Le 11 septembre, le Pouvoir et les barbus et les islamistes

Depuis l’avènement du 11 septembre 2001, tout ne sa passe pas bien entre le Pouvoir et les islamistes et autres barbus.

Avant la reconnaissance en 2005 de leur parti Tewassoul, et précisément depuis les années 90, les islamistes mauritaniens ont toujours servi d’exutoire à un pouvoir qui les a toujours utilisés pour exorciser ses propres démons.

En 1994, dans la foulée de la répression qui s’était abattue sur les mouvements nationalistes arabes, après la bévue diplomatique de la première guerre du Golfe qui avait vu la Mauritanie payer les frais d’un soutien irréfléchi à l’Irak de Saddam Hussein, une poignée de personnes épinglées comme islamistes fut arrêtée. On parla alors d’un dangereux réseau qui planifiait la déstabilisation de l’Etat, avec entraînement intensif aux alentours de Nouakchott, arsenal militaire impressionnant, recrutement de mercenaires. Puis on assista à la mise en scène que l’on connaît. Des aveux télévisés. Rideau. Pas de procès. On démonta les planches et les acteurs retournèrent à leur monde réel. Les islamistes continuèrent leur prêche dans les mosquées, les Ikhouwans et les Douât, leurs randonnées spirituelles et les tortionnaires de services s’occupèrent d’autres proies. Jusqu’à la fin des années 90, ils continueront à faire valoir leur parole utilisant les partis politiques reconnus par l’Etat. Leur engagement dans l’opposition leur permettra de gravir des échelons. Rapidement, leur base devait s’élargir. Détenant les moyens (financiers, matériels et moraux) de leur politique, ils finiront par occuper de hauts postes de décision au sein des partis de l’opposition, notamment de l’UFD/EN de l’époque.

 

11 septembre
Le 11 septembre 2001, l’Amérique se réveille sur une hécatombe. Les néo-conservateurs éclairés de la Maison Blanche qui ne jurent que par la suprématie de leur confession, décrétèrent une guerre contre le terrorisme. Est pointé du doigt l’islamisme engagé. Pourtant, beaucoup d’enquêtes ont révélé que ni Al Qaïda, ni Saddam, encore moins le fondamentalisme islamique n’avaient rien à voir avec les évènements du 11 septembre. Qu’importe, les adeptes du nouveau confucianisme buschien avaient un plan en tête à exécuter. Il s’agissait de contrôler ce Moyen-Orient, d’aller à la source de l’énergie pétrolière, de redessiner les contours d’une région, où l’allié Israël devra pouvoir jouer un rôle de gendarme aguerri et omnipotent du nouvel espace colonial. La guerre contre le terrorisme sera planifiée dans ses moindres détails, des pays ciblés, des fortunes qui auraient pu assurer le bien-être mondial par la culture de la paix, serviront à développer les foyers de tension et à planifier une nouvelle vision du monde, telle que tracée par les faucons de Washington. Le monde sera ainsi divisé en bons et méchants. Sont bons, tous les amis de l’Amérique, ceux qui lutteront dans leur propre pays contre le terrorisme. S’il n’existe pas, qu’ils l’inventent. Sinon, ils feront partie des méchants, l’axe du Mal. Toute une philosophie religieuse dont la messe se dit chaque matin à la Maison Blanche.

 

Zèle
La Mauritanie, piquée par on ne sait quelle mouche, brûle les étapes, dans sa ferveur à se coucher sous les pieds de l’Amérique. Elle scelle un amour coupable avec Judas. Son ministre des Affaires Etrangères, M.Ahmed Ould Mohamed, porteur d’un message de Ould Taya, scelle avec Margret Olbraight à Madrid, des relations diplomatiques, qui seront d’autant plus décriées à l’intérieur qu’à l’extérieur, que la Mauritanie devait être le dernier point du globe à reconnaître Israël. Feu Mokhtar Ould Daddah, fondateur de la République islamique de Mauritanie et ennemi juré d’Israël, en retourna dans sa tombe.

Naturellement, pour sceller un tel pacte, et engranger les énormes fonds que l’Amérique mettait dans la cause terroriste, on sollicita de nouveau nos barbus. On arrêta ici et là, quelques personnalités religieuses qui pourraient faire vrai, Ould Deddew, quelques agitateurs politico-islamistes comme Jemil Mansour et l’ex-ambassadeur Ould Mohamed Moussa, des truffions à la barbe bien fournie et aux langues bien rodées dans la critique d’Israël et l’Amérique. Le choix était assez vaste puisque tous les Imams excellaient dans l’art de vouer aux gémonies ces deux entités. Arriva le 8 juin 2003. Les prisons sont vidées par les putschistes.

