Pizzorno subit elle un racket déguisé en Mauritanie ?

(Crédit photo : Pizzorno)

Seuls les charognards se précipitent sur les carcasses d’animaux morts pour s’en repaître. Et à voir ce que subit la société Pizzorno en Mauritanie on serait tenté de faire le parallèle.

Seulement, Pizzorno malgré les vicissitudes et les embûches n’est pas morte et continue vaille que vaille à remplir son contrat. Autrement, Nouakchott redeviendra le haut lieu d’insalubrité qu’elle était.

Qui peut avoir intérêt à voir cette société quitter la Mauritanie ? Que deviendront les 1200 travailleurs qu’emploie cette société ? Nouakchott ne replongera-t-elle pas sous des montagnes de détritus ? Depuis 2007, l’entreprise française Dragui Transport filiale du groupe Pizzorno Environnement, est chargée de la collecte et du ramassage des ordures ménagères de l’agglomération de Nouakchott. Cette collecte dite moderne est venue remplacer la gestion « artisanale » des déchets jusque là confiée, à des privés mauritaniens sous équipés et sans expérience.
Avant l’arrivée de Pizzorno, il n’y a avait aucun traitement des ordures ramassées, les enfants et les charretiers faisaient payer aux habitants une somme variant entre 500 et 1.500 ouguiyas par mois, et au final, la ville ressemblait à un vaste dépotoir. Les déchets enlevés n’étaient pas traités mais tout simplement jetés et abandonnés un peu partout aux différentes sorties de la ville. Pire, lorsque des monticules trop importants se formaient, on y mettait tout simplement le feu, quitte à polluer l’air et rendre un quartier irrespirable pendant plusieurs jours. Aujourd’hui, Pizzorno a mis en place à 23 kilomètre de Nouakchott un CET (Centre d’enfouissement Technique) répondant aux normes internationales.
L’étude prévisionnelle à la base du contrat de Pizzorno, prévoyait une production moyenne de 350 tonnes par jour de déchets ménagers et assimilés que la société s’était engagée à collecter. Très vite on s’était rendu compte que ce chiffre était très loin de la réalité. Aujourd’hui la société ramasse chaque jour entre 600 et 700 tonnes d’ordures. Soulignons que le contrat qui lie Pizzorno à l’Etat mauritanien est un contrat quantitatif et prévisionnel, autrement dit il ne prend en compte que les quantités effectivement enlevées, transportées au Centre d’Enfouissement Technique et dûment constatées par un agent de l’ADU (Agence de Développement Urbain) maître d’ouvrage délégué par la CUN (Communauté Urbaine de Nouakchott) pour l’exécution du contrat.
Au terme du contrat signé avec l’Etat mauritanien, Pizzorno s’était engagée à collecter une moyenne de 350 tonnes. Pour cela, elle devait mobiliser un effectif de 600 collaborateurs exploitant une quarantaine de bennes de collecte. Or, nettoyer une ville de plus d’un millions d’habitants, exige plus que ce qui était prévu au contrat.
La société compte aujourd’hui plus de 1200 collaborateurs mauritaniens et plus de 90 camions et engins. C’est dire que le volume des moyens matériels est lui aussi allé au-delà des stipulations du contrat. Malgré ces efforts soutenus, l’Etat mauritanien peine toujours à honorer ses engagements auprès de Pizzorno. Les paiements qui doivent se faire tous les 45 jours peuvent accumuler des retards qui vont jusqu’à un an entraînant des frais financiers et une révision des prix de certains fournisseurs locaux.

Dépense supplémentaire de plus de 160 millions d’ouguiya par an

Il faut souligner qu’après quatre ans de travail, Pizzorno n’a encore rapatrié aucun euro comme bénéfice. Pire la récente révision en hausse du smic mauritanien entraînera une dépense supplémentaire de plus de 160 millions d’ouguiya par.
Alors que la semaine dernière elle était sous la menace d’une fermeture et mise en chômage technique à cause de sa banque qui menaçait de fermer le robinet pour cause d’un découvert trop important, l’Etat avait finalement consenti à faire un petit geste pour éponger une partie des arriérés. Mais la société n’avait pas fini de goûter à cette bouffée d’oxygène que d’autres nuages s’amoncelaient à l’horizon.

Ouad Naga s’en mêle
Tout d’abord le Maire de Ouad Naga envoie à la société un commandement pour lui signifier que ses camions en route pour le site d’enfouissement doivent désormais s’acquitter d’un droit de passage de 250 000 Um par mois faute de quoi il les empêcherait de passer !!
Pourquoi Pizzorno devrait-elle payer une taxe que les centaines d’autres camions qui empruntent la route de l’espoir ne payent pas ?

