Révélations sur la nature d’une vraie fausse performance fiscale

(Crédit photo : anonyme)

Les douanes mauritaniennes viennent d’organiser le 26/1/2013 au Port de l’Amitié la cérémonie, à l’occasion de leur journée internationale, de mise en œuvre du premier scanner à containers, offert aux douanes mauritaniennes par la société suisse SGS leader mondial dans les domaines du contrôle, de l’inspection et de la certification des marchandises.

Plusieurs personnalités civiles et militaires, le corps diplomatique et les opérateurs économiques, ont assisté à cette cérémonie présidée par le ministre des finances. Cet évènement et les annonces faites par la douane sur son rendement, précédé la semaine d’avant par une bonne présentation des résultats annuels des Impôt, ont constitué une raison opportune d’analyser la situation du faible rendement de la douane (118 milliards UM) par rapport à celui, plus important, des impôts (133 milliards) qui traditionnellement ne réalisent que les 2/3 du rendement de la douane !

Rien pourtant ne justifie ce recul des rendements de la douane en dépit de la bonne situation économique du pays et eu égard surtout, à la batterie d’avantages dont elle dispose pour remplir sa mission :

  • La douane possède une totale garantie de recettes car, elle détient la marchandise comme garantie des droits, alors que les impôts ne possèdent qu’un simple système déclaratif des contribuables.
  • La douane dispose d’un important dispositif de services et d’un effectif double de celui des impôts.
  • La douane utilise le meilleur et le premier système informatique en Mauritanie, alors que les impôts sont toujours en gestion manuelle de leurs procédures.
  • La douane bénéficie surtout des services du fameux programme de vérification des importations, qui semble avoir fait ses preuves partout ailleurs (s’il est bien utilisé).
  • Enfin, la douane est dirigé par un Directeur Général que l’opinion considère comme assez intègre, mais qui semble cependant assez maladroit et surtout, très handicapé par le manque des compétences requises pour gérer une administration aussi technique que la douane.

En effet au cours de son discours auto élogieux, le DG des Douanes, a fait l’annonce d’une bonne progression en 2012, comparée curieusement avec l’année 2009 et pas avec l’année normale de référence, c’est-à-dire 2011!

Pour ce taux de progression annoncé pour 2012, il s’agit clairement d’un cumul de taux des trois derniers exercices (2010, 2011 et 2012) et non d’un taux de progression annuel. Ensuite, pourquoi choisir l’année 2009 ; L’année du rendement le plus faible de toute l’histoire des recettes (-7,56%) et la comparer avec 2012 pour afficher un taux de croissance plus élève que le taux réel de 2012 (21,44%) qui est d’ailleurs plus faible que celui de l’année précédente 2011 (23,02%). Voir tableau.

A priori, ce discours soutenu par des chiffres, suscite l’admiration, mais aussi, comporte des erreurs et des contradictions flagrantes qui méritent, d’être clarifiées dans le but de permettre aux hautes autorités et à l’opinion publique d’apprécier ces annonces à travers une source neutre.

Il faut d’abord préciser que les recettes douanières, indépendamment de tous les changements de Directeurs, ont régulièrement connu des progressions annuelles significatives, comme le prouve le tableau ci-dessous reproduisant fidèlement les chiffres publiquement annoncées et publiés :

Année Revenus en milliards % Augmentation

 

2002 26,33 22,71        
2003 29,00 9,22        
2004 36,61 20,78        
2005 42,54 13,94        
2006 53,13 19,93        
2007 65,02 18,28        
2008 71,61 9,21        
2009 66,58 -7,56        
2010 71,84 7,33        
2011 93,33 23,02        
2012 118,80 21,44

On constate en effet, à travers ces chiffres, que les recettes douanières, ont depuis 2002, enregistré des progressions annuelles moyennes de l’ordre de 19% malgré d’ailleurs, tout ce qu’on pouvait à l’époque, reprocher a la gestion du pays. Cette tendance s’est toujours maintenue, sauf pour 2003 (année de crise politique et monétaire) mais aussi et très curieusement pour les années 2008, 2009 et 2010 qui ont connues de manière constante, les taux de croissance les plus faibles jamais enregistrés ; soit respectivement, 9.21%, -7,56% (négative) et 7,33%.

