Ahmedou Ould Abdallah dénonce « …l’utilisation délibérée de la puissance publique … »

(Archives : Ahmed ould Abdallah le 13 09 2012. Crédit photo : Kassataya)

Ahmedou Ould Abdallah n’est plus à présenter en Mauritanie. Plusieurs fois ministre, ancien ambassadeur de la Mauritanie et ancien haut fonctionnaire onusien, l’homme a décidé depuis quelques années de revenir au pays et de s’y installer.

Ce n’est pas carrément une retraite, dans la mesure où il continue de souvent voyager dans les différents continents pour répondre aux invitations nombreuses des centres d’études et de réflexion sur les affaires du monde, les thinks-tanks, les réunions de haut niveau sur tel ou tel problème, conflit, les séminaires, les tables rondes et les simples invitations de la presse internationale, francophone et anglophone, pour recueillir ses analyses sur les différents thèmes qui agitent le monde…
Après son retour au pays natal, Ould Abdallah a lancé un centre, basé à Nouakchott : Centre des Stratégies pour la Sécurité Sahel Sahara (C4S). A son actif, plusieurs réunions internationales (Dakar, Tunis…) sur la sécurité et sur le développement dans la zone sahélo-saharienne gouvernement de ce pays et un think tank américain.
En ce début d’année 2013 et à l’issue d’un long voyage à l’étranger, Ahmedou Ould Abdallah a accepté de répondre aux questions de notre journal, Biladi, sur ce qui fait l’actualité chez nous, l’affaire Ould Bouamatou, et dans notre voisinage immédiat, la crise au Mali.

Biladi : Commençons par la Mauritanie, qu’est-ce qui vous a frappé depuis votre récent retour à Nouakchott ?

Ahmedou Ould Abdallah (AOA) : Je me suis imposé une ligne de conduite simple par rapport aux événements qui se déroulent dans notre pays, pour intervenir uniquement sur les grands thèmes nationaux, ces dossiers qui peuvent constituer une menace pour le présent et le futur. L’affaire dite Ould Bouamatou, dans certains de ses aspects, fait partie de ses dossiers.
Biladi : Un soutien, donc, à Bouamatou ?
A.O.A : Cela n’est pas l’objectif des mes propos, même si l’homme doit être respecté, en particulier, pour son ardeur au travail. Le fait est que j’estime, en effet, que chaque citoyen doit s’acquitter convenablement de ses impôts. Particulièrement les opérateurs économiques, pour la simple raison que l’Etat vit de la collecte de ses impôts. Mais ce qui interpelle dans cette affaire, c’est plutôt l’utilisation délibérée de la puissance publique pour s’attaquer à des fondements essentiels de tout Etat moderne et démocratique : la justice et l’équité.

Bialdi : Que veut dire ça, excellence, de manière plus claire ?

A.O.A : C’est simple. L’ordre apparemment donné à certains établissements ou entreprises publics de retirer, simultanément, leurs avoirs à la Générale des Banques de Mauritanie(GBM) constitue une menace actuelle et future pour tous. Ce genre d’agissements mine la confiance dans tout système légal et économique d’un pays. A terme, il peut en provoquer l’écroulement, ce qui, naturellement, est mauvais pour tous.
Sur un autre plan, un pays, comme le notre, n’a aucun intérêt à faire fuir les investisseurs étrangers, milieux dans lesquels l’information circule presque instantanément. C’est ce qu’il faut craindre par rapport au contentieux entre la direction des impôts et BSA Ciment, dont 65% des parts sont détenues par le groupe étranger bien connu, Vicat.

Bialdi : Par rapport à la crise malienne, comment vous voyez ses derniers développements ?

A.O.A : Vous savez que j’ai toujours été réservé face à une action militaire extérieure avant la conclusion d’un accord politique négocié entre maliens. Je préconisai plutôt la négociation afin d’aboutir à une solution juste et durable de ce problème récurrent du nord Mali. Dans mon esprit, une intervention armée doit venir conforter un accord politique. Autrement, elle peut contribuer, en effet, à créer des malentendus entre les nationaux et entre eux et leurs amis extérieurs. Chacun se demandant : en faveur de qui s’est-elle faite ?

Biladi : Et Maintenant ?

A.O.A : L’intervention française a constitué une riposte rapide à la violation d’un statu quo. Saluée par tous, elle a changé la donne sur le terrain en mettant fin à l’occupation des régions septentrionales du Mali par les différents groupes de radicaux et narcotrafiquants qui les contrôlaient depuis la chute d’Amadou Toumani Touré. Cependant, le problème de la gestion des populations du nord demeure entier. Un problème qui attend une solution durable.

Biladi : Et la Mauritanie dans tout ça ?

A.O.A : J’estime que la Mauritanie ne peut rester ni neutre ni spectatrice. Depuis une dizaine d’années, elle a beaucoup investi, en hommes, équipements, temps et énergie dans la crise malienne pour ne pas participer, aujourd’hui et demain, au nouvel effort consenti par la communauté internationale au Mali.
En dehors des droits et devoirs liés aux politiques de bon voisinage, une participation effective à l’effort international, donnera l’opportunité de peser dans la solution future. Une aspiration d’autant plus légitime que notre pays abrite le plus grand contingent des réfugiés maliens et que notre sécurité est menacée. En plus des liens humains séculaires qui nous lient en particulier à cette partie du Mali, pays avec lequel nous avons une frontière commune de 2200 km de long.

Propos recueillis par Moussa Ould Hamed

Source  :  Biladi le 10/02/2013{jcomments on}

Diffusion partielle ou totale interdite sans la mention : Source : www.kassataya.com

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page