Dahoud aussi
Ensuite c’est au tour d’un certain Aboubecrine Dahoud qui prétend que le site de terre plein de ramassage qui a été mis à la disposition de la société par l’Administration en application de la convention est situé sur des terrains qui lui appartiennent et au lieu de se retourner contre l’Administration ; il assigne Pizzorno en justice pour obtenir le prix du loyer pendant toutes ces années!
Pour sa part l’ADU exige de Pizzorno de prendre en charge la réparation du pont bascule situé au CET(Centre d’enfouissement technique) pour un cout de prés de 50000 euros alors que cette société n’a rien à voir avec son installation.

Inflation de procès
Mais le comble est atteint par les différents procès intentés en matière sociale, il y en a pour prés d’un milliard et demi d’ouguiyas !
Un employé licencié pour défaut de rentabilité réclame une indemnisation de 47 millions d’ouguiya. Un autre employé licencié pour avoir provoqué un incendie qui a ravagé le CET et malgré les images de la vidéo surveillance qui prouvent la faute lourde obtient une condamnation de la société pour lui verser plus de 45 millions d’ouguiya.
En 2009, après une saisine de l’Inspection Régionale du travail concernant leur plateforme revendicative, les travailleurs par l’intermédiaire de la CGTM ont assigné Pizzorno qui malgré les efforts notables dans le sens de l’amélioration des conditions des travailleurs a été condamnées à payer plus de 33 millions à des travailleurs au titre de compensation pour l’usage de certains équipements que pourtant la société a toujours distribué.

Au-delà des obligations légales

Pourtant Pizzorno, va au-delà de ses obligations légales pour venir en aide à ses travailleurs. Alors qu’elle n’avait prévu de recruter que 600 employés, Pizzorno en a déjà recruté plus de 1200 dont seulement 5 expatriés parmi eux un nombre important d’handicapés moteurs et de femmes, la société qui paye déjà un treizième mois, a ouvert un dispensaire gratuit pour ses employés et leurs familles. Des employés victimes de maladies graves comme un avc bénéficient de l’assistance permanente de la société.
Suite aux désaccords récurrents et après saisine du Conseil d’arbitrage, un expert a été désigné aux fins d’évaluer certains points des demandes des travailleurs. L’expert a rendu ses conclusions en mars 2011 et il évaluait lesdits droits à la somme de 1 183 000 000 UM. Signalons que ce montant représente plus de 50% des recettes annuelles brut que Pizzorno tire du contrat qui la lie avec l’Etat. C’est à croire que cette requête fantaisiste est surtout formulée pour faire jeter l’éponge à Pizzorno. Un autre employé qui se trouve en prison pour escroquerie et qui a donc été licencié pour abandon de poste réclame lui aussi plusieurs millions en dommages et intérêts mais la palme revient à cet autre employé qui avait été engagé à l’essai et au terme, cet essai jugé non concluant. Il y a été mis fin. Celui-ci a saisi l’inspecteur du travail pour réclamer 20 842 000 UM !!!! Et il ya des dizaines d’autres affaires toutes plus fantaisistes les unes que les autres.

Vache à lait
Les tous prochains jours, les juridictions mauritaniennes auront à se prononcer sur tous ces différends et bien entendu ils détermineront l’avenir de cette société en Mauritanie. Mais au-delà, c’est la confiance qu’auront les investisseurs en notre système judiciaire et en sa protection qui est en jeu. Sans une justice fiable et devant laquelle seul le droit prime aucun investisseur ne pourrait s’aventurer chez nous. Bien entendu il est hors de question de donner la primauté à l’étranger mais il ne faut pas non plus le considérer comme une vache à lait à la merci de tous les pans de pouvoir en Mauritanie.
Malgré tout, Pizzorno continue avec abnégation et dévouement à remplir sa mission. Le Groupe Pizzorno souffre aussi d’une autre confusion : il est tenu responsable de tout ce qui traîne dans les rues. Or, dans le contrat signé en 2007, « les cadavres d’animaux, les déchets verts, les gravats…. » ne font pas partie de la collecte dont il est chargé pourtant ils s’en acquittent de bon gré.
Plus de trois milles containers (malgré les vols et les actes de vandalisme) de diverses contenances dans lesquels les habitants peuvent déposer leurs déchets, ont été répartis dans les différents quartiers de Nouakchott. Des équipes de plus en plus rodées au travail s’occupent journellement de nettoyer, de ramasser et de transporter ces centaines de tonnes de déchets que nous produisons tous les jours.
Alors sachons préserver cet outil axons sur les transferts de technologie et de compétence et essayons de toujours tendre vers l’objectif Nouakchott Ville propre qui est le credo de l’équipe municipale actuelle. Et à moins d’être aveugle, amnésique ou de mauvaise foi, on ne peut qu’admettre que depuis que Pizzorno est là, le visage de la ville a radicalement changé. Certain quartiers sont même propres et les habitants ne se privent pas de le dire ouvertement et d’en remercier l’entreprise et ses employés. Le président lui-même a été maints fois témoins de l’ardeur au travail de certains employés qui font tout pour nous rendre agréable notre cadre de vie.

B.C.

Source  :  Le Quotidien de Nouakchott le 16/12/2012{jcomments on}

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