La Mauritanie se repositionne dans le jeu malien

Le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz La Mauritanie pourrait envoyer 1800 hommes au Mali dans le cadre de l’Onu, a confirmé jeudi Laurent Fabius, le chef de la diplomatie française, à la suite de sa visite lundi à Nouakchott. Le chef d’Etat mauritanien Mouhamed Ould Abdel Aziz qui s’était jusqu’à présent mis en retrait du conflit tente de se repositionner dans le dossier malien.

La crise malienne, il avait refusé de s’en mêler. Il a fallu un an après qu’elle ait vu le jour pour qu’il décide de s’impliquer dans le gouffre malien. Depuis mars dernier, Mouhamed Ould Abdel Aziz a lâché du lest vis-à-vis du Mali, affirmant lors d’une conférence de presse donnée avec son homologue nigérien Mouhamoudou Issoufou que son pays était prêt à intervenir sous mandat onusien. Une annonce confirmée jeudi par Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères, qui s’est rendu lundi à Nouakchott, où il s’est entretenu avec le président mauritanien.

La Mauritanie serait ainsi prête à déployer 1800 hommes au Mali toujours dans le cadre de l’Onu. Le pays n’avait jusque-là pas levé le petit doigt pour son voisin, hormis la sécurisation de ses frontières communes, 2500 kilomètres de désert, afin d’éviter toute entrée des groupes terroristes sur son territoire. Une stratégie loin d’être anodine pour Nouakchott qui craignait aussi des représailles de ces mouvements armés à son encontre.

Retournement de situation

Il y a encore quelques mois, rien ne présageait ce changement de position de Mouhamed Ould Abdel Aziz qui avait été un peu plus clair début août 2012 : « La Mauritanie n’interviendra pas militairement au Mali », estimant que « le problème malien est complexe et que son pays n’en possède pas la solution. » Il avait notamment soutenu que, « la solution doit passer d’abord par la mise en place au Mali d’un gouvernement fort et représentatif de toutes ses forces politiques avant d’engager une action contre le risque terroriste qui va grandissant et qui peut constituer une catastrophe pour le monde entier. »

Le chef d’Etat mauritanien n’avait également pas manquer de rappeler les efforts que son pays fournissait dans la lutte contre le terrorisme contrairement à Bamako qui, d’après lui, n’a pas mené à bien cette mission. « Nous avons vu venir ce problème, nous l’avons alors dit et l’histoire nous a donné raison », selon le dirigeant, précisant la portée de l’intervention de son armée ces dernières années contre les « bandes criminelles qui nous menaçaient depuis le nord de ce pays voisin ».

Relations diplomatiques houleuses

Les relations entre les deux pays n’étaient plus au fixe. Et ceci bien avant l’éclatement de la crise malienne. Ces dernières années Mouhamed Ould Abdel Aziz était particulièrement en froid avec son « frère » Amadou Toumani Touré, renversé en mars 2012 par le capitaine Amadou Sanogo. Les deux responsables n’étaient pas sur la même longueur d’ondes dans la lutte contre le terrorisme dans le Sahel. Alors que le dirigeant malien a permis aux groupes armés en provenance de la Libye après la chute de Kadhafi de s’installer dans le nord-Mali. Son homologue mauritanien, lui, leur a fermé toutes les portes d’entrée sur son sol. Ce dernier accusait régulièrement le chef d’Etat malien d’être notamment trop laïciste vis-à-vis d’Al-Qaïda au Maghreb islamque (AQMI) qui a pour but de faire du Sahel son sanctuaire.

La libération par Bamako en février 2010 de l’otage français Pierre Camatte, qui avait été capturé en novembre 2009 par le défunt émir d’Aqmi, Abou Zeid, a aussi été source de tensions entre Bamako et Nouakchott. La Mauritanie comme l’Algérie n’avaient pas caché leur colère contre ATT. C’est en effet bien le président malien qui avait pris la décision de libérer quatre terroristes arrêtés en avril 2009 à Kidal dans le nord du pays pour détention d’armes de guerre en échange de la libération de Pierre Camatte. Les jours de ce dernier étaient comptés, puisque Abou Zeid menaçait de l’exécuter si ses revendications n’étaient pas satisfaites.

Pour justifier la mise en liberté dans la nuit du dimanche 21 au lundi 22 février des prisonniers, Bamako argue qu’ils avaient déjà « purgé leur peine de neuf mois » de prison pendant leur détention provisoire, mettant à mal la coordination avec ses deux pays voisins dans la lutte contre le terrorisme, dans la région. ATT avait alors affirmé : « Après une brouille, Il est plus facile de se réconcilier avec ses frères ( Nouackchott et Alger) qu’avec un ami (Paris) ».

« Médecin après la mort »

Un fâcheux épisode bien loin derrière le président mauritanien, qui tente désormais de reprendre ses marques dans le dossier malien. Il sait que les risques que son pays prend en s’engageant dans le conflit sont moindres, puisque une partie des groupes terroristes ont été éliminés. D’autant que les troupes mauritaniennes seront totalement prises en charge par l’Onu, qui avait réclamé l’aide de l’Etat mauritanien. Ce qui constitue un véritable avantage confie un officier mauritanien à RFI.

A Bamako, l’annonce du déploiement des soldats mauritaniens n’a pas été accueillie avec enthousiasme. Pour beaucoup, Nouakchott arrive bien après la tempête. Un peu « comme un médecin après la mort », selon certains médias locaux. Le pays, qui ne fait pas partie de la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), avait été vivement critiqué pour ne pas avoir davantage soutenu le Mali.

De son côté, Mouhamed Ould Abdel Aziz tente de tirer son épingle du jeu dans la crise malienne, loin d’être réglée. Il sait que les groupes armés terroristes guettent toujours son pays.

 

Assanatou Baldé

 

Source: Afrik.com

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