Dès le retour à la normale, les « islamistes-terroristes » qui avaient là une bonne occasion de prendre la poudre d’escampette, comme Jemil Mansour, regagnèrent de leur propre gré leurs cellules. Affublés de tous les attributs et présentés comme de dangereux criminel ayant planifié des assassinats, des sabotages, on les libère en catimini. Liberté provisoire. Pas de preuves. Pas de procès.

Certains, les Réformateurs centristes, s’essayeront en politique. Ils se regrouperont autour de l’ambassadeur Ould Mohamed Moussa et Jemil Ould Mensour pour la création d’un parti politique. Au passage, ils feront remarquer que les autorités des pays limitrophes ont toutes reconnu et accepté la création de partis islamistes. Et quand on sait que la formation politique en gestation en Mauritanie se réclamait de l’islamisme modéré, il ne devrait pas y avoir d’obstacle à sa reconnaissance, pensaient-ils. Mal leur en fut, parce que comme Ould Taya, Ely Ould Mohamed Vall refusait cette reconnaissance, soutenant en substance qu’il n’y avait pas de raison d’être pour un parti islamiste dans un pays entièrement islamique ! Au même moment, les autorités reprenaient leur guerre contre les groupuscules islamiques. On les repêchera derechef et ré embastillés pour un autre martyrium au service de la raison d’Etat. Finalement, le Ciel en aura marre et le planificateur en chef de toute cette hérésie fut bouté hors du palais présidentiel. Ely prit sa place. Les Cavaliers du Changement, puis quelques ténors islamistes, dont Ould Deddew, furent libérés. Malgré tout, les geôles mauritaniennes semblent ne jamais vouloir se reposer sans leurs contingents de présumés terroristes. Le problème, c’est que depuis que la Mauritanie a décrété la guerre contre les islamistes, jamais les autorités n’ont pu organiser un seul procès, pour convaincre l’opinion de la validité des charges retenues contre eux.

Scission
Arriva le président Sidioca. L’homme était soupçonné d’avoir une sympathie particulière pour les Islamistes. Mais cet « amour » devait vite s’estomper. En décembre 2007, cinq touristes français sont froidement exécutés à Aleg. La ligne était nette entre les islamistes, hommes politiques, pacifiste de Tewassoul et des groupes de jeunes « égarés » qui prêchaient le jihad. A Aleg, la signature était claire : l’acte provenait d’extrémistes. Et très tôt, on découvrit qu’il s’agissait d’un groupe naissant, la branche maghrébine d’Al Qaïda. Cet assassinat des touristes avait marqué un tournant dans l’Histoire de la Mauritanie. Depuis, la branche maghrébine d’Al-Qaïda a multiplié les attaques meurtrières ainsi que les enlèvements d’Occidentaux dans le pays. Après avoir fui le pays, ils seront par la suite découverts et définitivement arrêtés. Il a fallu pour cela que le Pouvoir de Nouakchott leur livre une guerre farouche aussi bien hors du pays qu’à l’intérieur du pays. On se rappelle encore de la fusillade de 2008 au quartier de Tevragh Zeina qui a fait une dizaine de morts dont un officier de police. Lors du procès intenté plus tard contre eux, sept d’entre eux se verront condamnés à la peine de mort-Qaïda, pour l’assassinat de quatre Français en 2007. En 2010, le Pouvoir de Nouakchott engage un dialogue avec eux amenant certains au repentir. Ces derniers seront libérés alors que les autres « qui avaient refusé tout pacte », seront maintenus en prison avant d’être extraits de leur cellule et placés depuis dans une prison inconnue. Pendant tout ce temps, les islamistes de Tewassoul s’étaient mieux organisé, participant à l’ensemble des échéances électorales. Lors des dernières législatives et des municipales, ils parviendront à décrocher des postes de députés et plusieurs mairies à l’intérieur du pays et aussi à Nouakchott. Dans leur lancée, ils profiteront de la libéralisation des médias pour obtenir une licence TV qu’ils exploitent depuis avec la chaine « Mourabitounes ». En parfaits politiques, les Islamistes ne font entièrement plus peur. Au contraire… ils sont parvenus, grâce à leur discours mais aussi à leurs actions de bienfaisance, à entrainer vers eux, un nombre impressionnant de citoyens. En témoignent les grosses foules qui assistent à leurs meetings et autres réunions ou marches. Nonobstant cette popularité, les Islamistes sont toujours demeurés flous aux yeux d’observateurs avertis. Maniant aussi bien le « bâton » que « la carotte », soufflant merveilleusement bien le « chaud et le froid », ils sont difficile à situer. Aujourd’hui que l’on célèbre le triste anniversaire du 11 septembre, les Islamistes, devenus des acteurs incontournables dans la prise de décision en Mauritanie, n’en demeurent pas moins flous.

JOB

Source  :  L'Authentique le 11/09/2013{jcomments on}

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