêmes », des indifférents…
Ces élections là auront été une suite d'erreurs et d'échecs.
1° échec : celle du gouvenement et de la classe politique que ce taux supposé d'abstention.
2° échec : la foultitude de partis, de candidats, le melting pot entre des Listes dites Nationales et des Listes de Femmes ( particularité bien mauritanienne), des bulletins abscons, difficiles à comprendre pour le citoyen lambda.
3° échec : celle d'une partie de l'opposition qui a décidé de se tenir à l'écart pendant 5 ans de toute vie politique « officielle », loin des centres de prises de décision, laissant le terrain aux partis de la majorité et aux partis de l'opposition non boycottiste, grévant ainsi tout le capital « démocratique » que le gouvernement aurait pu retirer de ces consultations électorales. En boycottant, cette opposition a lancé un message aux électeurs : pourquoi vous déplacer pour voter puisque la « véritable » opposition ne participe pas?
4° échec : la CENI, seule jugée responsable du chaos de notre scène politique et de tous les dysfonctionnements. Et qui semble découvrir qu'entre voeux pieux et réalités, il y a tout un monde chez nous. Et qui , par son silence des premières heures, a offert le dos à toutes les attaques, toutes les accusations.
5° échec : la démocratie elle même, noyée dans les arcanes administratives, phagocytée par des interêts privés, manipulée à l'envie, corvéable et adaptable, jouet malheureux et involontaire d'une autre échéance, celle de la présidentielle de l'an prochain.
6° échec : si les tendances se précisent, l'arrivée en force des islamistes dits modérés. Quand tous les gouvernements islamistes issus des Printemps Arabes ont montré leurs limites, nos islamistes se posent en seule alternative, avec ou sans la bénédiction du pouvoir actuel, prisonnier de sa lutte contre l'extrêmisme des groupes salafistes et en demande d'un « islam soft », plus apaisé, alternative aux djihadistes et à leurs prédications et recrutements…
7° échec : la majorité présidentielle éclatée, l'UPR se trouvant concurrent, au premier tour, de partis dont les candidats sont issus, pour la plupart, de la « maison mère ».
Beaucoup d'amateurisme, beaucoup trop d'improvisations, beaucoup trop de manipulations.
Notre Agence de Presse officielle nous dit que les observateurs étrangers, « garants » du fonctionnement de notre système démocratique, se sont félicités du bon déroulement des scrutins.
Parions que cet optimisme affiché va perdre quelque peu de sa superbe au fur et à mesure que l'annonce officielle des résultats se fera attendre et que du bel enthousiasme du début, nous assisterons à des réactions « embarassées », car comment accorder un blanc seing à nos autorités s'il va falloir quasiment une semaine pour avoir les résultats?
Alors oui nous frôlons le ridicule…: les lendemains qui se dessinent seront tout sauf calmes : au vu des lenteurs et des couacs, des cafouillages et des silences, on peut parier sur des contestations, des crises de nerfs, des empoignades…
Nous frôlons, si nous n'y sommes pas déjà, le ridicule le plus complet…
Mariem mint DERWICH
Le 27/11/2013{jcomments on}
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