Faute donc de pouvoir auto-améliorer ces propres recettes, la douane a du attendre 2011, avant de pouvoir se relever pour revenir à sa performance habituelle, qu’elle avait perdu les trois dernières années. Cette reprise s’est faite, uniquement à la faveur des importantes reformes engagées sur tous les plans par le président MOHAMED OULD ABDEL AZIZ.

Fortement soutenues par une volonté de transparence et de rigueur, ces reformes ont eu pour effet, l’explosion sans précédant des recettes et plus particulièrement celles des douanes, qui ont pu bénéficier d’une part, des fortes augmentations des valeurs et des volumes des marchandises importées. Cette bonne situation à partir de 2011 est confirmée à la fois par le rapport officiel du FMI n° 12/99 du 16/08/2012 (voir site public du FMI), qui parle d’une croissance combinée de 39,12% des importations et de 52% des exportations; et par les statistiques neutres du Port Autonome de Nouakchott, qui parlent, elles aussi, d’une importante croissance des importations de l’ordre de 27,22%. D’autre part, d’un ensemble de facteurs externes au champ d’action des douanes. Ces facteurs qui sont induits par le développement économique, monétaire, politique et social du pays, ont contribué, directement ou indirectement, à la création de nouvelles sources de recettes qui viennent s’ajouter au potentiel existant. Ces nouvelles sources de recettes se sont concrétisés par :

1) La forte croissance économique du pays en général et du secteur de l’import/export en particulier, qui concerne directement le rendement de la douane : augmentation appréciable des quantités et des valeurs des marchandises de l’ordre de 39% (sources : toutes statistiques officielles) ; l’émergence de nouveaux secteurs d’activités commerciales et économiques à très grand rendement fiscal. (télécommunications, équipements des BTP, produits des supers marchés, etc).

2) La hausse des prix internationaux, en particulier des denrées alimentaires, ce qui a augmenté l’assiette fiscale, qui est la base de calcul des droits et des taxes de la douane.

3) La montée du taux du dollar et de l’euro par rapport à l’ouguiya. la forte parité de ces deux monnaies, qui constituent l’essentiel de la base de facturation des biens achetés par la Mauritanie, a gonflé les valeurs de dédouanement. L’effet néfaste de cette mauvaise situation sur le pouvoir d’achat des citoyens, a été heureusement maitrisé grâce à une politique de régulation monétaire et de subvention des prix à la consommation au profit des populations vulnérables (Programme EMEL 2012).

4) L’importante augmentation des importations des hydrocarbures.

5) Le changement du régime fiscal des sociétés minières : la SNIM et ses filiales ainsi que TASIAST, MCM et leurs sous traitants, qui sont passés sous AZIZ du régime d’exonération totale à celui du paiement des droits.

6) L’ouverture d’une nouvelle route d’importation des marchandises en provenance de l’Europe via le Maroc ou du Maroc lui-même.

7) La recette fictive du crédit d’impôt des marchés publics, comptabilisée par la douane et supporté par l’Etat à la place des opérateurs publics et privés.

En somme, la douane contrairement aux impôts, n’a visiblement pas réalisé un bon rendement, qui soit surtout à la mesure des grandes opportunités qui lui ont été offertes. Et si, nous considérons la part de ses recettes, directement liées à l’élargissement de son assiette fiscale, la progression annoncée, serait négative car, il est établi qu’il n’y a pas eu, depuis quelque années, de véritables améliorations (internes) de recettes, mais plutôt un simple gonflement des résultats sans le moindre effort de récupération des manques à gagner en matière de recettes douanières.

Pour apprécier, les performances d’une administration comme celle des douanes ou celle des impôts, il faut plutôt la juger à travers des résultats mettant en évidence ses propres capacités à la fois, de réduire le manque à gagner résultant de la gestion des années antérieures et de faire profiter le Trésor public des bonnes performances économiques du pays. Il ne s’agit donc pas d’afficher en apparence et sans efforts internes des performances engendrées par des facteurs externes, et continuer ainsi à cacher les énormes et eternels manques à gagner au Trésor Public.

Source  :  Mourassiloun via Adrar Info le 24/02/2013{jcomments on}

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