Côte d’Ivoire : Le Fpi se réconcilie-t-il avec la France ?

(Crédit photo : Macaire DAGRY)

« Profondément attaché au caractère laïc, démocratique et à la souveraineté des Etats africains, le Front populaire ivoirien (Fpi) – parti démocratique par essence – ne saurait accepter la naissance d’un Etat théocratique et terroriste aux frontières de la Côte d’Ivoire.

C’est pourquoi, le Front populaire ivoirien approuve pleinement toute initiative visant à freiner l’avancée des djihadistes ; salue la décision courageuse du Président français, François Hollande, d’agir dans l’urgence, dans la mesure où il s’agit de lutter contre le terrorisme et l’obscurantisme ». Ces propos sont signés du Dr Kodjo Richard, secrétaire général par intérim et porte-parole du Fpi. On aurait vraiment souhaité l’avoir à la tête de ce parti politique entre 2002 et 2011. Peut-être qu’il aurait eu un autre destin.

Depuis l’accession du Fpi au pouvoir en 2000, pour des raisons, sans doute, de positionnement stratégique électoral sur l’échiquier politique ivoirien, la France a été la principale cible de ce parti en quête de légitimité, tant au niveau national qu’africain. Il est inutile de rappeler ici quelques-unes de ses prises de positions envers la France et les Français et qui ont conduit à des drames et choqué l’opinion internationale. Aujourd’hui, le contexte politique est différent. Les acteurs ne sont plus les mêmes. Les enjeux sont considérablement redéfinis en fonction des rapports de force du moment et des moyens dont dispose chaque acteur pour s’imposer politiquement. Ce n’est un secret pour personne, en politique, les prises de positions et déclarations du moment ne seront pas forcément les mêmes demain, et encore moins semblables à celles d’hier. Dans ces conditions, on peut comprendre aisément les récentes déclarations du FPI à propos de l’intervention militaire française au Mali. Sa nouvelle stratégie de positionnement et de communication politique, montre une évolution, visant à gagner en crédibilité au niveau de l’opinion internationale. En dehors de la surprise qu’elle peut susciter, au regard des récents rapports de force tumultueux entre ce parti et la France, c’est toute une redéfinition pour ne pas dire, une « refondation » de la politique du Fpi qui est en train de se mettre en place. En acceptant le Cadre permanent de dialogue avec le gouvernement, malgré l’arrestation de Charles Blé Goudé, les dirigeants du Fpi ouvrent ainsi de nouvelles possibilités. Ses cadres peuvent ainsi revenir dans la république. Cela, de manière démocratique et occuper un espace politique, laissé vacant, sans cesse grignoté par le Lider de Mamadou Koulibaly et les partis politiques satellites du Fpi. Après avoir tenté en vain d’imposer un préalable à toute négociation au gouvernement, à la libération du Président Gbagbo et de tous les autres prisonniers politiques, le Fpi a compris qu’il doit changer de stratégie, s’il ne veut pas se faire marginaliser politiquement en disparaissant du champ politique national et international. Dans le contexte politique ivoirien actuel, et compte tenu des enjeux de leadership qui s’imposent au sein de l’opposition ivoirienne, ce parti a donc tout intérêt à prendre une place prépondérante afin de mieux négocier avec l’exécutif et s’affirmer en leader de l’opposition.

En soutenant ainsi publiquement la décision de la France de mettre fin aux agissements de terreur des islamistes au nord du Mali, il amorce, de fait, un début de réconciliation, peut-être stratégique avec son principal ennemi d’hier. Alors qu’on s’attendait, une nouvelle fois, à entendre ce discours bien rodé, « d’actions colonisatrices et dominatrices » de la France au Mali, au mépris de sa souveraineté, c’est un soutien franc et sans ambiguïté qui est publié, à la surprise générale. Ce changement de stratégie de positionnement politique du Fpi est une voie nouvelle qui l’honore et peut lui permettre d’être reconsidéré au sein de l’Internationale socialiste et d’être un interlocuteur crédible. Cela peut permettre aussi de décrisper les relations entre la classe politique française et ce parti qui est considéré par des Européens comme une formation politique xénophobe prônant la haine et donc représentant une menace pour eux et pour tous les étrangers qui résident en Côte d’Ivoire.

Macaire DAGRY

Chroniqueur Politique à Fraternité Matin{jcomments on}

(Reçu à Kassataya le 21/01/2013)

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