Manifestation contre les violences envers les femmes en Mauritanie

(Crédit photo : Bakary Guèye / Magharebia)

La Mauritanie a nommé le 21 avril Irabiha Mint Abdel Weddoud première femme à la tête de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH).

Cette nomination est due en partie à l’appel lancé par les organisations de la société civile à propos des violences commises envers les femmes.

Un peu plus de quinze jours avant la nomination de la nouvelle présidente de la CHDH, des milliers de personnes avaient manifesté à Nouakchott pour demander justice pour Penda Sogué, âgée de 20 ans.

La jeune femme avait été violée et mutilée avant d’être assassinée.

Lors de cette manifestation du 3 avril, les femmes avaient scandé « Tuez les violeurs ! ». La mère de Soghé avait par la suite envoyé une lettre aux responsables du ministère de l’Intérieur au nom des manifestantes.

L’assassinat brutal de cette jeune femme le 28 mars a suscité un grand émoi chez les Mauritaniens.

« Nous avons toutes été choquées », a déclaré Aminetou Mint El Moktar, présidente de l’Association des femmes chefs de famille (AFCF). « C’est la première fois que notre pays connaît un viol suivi d’un tel déchaînement de sauvagerie. »

« Nous ne pouvons ignorer ce meurtre sans le marquer d’une manière ou d’une autre : nous sommes rassemblées pour dire que cela ne doit plus jamais se reproduire dans ce pays. La justice doit se prononcer, et la sanction devra être exemplaire pour tous », a-t-elle ajouté.

« L’assassinat barbare » de cette jeune femme a été un appel à l’action, a expliqué Mariem Mint Derwich, journaliste au Calame.

Les femmes de Mauritanie et d’ailleurs sont « les premières victimes de l’insécurité, les premières victimes dans la société, les premières victimes de la violence », a-t-elle ajouté.

« Ce meurtre sauvage doit nous rappeler certaines choses… la violence contre les femmes est une réalité quotidienne sordide », a ajouté Mint Derwich.

L’AFCF a indiqué que 4 732 femmes avaient été violées en 2012, a-t-elle souligné, avant de demander : « Combien d’autres actes ont-ils été passés sous silence et cachés ? »

« Nos sociétés ont toujours préféré l’hypocrisie des fausses valeurs morales et la préservation de l’ordre social, familial et/ou tribal à leur dénonciation », a-t-elle expliqué à Magahrebia.

« Les autorités y ont contribué en suscitant la confusion entre la sharia et le statut des femmes, en estompant tranquillement les distinctions entre tradition et religion, et en sanctionnant de manière honteuse des comportements abominables sans aucun scrupule », a-t-elle ajouté. Le Code du statut des personnes en a été un exemple, a souligné cette journaliste.

« La loi mauritanienne interdit le mariage des femmes de moins de 18 ans, mais par un tour de passe-passe, elle autorise le mariage d’une mineure à l’entière discrétion de son tuteur légal », explique-t-elle.

L’ONG « Adama » s’indigne de l’augmentation du nombre de crimes sexuels, notamment des viols d’enfants.

Cette organisation appelle également à une interdiction des films pornographiques, dont elle affirme qu’ils encouragent les jeunes à franchir le pas entre fiction et réalité.

« La Mauritanie dans son ensemble doit se réveiller et mettre fin à la violence sous toutes ses formes, notamment contre nos soeurs, nos cousines, nos femmes, nos filles et nos mères », explique Amadou Kide, habitant de Nouakchott.

« Notre religion islamique protège les femmes, sans distinction de race ou d’ethnie », ajoute-t-il.

Le 8 mars, les associations de femmes ont présenté aux autorités mauritaniennes un projet de loi destiné à prévenir les violences basées sur le genre.

Cette proposition est encore à l’étude, mais les ONG estiment que le cas de Penda Sogué pourrait inciter les autorités à passer à l’action.

Pour sa part, le gouvernement a lancé une campagne de police à grande échelle pour lutter contre le crime.

Selon le programme sécuritaire du Conseil supérieur de défense, la gendarmerie nationale a déployé des unités supplémentaires dans Nouakchott.

Un couvre-feu a également été instauré dans les quartiers à haut risque de Toujinine, Arafat et Dar-Naim.

Bakari Guèye

Source  :  Magharebia le 28/04/2013{jcomments on}

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