Les élections arrivent à grands pas. Dans la grande foire aux dattes que sont ces « consultations » électorales, tout s'imbrique quasiment parfaitement : le RAVEL a terminé ses grandes promenades digestives sous les soleils rageurs qui illuminent tous les coins de notre pays. La CENI a publié les listes des différents concurrents. Les journalistes astiquent moustaches et stylos, les urnes sont bichonnées et polies, l'opposition boycottiste fulmine encore et toujours, la non boycottiste fait dans le caressage du Nous Z'Autres dans le sens du poil, Tawassoul, eh bien Tawassoul, nous explique doctement que le Parti des Verts (pas les écolos, mais les islamistes modérés et politiquement corrects. Quoique on peut être Vert et Vert…Question de nuances de verts) « a décidé d'aller aux élections …nonobstant les réserves sur les conditions de transparence…et sur l'impartialité…du pouvoir » ( dixit le porte parole de nos Verts pas verts comme les autres verts , Mohamed Ould Mohamed M'Bareck)…. Outre que je n'ai pas très bien compris et que cela vous en dit un peu plus sur la derwichette qui « comprend vite mais à qui il faut expliquer lentement », j'admire le tour de passe passe de ces participationnistes là. Remarquez, ça nous promet un bel après élections quand Tawassoul criera à la fraude, à la tromperie, à la manipulation, aux achats de voix, etc., etc….ça sera la variante des futurs meetings…
Le parti au pouvoir est en ordre de bataille. Mais il l'est depuis tellement longtemps déjà, habitué qu'il est à ne pas dire un mot plus haut que l'autre, à attendre les directives de notre sultan, à commenter avec hyperboles les actions de notre chef tout là haut, que ce ne le change pas : il est une jolie armée bien disciplinée. A part, bien sûr, les « raccourcissements » opérés dans la grande tribu de ceux qui se rêvaient députés ou maires, raccourcissements (dans le sens, décapitations) qui ont quelque peu changé la donne et provoqué une grogne certaine dans les rangs de la Grande Muette, alter ego de l'autre Grande Muette, celle des galonnés, qu'est l'UPR. Dans ce dosage si subtil et qui nous est propre entre tribu, tribu et tribu, certains y ont perdu la tête. D'autres en ont récupéré une nouvelle. Certains chefs des toujours mêmes tribus en ont perdu leurs dentiers. Ca a swingué dur..
Nous voilà donc heureux proprios, nous les Nous Z'Autres, de 58 partis qui ont déposé 440 listes. Si on rapporte cette pléthore de partis au nombre d'habitants cela fait classe. 58 partis! Ben dis donc ! Ils sortent d'où tous ces partis? A croire que la Bolitik chez nous c'est comme les invasions de criquets : les larves peuvent attendre longtemps sous le sable les conditions propices à leur éclosion.
Un peu de pluie et hop, les partis éclosent…. la magie de nos terres sablonneuses ou la survie en milieu hostile et franchement dangereux…
Ça va être du sport le jour des élections. Imaginez le nombre de bulletins dans certains centres. Imaginez ( avec un peu d'effort vous pouvez le faire) la tête du Nous Z'Autres qui s'est levé aux aurores, a expédié prière, petit déjà et salutations à la famille, qui a enfourché ses babouches, a mis son beau boubou, à coiffé ses cheveux, qui tient fermement en main sa carte d'identité nouvellement acquise ( pour certains, point de cartes d'identité, ils n'ont pas été enrôlés, perdus qu'il sont dans la schizophrénie d'une administration qui ne sait pas quoi faire de certains de ses concitoyens), qui fait le rang sous le soleil, tuant le temps à jeter des regards discrets sur l'autre file, celle du sexe opposé, soupesant les chances d'une œillade langoureuse et plus si affinités, qui arrive, après moult insolations, devant les bulletins : plein de bulletins, des tonnes de bulletins, avec des noms étranges et exotiques pour quelques uns, des logos parfois farfelus…. Si le pauvre type ne sait pas lire, il peut se tromper : il croit voter, au visage, pour tel dans tel parti, et, au final, il vote pour le même mais pour un autre parti. Le nomadisme étant ce qu'il est chez nous, les politiques nous édifient sur cet art de vivre….
Pour simplifier les choses, il faudrait que ce soit seulement des militaires qui se présentent. Des militaires de grades différents. Nous apprendrions à nos chères têtes brunes ou très brunes à différencier entre les attributs d'un caporal, d'un sergent, d'un « juteux », d'un juteux chef, d'un sous lieutenant, d'un lieutenant, etc. jusqu'aux attributs d'un généralissime 30 étoiles (au moins), et ceux de celui qui aurait décroché le pompom, celui qui est tout là haut, celui serait au moins Amiralissime. Comme ça, le jour des élections, tous les analphabètes de notre république pourraient au moins voter selon le grade. Les petits marrants voteraient pour le serre pattes d'en bas, les plus futés pour l'étoilé.
Le grand Monopoly de la démocratie…
Au lieu de ça on nous pond des partis satellites, inconnus au bataillon, remplis de gens qui ont chanté tous les présidents précédents. On nous sort les mêmes tractations entre religieux, chefs traditionnels et envoyés es spéciaux de la capitale…
Quel manque d'imagination à l'encontre des nous Z'Autres pourtant « rectifiés » et, donc, au fait des coutumes chez nous.
En tous cas, une chose m'attriste : imaginez notre Assemblée Nationale sans des « voix » célèbres, telles que celle de Kadiata Malick Diallo, de Yacoub Ould Moine… Eux qui réveillaient notre parlement ronronnant. Eux qui, même si on n'était pas toujours d'accord, rendaient à notre démocratie ses lettres de noblesse en rappelant que la politique ce n'est pas seulement une caisse de résonnance et des députés aux ordres….
Eux, leurs partis boycottent.
Bref. Je m'en vais vous laisser pour essayer d'apprendre par cœur le nom des 58 partis qui présentent des listes. Comme ça je pourrai me la « péter » dans les diners mondains en déclamant le tube de l'année : « j'électionne, tu électionnes..nous électionnons et ils eurent de nombreux enfants ».
Une pensée à beaucoup de nos compatriotes de la diaspora qui ne voteront pas car s'étant vu refuser le fameux sésame qui les aurait estampillés purs produits des Nous Z'Autres. Au pays tout le monde s'en fout, malheureusement. Qu'ils se consolent comme ils peuvent….Ils éviteront la démocratie à l'usage des ânes…..
Salut
Mariem mint DERWICH
Source : Le Calame
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